Afrique centrale : Le FMI, les Etats et le risque de dévaluation du franc CFA

Lundi 10 Avril 2017 - 18:00

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Plongés dans la récession économique inhérente à la baisse drastique des cours des matières premières dont le pétrole, les pays d’Afrique centrale cristallisent l’attention. Notamment face au risque et aux rumeurs rampantes sur une éventuelle dévaluation du franc CFA, leur monnaie commune. Alors qu’ils s’engagent dans un programme de redressement économique, les experts y voient un moyen de préserver la stabilité monétaire.

A la question de savoir si le programme de redressement économique en cours de négociation entre le Fonds monétaire international (FMI) et les pays d’Afrique centrale peut lever les inquiétudes sur une éventuelle dévaluation du francs CFA émis par la BEAC, Kalonji Kadima, représentant résident de ce fonds au Cameroun répond sans détour.

« Il est important, à travers les programmes de redressement économique, de pouvoir s’assurer et de reconstituer les réserves internationales de la sous-région qui ont fortement baissé du fait de la chute des prix du pétrole. En reconstituant ces réserves on pourra se prémunir d’une des pressions qui pourraient être exercées sur la monnaie », espère-t-il.

En effet, entre l’année 2014 et 2016, les réserves internationales de change des pays de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale (Cémac) que sont le Cameroun, le Congo, la Centrafrique, le Gabon, la Guinée Equatoriale et Tchad sont passées d’environ 9000 milliards de FCFA à seulement 3000 milliards. Ces faibles réserves de change sont devenues la clé de voûte du débat qui a surgi sur la non-conformité du taux de change actuel du franc CFA émis par la Banque des Etats de l’Afrique centrale (BEAC).

Sur la question, les chefs d’Etat des six pays, réunis le 23 décembre 2016 à Yaoundé, au Cameroun, en présence de la directrice du FMI, Christine Lagarde, ont eu une réaction on ne peut plus claire. « Les chefs d'Etat ont décidé d'ouvrir et de conclure à brève échéance des négociations bilatérales avec le Fonds monétaire international pour mieux structurer les efforts d'ajustement de leurs Etats et les accompagner vers une sortie de crise », indiquait le communiqué final de cette rencontre. Mais en soulignant tout de même que « le renforcement de la stabilité macro-économique ne nécessite pas un réajustement de la parité monétaire actuelle, plutôt des efforts d'ajustement sur les plans intérieurs et extérieurs assortis de réformes structurelles adéquates ».

Réformes structurelles

Tout l’intérêt des gens ordinaires dans la région est cependant concentré sur les réformes et les efforts d’ajustement attendus dans ces pays. Réformes et efforts qui, faut-il l’avouer, se transforment souvent en dérive sacrificielle pour les pauvres et faibles, comme cela était le cas au cours des années 1980 et 1990.

Selon le FMI dont les équipes descendent depuis quelques temps dans ces pays dont deux (le Tchad et la RCA) étaient en programme et quatre négocient le nouveau programme, les négociations en cours devraient bien se nourrir des leçons du passé. Et l’ajustement des politiques économiques « rapide » préconisé afin d’établir les équilibres macroéconomiques va s’appuyer sur un socle d’actions loin d’être un supplice pour les couches vulnérables.

Il s’agit entre autres de rationaliser les dépenses publiques tout en préservant les dépenses sociales prioritaires, donner la priorité aux dépenses d’investissement publique pour favoriser celles qui ont le plus gros impact sur la croissance économique, réduire le recours à l’endettement non concessionnel au profit des ressources concessionnelles, élargir l’assiette fiscale de manière à augmenter les recettes non pétrolières.

Des réformes sont aussi nécessaires, selon le fonds, pour diversifier les économies, stimuler le secteur public et augmenter l’intégration régionale. Cela, en améliorant le climat des affaires, l’inclusion financière, la libre circulation effective des biens et des personnes.

« Il est important de se prémunir de la dépendance vis-à-vis du pétrole en diversifiant l’économie et en mettant en place des réformes qui permettront au secteur privé, notamment, d’émerger et de promouvoir une industrie de secteurs hors pétrole qui seront porteurs de la croissance », pense Kalonji Kadima qui présentait, le 7 avril à Libreville au Gabon, les perspectives économiques de la région Cémac à un groupe de journalistes venus des six Etats. Il estimait, que loin d’être un sujet d’inquiétude, un programme entre le FMI et les six pays s’il venait à être conclu, sera une opportunité pour ces pays.

« Le FMI va, en plus de mettre ses propres ressources financières à la disposition des Etats de la Cémac, aider à catalyser les ressources des autres partenaires financiers », concluait-il.

Thierry Noungou

Légendes et crédits photo : 

Siège de la BEAC à Yaoundé (DR)

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