Aperçu historique : avant les téléphones, les pigeons voyageurs

Samedi 13 Octobre 2018 - 19:22

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La préoccupation de trouver des moyens de communication efficaces pour transmettre les messages ne date pas d’aujourd’hui. Il y a plus d'un siècle fut mis en place à Brazzaville un premier service de pigeons voyageurs. A l'heure d'internet et des moyens de communication modernes, cela paraît bien désuet. Mais les pigeons voyageurs étaient des messagers efficaces qui furent notamment employés en Europe au cours des deux guerres mondiales.

Le commandant Raynaud effectue, en 1907, avec Gabriel de Mostuéjouls, dans les environs de Brazzaville, les premiers essais d'envoi postal par pigeon, sous l'égide de la Société de géographie. ​Le contexte local est alors le suivant : " La création des relations télégraphiques et postales est le premier souci de toute administration coloniale s'implantant dans un pays neuf, beaucoup plus étendu que la France et relativement peu peuplé. La télégraphie ordinaire, très coûteuse à établir, traverse de vastes espaces où son entretien et sa protection sont extrêmement difficiles à assurer. Les indigènes malveillants ou ignorants l'interceptent souvent; parfois aussi les animaux, les éléphants en particulier, s'attaquent à une ligne et la détruisent méthodiquement en déracinant les poteaux sur de longs parcours. Dans ces conditions, le nombre de lignes télégraphiques est forcément très limité en raison des frais anormaux qu'elles occasionnent et du personnel technique que nécessite leur entretien et leur service".  Il s’agit ici de la totalité du Congo français d'alors et pas seulement du Congo Brazzaville d'aujourd'hui.

Ainsi,  "A défaut de moyens de transmissions perfectionnés, il fut fait appel à un mode de correspondance, en apparence seulement, primitif et suranné: le pigeon voyageur". Celui-ci pouvait parcourir de longues distances. De 60 à 70 km en une heure et avec de l'entraînement, pour un bel athlète, de l'ordre de 1 000 km en une journée! Un exploit qui ne pouvait se renouveler chaque jour. Le trajet journalier "raisonnable" étant un parcours de 200 km effectué en 2h30. L'idée qui germa fut donc l'implantation de colombiers, espacés chacun de 200 km. Le message à transporter passait ainsi d'un pigeon à l'autre, et en dix heures, on pouvait espérer  franchir 1 000 km !

"Tel fut le fonctionnement de cette poste aérienne dont l'emploi ne nécessita aucune connaissance technique compliquée et dont le service fut très largement assuré par un personnel restreint: deux colombophiles par colombier. Un pigeon portait aisément en papier pelure une longue lettre de six pages écrite sur le format écolier. Si le message était écrit en deux exemplaires portés par deux pigeons lâchés séparément, les chances de pertes étaient nulles. " 

Le programme postal du commandant Raynaud permit la mise en place d'un premier colombier à Brazzaville, grâce aux subsides du ministère de la Guerre, de celui des Colonies et avec l'aide de la Société de géographie. "Les nouvelles récentes qui arrivèrent du Congo confirmèrent toutes les espérances et les expériences qui s'y poursuivirent sur l'emploi des pigeons-voyageurs donnèrent des résultats de plus en plus satisfaisants. L'administrateur de Mostuéjouls, quittant Brazzaville, emmena dix volatiles et après cinq jours de marche, du marché de M'Koï Euoka, à environ 100 km au nord de Brazzaville, on reçut de ses nouvelles, bien que les pigeons n'eussent jamais été entraînés dans cette direction. " [...] "Le commandant Raynaud estima organiser complètement ce service en juillet 1908."(Revue "A Travers le Monde" - n°1 du 4 janvier 1908)

Toutefois, l'élevage des pigeons exista traditionnellement au Congo avant l'arrivée du colonisateur français.

Un peu d’histoire…

Gabriel de Mostuéjouls vit le jour le 28 mai 1862 à Toulon. Fils du comte Dieudonné de Mostuéjouls, d'une famille noble fort ancienne originaire du village du même nom, dans l'Aveyron, il arriva en Afrique en 1892 comme mécanicien. Nommé "chef d’exploration" au Congo français, il participa de 1899 à 1901, aux côtés d'Emile Gentil, à la Mission Congo-Tchad. Ce dernier le qualifia de "vieil ami".

Il devint chef de poste de "Tounia" au sud du Tchad (futur Fort-Archambault) et fut commandant du " Léon Blot ", bateau lui permettant alors de naviguer tant bien que mal sur le fleuve Chari. Ce fut un bateau à vapeur démontable qui arriva en "pièces détachées" au cœur de l'Afrique. Il portait le nom d'un compagnon de Savorgnan de Brazza, mort au cours d'une expédition.

Les qualités de mécanicien de Mostuéjouls furent un atout pour mettre en service ce moyen de locomotion fluviale, indispensable aux longs trajets effectués par les missions françaises. Il participa ainsi indirectement à la féroce répression militaire contre le sultan tchadien Rabah. Il fut fait chevalier de la Légion d’honneur en 1901 (à titre civil), pour " huit ans et dix mois de services : services distingués rendus aux missions de l'Afrique centrale et spécialement à la mission Gentil. Titres exceptionnels." Il devint administrateur colonial en 1904. Il quitta le Congo en 1912, en prenant sa retraite " à sa demande et à titre d'infirmités contractées au service " à l'âge de 50 ans.

Source: http://voyage-congo.over-blog.com.

 

Aubin Banzouzi

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