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Allons-nous vers de nouvelles guerres des religions ?

Lundi 29 Septembre 2014 - 12:34

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Le vingtième siècle avait ancré dans la plupart des sociétés humaines la conviction, héritée des siècles précédents, selon laquelle la croyance en l’existence d’un ou plusieurs Êtres suprêmes auxquels les hommes doivent se soumettre était révolue. Au prix de terribles drames tels que la révolution bolchevique en Russie ou la révolution culturelle en Chine, il avait imposé le matérialisme le plus extrême comme le seul vrai ressort du progrès dans les sociétés humaines. Et ce triomphe de la matière sur l’esprit avait imposé l’idée que la religion sous toutes ses formes n’était finalement que le legs d’un passé révolu que le progrès scientifique achèverait de détruire.

Il se trouve que les évènements en cours dans différentes régions du monde infirment cette thèse de façon radicale. Loin de se dissoudre dans l’univers très ouvert et dominé par la technique qui est devenu le nôtre, la croyance en un dieu unique ou multiple ne cesse de s’affirmer. Elle puise manifestement dans l’abolition du temps et de l’espace que génèrent les nouvelles technologies de la communication un dynamisme, une vitalité, une agressivité parfois qui s’avèrent chaque jour plus grands. Il suffit pour s’en convaincre de considérer l’incroyable poussée des Islamistes au Proche Orient dont Daesh tend à devenir le symbole, mais aussi, et de façon pacifique, l’extraordinaire essor des sectes protestantes en Afrique comme en Amérique latine qui tendent à marginaliser les trois grandes religions monothéistes construites sur la croyance en Allah, en Dieu et en Yahweh.     

Ce qui se passe actuellement en Syrie et en Irak, au Nigéria, dans le Nord du Cameroun, dans la Zone sahélo-saharienne, en Centrafrique donne à penser que si rien n’est fait pour organiser la coexistence pacifique des religions, des régions entières de la planète pourraient plonger à bref délai dans des affrontements idéologiques pires que ceux qui jalonnèrent les siècles précédents. L’homme étant toujours ce qu’il est, c’est-à-dire un être enclin à la violence la plus extrême, sous les prétextes les plus divers, mieux vaut ne pas croire ou espérer que les avancées scientifiques en cours ou à venir  modifieront radicalement son comportement. Et, par conséquent, réfléchir tant qu’il est temps à la façon de combattre par anticipation les mauvais instincts qui le poussent naturellement à se lancer dans des guerres fondées sur le rejet de l’autre, de ses croyances, de ses attentes.

L’Histoire nous l’a enseigné tout au long des siècles précédents, c’est toujours par le dialogue que l’être humain parvient à combattre ses mauvais instincts. Mais elle nous a appris aussi que ce dialogue s’instaure toujours au terme de crises  destructrices, lorsque la violence la plus extrême a démontré qu’elle ne résout jamais aucun problème. D’où cette idée aussi simple que difficile à concrétiser selon laquelle la meilleure manière de conjurer aujourd’hui le destin serait de réunir autour d’une même table les représentants des grandes religions, qu’elles soient monothéistes ou panthéistes, afin d’affirmer solennellement le caractère primordial de leur coexistence pacifique.

Un tel projet paraîtra certainement aussi illusoire qu’utopique à beaucoup. Il est probablement pourtant la seule façon de protéger l’humanité contre les nouveaux drames dont les évènements actuels sont les signes annonciateurs.  

 

Jean-Paul Pigasse

Edition: 

Édition Quotidienne (DB)

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