Banque mondiale : Raju Singh présente le nouveau partenariat entre la Banque mondiale et les pays d’Afrique centrale

Vendredi 6 Décembre 2013 - 10:27

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L’économiste en chef de la Banque mondiale (BM) pour l’Afrique centrale explique le nouveau positionnement de la BM

L’insécurité en Afrique

Raju Singh observe que beaucoup de pays africains sont ou deviendront producteurs de ressources naturelles qui, bien utilisées, peuvent réduire les risques de conflits. Il cite le cas de la République centrafricaine (RCA), riche en bois, diamants et autres ressources, mais manquant de services publics. Selon lui, cette absence de l’Administration dans beaucoup de régions a contribué à la frustration de la population et aux problèmes sécuritaires que le pays connaît depuis bien des années.

À cet égard, d’après lui, il est essentiel de revoir la composition du budget des États africains et de les encourager à investir différemment, notamment dans les services publics de base tout en maintenant la sécurité. D’après des recherches récentes menées à la Banque, « force est de constater que les dépenses militaires sont quelquefois productives », souligne-t-il.

Au sujet des dépenses sociales telles que la santé ou l’éducation, Raju Singh est convaincu qu’elles peuvent concourir également à réduire les conflits. Mais pour cela, il faut qu’il y ait une amélioration tangible dans la situation des populations. Si les dépenses en santé ou en éducation ne se traduisent pas par des actions concrètes sur le terrain et des améliorations visibles dans les indicateurs, elles peuvent au contraire générer plutôt des frustrations et un risque de conflit accru. Raju Singh milite ainsi pour une visibilité de la dépense publique.

« L’expérience centrafricaine est triste. La population est 30% plus pauvre qu’au moment de l’indépendance. » Le pays est pris dans un cercle vicieux, celui du piège de la fragilité, où l’insécurité a réduit l’assiette fiscale, les ressources que l’État peut allouer pour assurer sa souveraineté sur l’intégralité de son territoire augmentant ainsi davantage l’insécurité. « Nos appuis budgétaires ont été peut-être trop timides, avoue-t-il. Aujourd’hui, il faut tout envisager pour financer une présence de l’Administration et des services publics dans l’ensemble du pays. »

La nouvelle politique de partenariat de la Banque mondiale

Et en termes de partenariat économique, il souligne l’importance de mettre en œuvre la nouvelle stratégie de la BM pour l’Afrique, « car l’Afrique change, beaucoup de pays accèdent à des sources de financement autres que celles de la BM. Dans ce nouvel environnement, la BM privilégie la réflexion et l’échange de connaissances. »

Les pays de la région se tournent de plus en plus vers la BM comme source d’expertise et non plus comme source de financement. C’est le cas du Cameroun, qui n’a plus d’appuis budgétaires de la BM.

La BM, au travers de publications semestrielles – Les Cahiers économiques du Cameroun, par exemple –, contribue au débat en partageant ses analyses et statistiques avec non seulement l’Administration, mais également avec la société civile, le monde académique, le secteur privé, les médias. Ce support a aussi contribué à changer la perception que la population avait de la BM : une perception qui était restée figée à l’ère des ajustements structurels. « Nous dialoguons, créons de nouvelles dynamiques. »

L’autre exemple concerne la Guinée équatoriale et le Gabon, où les deux pays paient directement la BM pour ses conseils. C’est un modèle de relation qui a été développé avec les pays pétroliers du Moyen-Orient. « C’est un modèle nouveau en Afrique, mais qui est appelé à se développer », révèle-t-il. En Guinée équatoriale, le pays le plus riche d’Afrique, mais dont les trois quarts de la population vivent encore en dessous du seuil de pauvreté, « la BM a été appelée par le gouvernement à l’assister à transformer les ressources naturelles du pays en ressources humaines. C’est donc une relation complètement différente que par le passé. Je crois que le futur de nos relations avec l’Afrique tient dans ces contrats de service, de partenariat », dit-il. Cette option va aussi dans le sens que le nouveau président de la BM veut donner à la Banque : « Venir avec une optique de fournir des solutions et non pas en ordre dispersé ».

 

NB : Raju Sing est chef économiste, basé au Cameroun et responsable de l’Afrique centrale au sein de la Banque mondiale. Il a officié pour le Fond monétaire international. Ancien consultant, il a travaillé avec les banques centrales de Tanzanie et du Rwanda. Il s’est fait connaître dans sa fonction d’intervenant à l’Institut des hautes études internationales de Genève (Suisse).

Prix 2013 : Le président de la BAD hommede l’année 2013
En reconnaissance de son rôle de fer de lance du fonds Africa50 en vue de mobiliser le financement de projets d’infrastructures en Afrique, le président de la Banque africaine de développement (BAD), Donald Kaberuka, a été nommé l’homme de l’année 2013. Parrainé par le journal du Nigeria « Daily Trust », le prix sera décerné à Donald Kaberuka lors d’une cérémonie prévue le 15 janvier 2014 à Abuja (Nigeria) par l’ancien président sud-africain Thabo Meki, l’Africain de l’année 2012. D’un montant de 50 000 dollars, ce prix est une marque de reconnaissance de l’action de son récipiendaire au développement du continent.

Le fonds Africa50
Lancé conjointement avec la Fondation Made in Africa et introduit au Nasdaq, le fonds Africa50 a pour objectif de réduire le délai de réalisation des projets d’infrastructures
en Afrique et espère lever 500 millions de dollars d’ici à la fin du premier trimestre 2014. Il est considéré comme le véhicule de financement d’infrastructures africain le plus important grâce à des financements provenant du secteur privé et de partenariats public-privé. Le fonds Africa50 est composé de deux volets, à savoir le développement
de projets et le financement de projets.

Propos recueillis par Noël Ndong