Arrangement particulier : le mode de désignation du Premier ministre divise

Mardi 17 Janvier 2017 - 17:27

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Les ultimes tractations relatives au document additif de l'accord politique conclu le 31 décembre butent essentiellement sur cette question, chaque camp s’en tenant à ses motivations.  

Le chef de l’État, Joseph Kabila, devrait-il, par pure formalité, se contenter de nommer le Premier ministre que le Rassemblement lui a présenté sans avoir un mot à dire, ou mieux faire prévaloir son droit de véto que lui reconnaît la Constitution ? C’est autour de cette problématique qu’achoppent les discussions du centre interdiocésain censées reprendre ce 18 janvier après un moment de répit imposé par les deux journées de commémoration des héros nationaux, Patrice-E-Lumumba et Mzee Laurent Désiré Kabila. En tout, aucun de deux camps en présence (majorité et opposition) n’entend lâcher du lest dans cette querelle portant sur le mode de désignation du prochain Premier ministre. De sorte qu’aujourd’hui, c’est l’unique point qui bloque lorsqu’on sait que, sur les autres matières liées au format, à la composition et à la nomenclature du prochain gouvernement, les parties prenantes ont déjà proposé à qui de droit leurs contributions. Et apparemment, il n’y a pas forcément de divergences de vue autour de ces questions sur lesquelles le consensus s’est dégagé sans trop de problème.

Cela est loin d’être le cas pour la désignation du Premier ministre, l’opposition et la majorité n’émettant pas sur la même longueur d’ondes. Pour le Rassemblement, il faut s’en tenir à l’accord du 31 décembre qui est très clair à ce sujet. « Le gouvernement de la République est dirigé par le Premier ministre présenté par l’opposition politique non signataire de l’Accord du 18 octobre 2016 (Rassemblement) et nommé par le président de la République conformément à l’article 78 de la Constitution », peut-on lire dans l’accord. Pour le Rassemblement, le droit que ledit accord lui confère de désigner un Premier ministre ne peut être remis en cause. L’on entend dire, du côté du Rassemblement, que « le gouvernement à venir et les institutions de la République tirent la source de leur légitimité de l’accord politique » et que cela suffit pour que le chef de l’État n’interfère plus dans le choix du Premier ministre. L’autre argument développé par le Rassemblement pour récuser le pouvoir discrétionnaire du président de la République dans la procédure de nomination du Premier ministre, c’est le fait qu’il a failli à sa mission constitutionnelle d’organiser les élections dans les délais. Et par conséquent, tranche l’opposition non signataire de l’accord du 18 octobre, « il ne peut plus sérieusement se prévaloir de ses prérogatives constitutionnelles ».

Cette façon de voir est balayée par la majorité présidentielle qui tient mordicus à voir son autorité morale exercer entièrement son droit de véto en usant de son pouvoir discrétionnaire dans le choix du Premier ministre. Pour la majorité présidentielle, le chef de l’État a son mot à dire dans ce processus d’autant plus qu’il ne peut travailler avec une personnalité incompatible. Dans une approche de gestion commune de la transition où les têtes de l’exécutif national sont appelées à collaborer, il va sans dire que l’avis du chef de l’État sur la personne désignée s’impose. « La rationalité constitutionnelle procède du droit de veto reconnu au chef de l’État : cela implique que ce dernier a le droit de choisir qui il veut », argumente Alain André Atundu, porte-parole de la majorité présidentielle qui pense « qu’on ne peut pas chercher à imposer un choix au chef de l’État ». Voilà pourquoi, explique-t-il, sa famille politique a demandé au Rassemblement de proposer trois ou quatre noms, quitte à ce que le chef de l’État en choisisse un dans son pouvoir discrétionnaire.

Par ailleurs, il nous revient que la majorité présidentielle se préparerait à bloquer l’investiture du prochain gouvernement au cas où le Premier ministre ne serait pas un député. « Sans mot d’ordre de l’autorité morale de la majorité parlementaire, l’Assemblée nationale n’acceptera pas d’investir un Premier ministre non député national ou un Premier ministre invalidé par elle par peur légitime des représailles et de non-reconnaissance des droits constitutionnellement acquis des députés nationaux », a dit, sous le sceau de l’anonymat, un cadre de la mouvance présidentielle.

Jusque-là, aucun compromis n’est trouvé sur cette question. Majorité et opposition ne parviennent pas à trouver la bonne formule qui satisfasse tout le monde. Ce qui fait dire à certaines langues que cette question relève plus d’un problème d’égo que devraient se départir Joseph Kabila et Étienne Tshisekedi pour permettre à la République d’avancer à travers la mise en application de l’accord de la Saint- Sylvestre.

 

Alain Diasso

Notification: 

Non