Centrafrique : un leader anti-balaka condamné aux travaux forcés à perpétuité

Mercredi 24 Janvier 2018 - 15:15

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Rodrigue Ngaïbona, connu sous le nom de général Andilo, a été reconnu coupable des cinq chefs d'accusation (assassinat, vols aggravés, séquestration, association de malfaiteurs et détention illégale d'armes de guerre et de munitions) pour lesquels il était jugé. Ecopé de la prison à vie,  il est aussi frappé d'une amende de cent dix-huit millions de francs CFA de dommages et intérêts.

Au terme de neuf jours de procès, la justice centrafricaine vient de condamner le leader anti-balaka aux travaux forcés à perpétuité ainsi qu'à verser aux victimes ou à leur famille cent dix-huit millions de francs CFA de dommages et intérêts. Ses avocats ont d'ores et déjà annoncé qu’ils se pourvoiraient en cassation dans les trois prochains jours.

« La justice centrafricaine n’a pas du tout affaire à un procès anti-balaka. La justice centrafricaine ne peut que poursuivre les criminels, ceux qui ont commis des infractions et qui doivent être jugés. Tel est le cas d’Andilo qui a commis des infractions et qui après une procédure longue a abouti à sa condamnation à perpétuité. C’est une décision normale qui a été rendue », a commenté le représentant du collectif des parties civiles, Me Malekoudou.

En revanche, pour la défense, ce jugement est un scandale. « Notamment, parce que ce sont justement les anti-balaka qui sont ici visés ». Durant tout le procès, extrêmement suivi en Centrafrique, les rumeurs ont couru sur les conséquences de ce jugement. En plus de la justice centrafricaine, le général Andilo pourrait se retrouver entre les mains de la Cour pénale spéciale, chargée d’enquêter sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité, lorsqu’elle sera effective dans quelques mois.

De son vrai nom Rodrigue Ngaibona, le « Général Andilo » fait un peu figure d’électron libre, difficilement contrôlable. Il a, d’ailleurs, souvent eu maille à partir avec d’autre chefs de milice anti-balaka. On trouve pour la première fois sa trace en 2012 dans un rapport d’International Crisis group. Andilo n’a pas 25 ans, mais il est déjà connu dans la région de Batangafo pour être un coupeur de route, un voleur de bétail, dont les autorités tchadiennes auraient demandé la neutralisation à Bangui.

Avec son groupe, en décembre 2013, celui qui ne se prétend alors que « colonel » participe à la vaste offensive sur Bangui. C’est déjà un des leaders importants de la mouvance anti-balaka, mais les mois suivants, Andilo monte en puissance.

En avril 2014 à Bouca, il inflige une cuisante défaite à un lieutenant du puissant chef Seleka Mahmat Al Khatim. En juillet et en août de la même année, son groupe, très actif dans cette zone, est à la pointe d’une attaque contre les Seleka à Batangafo. Quelques jours plus tard, il affronte avec ses hommes à Bangui une autre faction anti-balaka commandée par d'anciens militaires dans le 4e arrondissement. Ces affrontements violents ne s'arrêtent qu’en échange de plusieurs véhicules.

En septembre, il est soupçonné d'être à l'origine de l'incendie d'un village entre Damara et Bouca, où un proche a été tué la veille. En octobre, il s'en prend à un convoi de la Minusca à Bangui: un Casque bleu pakistanais est tué. Début janvier 2015, Andilo joue les stabilisateurs, lançant un ultimatum aux braqueurs et voleurs de son fief de Boy Rabe. Mais quelques jours plus tard, peu avant son arrestation à Bouca, on le soupçonne d'avoir braqué une église du 4e arrondissement de Bangui pour voler le véhicule d’un diacre.

Arrêté à Bouca en janvier 2015 par la Minusca, la force de l’ONU, à 300 km au nord de la capitale, Rodrigue Ngaibona est le premier acteur de la crise centrafricaine qui a ravagé le pays de 2013 à 2015 à être jugé.

Yvette Reine Nzaba

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