Campagne électorale : l'Acaj préoccupée par les violations des droits de l’homme

Mercredi 19 Décembre 2018 - 17:00

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L'organisation de défense des droits de l'homme indexe les autorités politico-administratives, cadres de l’administration publique et agents de services de sécurité qui ont planifié et exécuté les actes décriés avec le concours de certains jeunes.

 

L’Association congolaise pour l’accès à la justice (Acaj) se dit profondément préoccupée par les violations des droits de l’homme enregistrées en marge de la campagne électorale. Dans un communiqué publié à quatre jours du déroulement des scrutins, elle se dit également inquiète à la suite de la non-publication de la liste définitive des électeurs par la Commission électorale nationale indépendante (Céni).

152 cas des violations des droits de l’homme

En marge de la campagne électorale en cours, l’Acaj a assuré avoir  enregistré, à ce jour, cent cinquante-deux  cas des violations des droits de l’homme dont cinquante atteintes à l’intégrité physique, trente-cinq atteintes à la liberté de manifestation et réunions publiques, trente atteintes à la liberté de mouvement, vingt-sept atteintes à la propriété privée et dix à la vie (morts) parmi lesquelles trois à Kalemie, trois à Lubumbashi, trois à Tshikapa et un à Mbuji-Mayi. « À Kalemie, Lubumbashi et Mbuji-Mayi, ce sont de morts par balles; tandis qu’à Tshikapa, par étouffement dû au gaz lacrymogène lancé par la police contre les partisans de l’UDPS et le Front commun pour le Congo (FCC) en affrontement à l’aéroport », a précisé l’ONG.

Les détenteurs du pouvoir public accusés

Les auteurs de ces violations, selon l'association, sont les autorités politico-administratives, cadres de l’administration publique et agents de services de sécurité, qui les ont planifiées et exécutées avec le concours de certains jeunes du FCC. Ainsi, a-t-elle expliqué, à Kindu, Kalemie et Lubumbashi, par exemple, ce sont les autorités locales qui ont recruté et payé des jeunes pour entraver la campagne électorale du candidat Martin Fayulu, de la coalition Lamuka. « Dans un enregistrement audio, qui circule dans les réseaux sociaux, on entend le gouverneur de la province du Haut-Katanga, Pande Kapopo, en train d’inciter ses partisans à perturber la campagne électorale de Martin Fayulu. À Mbuji-Mayi, Kananga et Tshikapa, les autorités locales ont tenté de perturber la campagne électorale du candidat Felix-Tshisekedi du regroupement Camp du changement (Cach) en réquisitionnant la quasi-totalité de motos-taxis et faisant ériger des barricades sur les routes menant à l’aéroport pour empêcher ses partisans à l’accueillir. Le maire de la ville de Kananga a même publié un arrêté interdisant toutes manifestations publiques en violation des dispositions légales relatives à la campagne électorale », a soutenu l’Acaj.

L’ONG a également noté que des actes de perturbation des rassemblements et destruction des affiches du candidat Emmanuel Ramazani Shadary ont été enregistrés dans plusieurs villes, notamment à Kisangani, Goma, Bukavu et Beni. Ceux  du candidat Félix Tshisekedi l’ont été à Bunia et Beni, et ses effigies détruites à Mbuji-Mayi. « Ce 18 décembre 2018, plusieurs jeunes ont manifesté contre l’arrivée du candidat Emmanuel Ramazani Shadary à Tshikapa et la police les a dispersés. Dix policiers ont été blessés et cinq de leurs véhicules incendiés », a souligné l’Acaj, ajoutant que dans plusieurs provinces, les autorités ont systématiquement employé les moyens et personnel de l’État pour la campagne du candidat Emmanuel Ramazani Shadary que pour elles-mêmes. Les médias publics, a affirmé l’association, diffusent abondamment ses spots publicitaires de campagne.

L’Acaj a fait savoir également que dans la capitale, six militants du mouvement Lucha ont été arrêtés le 14 décembre par des militaires de la Garde républicaine au marché de la liberté, dans la commune de Masina, alors qu’ils sensibilisaient la population au profil de candidats à voter, avant d'être  libérés le 17 décembre vers 22 h. Entre-temps, six autres qui réclamaient la libération de leurs camarades, ont été arrêtés le même jour et sont encore en détention. L’organisation a relevé également que certaines compagnies de transport aérien auraient été menacées de représailles au cas où elles transporteraient le candidat  Martin Fayulu vers les localités ne disposant que de petits aérodromes.

Condamnant ces violations des droits de l’homme ainsi que celles de l’article 36 de la loi électorale relative à l’interdiction  d'utiliser à des fins de propagande des biens, des finances et du personnel publics, l'Acaj demande au gouvernement de protéger les candidats de l’opposition et leurs partisans contre toute sorte d’entraves illégales durant la campagne électorale et à faire respecter la loi électorale. Elle exhorte le gouvernement à faire libérer les six militants de Lucha, arbitrairement détenus au cachot du Commissariat provincial de la police de Kinshasa et de faire cesser toute entrave à la liberté d’expression et d’opinons. En outre, le procureur général près la Cour de cassation et à l’Auditeur général des Forces armées de la RDC à enquêter sur les violations des droits de l’homme commises en marge de la campagne électorale.

À propos de la non-publication de la liste des électeurs par la Centrale électorale, l’Acaj rappelle qu’aux termes de l’article 20 de la décision n° 001 bis/Céni/Bur/18 du 19 février 2018 portant mesures d’application de la loi électorale, la Céni publie trente jours avant la campagne électorale, la liste des électeurs produite par centre de vote et par bureau de vote. Elle est rendue disponible pour consultation par toute personne intéressée, aussi bien au secrétariat exécutif national, dans les bureaux des secrétariats exécutifs provinciaux, au niveau provincial et dans les antennes, au niveau local ainsi que sur le site web de la Céni.

L’ONG dit, par contre, constater qu’en dépit de ses multiples appels lancés à la Centrale électorale pour appliquer la disposition légale précitée, rien n’est fait à quatre jours des élections. « La publication de la liste définitive des électeurs, l’affichage de la cartographie des bureaux et la mise à la disposition des candidats présidents de la République des séries des machines à voter et leur localisation sont des éléments essentiels de la transparence des élections », a déclaré le président de l’Acaj, Me Georges Kapiamba. 

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Me Georges Kapiamba, président de l'Acaj /Adiac

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