Centrafrique : le président de l’Assemblée nationale destitué

Samedi 27 Octobre 2018 - 14:11

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La révocation d’Abdou Karim Meckassoua a eu lieu le 26 octobre à Bangui, à l’issue d’une session plénière de la chambre basse du parlement.

La procédure de destitution du président de l’Assemblée nationale remonte au 17 octobre, lorsqu’une motion y relative avait été déposée avec la signature de quatre-vingt-quinze des cent quarante députés, évoquant une mauvaise gouvernance de la législature. Après plusieurs heures de débat, quatre-vingt-dix-huit députés ont voté pour sa destitution, quarante et un contre et un député s’est abstenu.

Aussitôt le texte adopté, les tensions sont montées d’un cran le soir du même jour dans la capitale centrafricaine. Des témoins ont fait état de tirs intenses entendus à travers la ville, sans mentionner d’autres détails dans l’immédiat. Le 23 octobre, plus de quatre cents personnes, dont de nombreux habitants du PK5, avaient manifesté jusqu’au quartier général de la Mission de l’ONU en Centrafrique (Minusca, treize mille Casques bleus) pour protester contre la procédure de destitution du président de l’Assemblée.

Les parlementaires centrafricains sont allés jusqu’au bout de leur démarche contre Abdou Karim Meckassoua alors que le G5, groupe partenaire de la Centrafrique, composé de l’Union européenne, l’Union africaine, la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale, la France et des Etats-Unis, les avait mis en garde contre les « risques d’instrumentalisation pour la stabilité du pays et de ses institutions ». Dans un communiqué rendu public un jour plus tôt, soit le 24 octobre, il avait également qualifié de « tractations » cette sorte d’ultimatum engagé contre sa personne.

Abdou Karim Meckassoua est le député du troisième arrondissement de la capitale Bangui, qui comprend le PK5, le quartier abritant la majorité des musulmans de cette ville. Interrogé sur les causes de la destitution de ce parlementaire, Mathurin Dimbélet Makoé, 2e vice-président de l’Assemblée, a dit qu’il était accusé par ses détracteurs d’avoir « confisqué des dossiers essentiels pour les députés », évoquant mi-octobre devant la presse une « opacité dans la gestion des finances » de cette chambre du parlement. Plusieurs députés ont, quant à eux, fait savoir que la pétition et la tentative de destituer Abdou Karim Meckassoua pourraient avoir été pilotées par la présidence centrafricaine qui souhaiterait placer un de ses fidèles à la tête de l’Assemblée.

Après le début de la crise centrafricaine fin 2012, suivie du déferlement de haine entre les rebelles de la coalition Séléka, à dominante musulmane, et les groupes antibalaka, prétendant défendre les chrétiens à partir de 2013, la tendance était déjà à l’équilibre entre les deux camps, lorsque la présidence a été échue à Faustin-Archange Touadéra, d’origine chrétienne, et qu’Abdou Karim Meckassoua, d’origine musulmane, a été élu à la tête de l’Assemblée nationale. Ce qui a contribué effectivement à apaiser des tensions en ce sens que cela était apparu comme un symbole de réconciliation en Centrafrique.

Fort malheureusement, dans ce pays où l’influence politique reste en partie communautaire, les relations entre les deux hommes n’étaient plus bonnes, des rumeurs de coups d’Etat avaient circulé, des proches de l’actuel président du pays n’hésitant pas à accuser publiquement Abdou Karim Meckassoua. Sa destitution était prévisible puisqu’en mars, un proche du président Faustin-Archange Touadéra avait été élu vice-président de l'Assemblée: une volonté, selon les observateurs à l’époque, de saper l’autorité de Abdou Karim Meckassoua.

 

Nestor N'Gampoula

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