« Capitaine Phillips » : une histoire vraie

Samedi 7 Décembre 2013 - 9:15

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La nuit du 8 au 9 avril 2009, le Maersk Alabama, cargo américain commandé par Richard Phillips, est attaqué par quatre pirates somaliens alors qu’il voguait en direction du port de Eyl, où il comptait acheminer de l’aide humanitaire

Après un jeu du chat et la souris entre l’équipage de Phillips et celui des pirates menés par Muse, Phillips se retrouve pris en otage par les quatre hommes. À l’issue de cet épisode, il a témoigné dans l’ouvrage A Captain's Duty: Somali Pirates, Navy Seals, and Dangerous Days at Sea,paru en 2010. Le réalisateur, Paul Greengrass, spécialiste des documentaires dramatiques à qui l’on doit entre autres Bloody Sunday, La Mort dans la peau, La Vengeance dans la peau, Vol 93, s’empare de l’affaire et signe en 2013 l’adaptation cinématographique Capitaine Phillips, confiant à Tom Hanks le rôle principal.

Le film tient en haleine un spectateur victime d’un mal de mer féroce du début à la fin, à la limite de la claustrophobie. Le face-à-face des chefs des deux équipages s’observe comme un combat entre hommes qui se parlent mais ne se comprennent pas, pourtant leur dialogue progresse, sans aboutir. Cette relation ambigüe invite à une réflexion sur l’état du monde, les blessures que sont en train de laisser la mondialisation.

Dans le film, l’Américain Phillips est marié, père de famille, capitaine dévoué et courageux. Les pirates ? ils sont cantonnés au titre d’ennemi. Qui sont-ils ? d’où viennent-ils ? pourquoi frappent-ils ? dans quel contexte ? Démunis, ils n’ont rien à perdre et agissent aveuglé par l’appât d’un gain qu’ils ne toucheront pas. Hormis les quelques minutes d’introduction tournées sur une plage somalienne, Greengrass n’a pas l’air de vouloir en dire plus et le point de vue restera du côté US. Sa force de réalisation restera dans une mise en scène réaliste, avec des séquences d’assaut, au début et à la fin, à couper le souffle.

Tom Hanks s’illustre dans un jeu intense, particulièrement notable dans l’une des dernières scènes : retenu captif depuis de longues heures dans une cabine exiguë, l’homme est désydraté, asphyxié, la tension est palpable. Son adversaire, Barkhad Abdi dans le rôle de Muse, n’est pas en reste. Avec sa silhouette frêle et son regard pénétrant, il tient tête à Hanks sans réelles difficultés. Pour ce jeune acteur de 28 ans, la route vers le cinéma a été longue. Né en Somalie, la guerre le fait fuire, lui et sa famille, au Yemen. Le clan Abdi gagne à la lotterie américaine la fameuse carte verte et s’envole pour Minneapolis. Barkhad Abdi est chauffeur de taxi lorsqu’il passe le casting de Capitaine Phillips un peu par hasard et séduit l’équipe du film. Aujourd’hui, il travaille en tant que réalisateur sur son premier film, Ciyaalka Xaafada, et la rumeur hollywoodienne le voit parmi les sélectionnés pour la course à l’Oscar 2014 du meilleur second rôle. Réponse le 14 janvier 2014.

Capitaine Phillips, de Paul Greengrass, avec Tom Hanks, Barkhad Abdi, Catherine Keeder, Faysad Ahmed, Yul Vazquez, Chris Mulkey, Barkhad Addirahman, Mahat M. Ali. 2h14.

Morgane de Capèle