Claude Le Roy : « Mon avenir n’est plus important. Le plus important c’est l’avenir du football au Congo »

Dimanche 1 Février 2015 - 17:26

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Au lendemain  de l’élimination du Congo en quart de finale de la Coupe d’Afrique des nations face aux Léopards de la RDC, Claude Le Roy a échangé avec la presse nationale sur les leçons à tirer  de l’élimination des Diables rouges en y évoquant son avenir.

Face à la RDC, il s’est déroulé un scenario imprévisible. Le Congo menait 2-0 avant d’être rattrapé et devancé au score. Cette élimination en quarts de finale, comment l’avez-vous vécue ?

Claude Le Roy : J’ai passé une nuit très mauvaise. J’étais déçu et anéanti. Ce n’est pas pour moi mais pour ces joueurs qui méritaient je pense autre chose et qui ont fait tellement d’efforts depuis un mois. C’est un groupe professionnel. Déjà on a eu ce bonheur de se qualifier pour cette coupe d’Afrique des nations quinze ans après puis terminer premier de notre groupe et premier de tous les groupes. Et puis ce quart de final est arrivé. Je pense qu’on a été victime un  peu de notre inexpérience, dans l’euphorie du deuxième but. On sait qu’après les buts, il faut se reconcentrer complètement. On était encore un petit peu sur les nuages, manque d’habitude de gestion de ces moments-là, peu de jeunesse internationale. Et puis,  il aurait fallu qu’on reste un peu plus longtemps à deux à zéro pour ne pas leur permettre de reprendre espoir. Ils sont revenus trop vite dans le match à deux à un. A deux à un but bien évidemment, le vent a changé de côté. Il a soufflé à leur dos parce que ce sont eux qui étaient les chasseurs en ce moment-là derrière le gibier Congo. Puis qu’ils avaient la possibilité alors que peu  de temps à deux à zéro, on sentait qu’ils avaient pris un coup sur la tête. A deux à un bien évidemment l’espoir regagnait leur camp. Et sur le deuxième but c’est comme si un coup de massue était tombé sur la tête des joueurs. Puis ils avaient du mal à se relever. Mais c’est la vie du football. C’est comme ça qu’on apprend ; c’est comme ça qu’on grandit et c’est comme ça qu’on gagne en maturité. Toutes les équipes ont connu ça dans leur trajectoire. C’est comme ça qu’on apprend. Je donnais l’exemple tout à l’heure de pleins d’histoires de football. On peut citer de milliers de matches où ça bascule. Parce que là c’était un problème mental. On croit qu’on y est arrivé et d’un seul coup, on commence à trembler sous la pression de l'équipe adverse. Je crois qu’à deux - un on avait encore une superbe occasion de 3-1 par  Fodé Doré . Je crois qu’en ce moment-là, il nous aurait permis de nous qualifier. Ce que je retiens, c’est la très belle image laissée par cette équipe du Congo. Beaucoup de gens ont aimé cette équipe. Elle a fait plaisir par sa générosité, son enthousiasme, sa solidarité. C’est une bonne expérience. Cela m’a rendu triste parce que j’avais tellement aimé conduire cette équipe en demi-finale. Mais ce que je retiens, c’est tout ce qu’ils ont fait avant.

 Durant toute la compétition vous avez longtemps réfléchi  avant d’arrêter votre équipe. Pour ce match contre la RDC quelle était la stratégie ?

CLR : Elle aurait été assez facile parce qu’on savait qu’il fallait qu’on prenne un peu le jeu au milieu qui risquait d’être un petit peu en infériorité numérique parce qu’ils voulaient mettre beaucoup de puissance athlétique devant.  Je savais avant, J’en avais même  parlé . J’avais dit qu’on avait une équipe pour marquer des buts contre la RDC par contre on n’était pas à l’abri de leur incroyable potentiel athlétique offensif. Nous sommes tombés hier sur un grand Dieu-Merci Mbokani. Il a fait un match énorme. Il a montré un niveau de jeu incroyable et un investissement personnel incroyable. On est ainsi tombé sur une équipe qui a aussi beaucoup de qualités. Il ne fallait pas leur permettre d’espérer.

Des joueurs comme   Litsingi et  Bissiki  n’ont pas convaincu, pourquoi n’aviez vous pas pensé à  renforcer l’équipe après l’avance de deux buts ?

CLR. Je pense que le doublant Litsingi-Marvin Baudry fonctionne parfaitement bien. En plus on a des joueurs qui ont de la qualité et qui n’ont pas de matches par exemple, Fabrice Ondama qui est un bon joueur et qui n’a pas joué depuis huit ou neuf mois en match officiel. Il n’est pas capable de faire un match plein. Nous l’avons repris petit à petit. Mais rien ne remplace le temps de jeu. Bien évidemment quand les joueurs manquent de temps de jeu, il leur est impossible de tenir sur une heure et demie. Avec Franci Listingi et Marvin Baudry, ça se passe parfaitement bien qu'avec Bouka Moutou et Dimitri  Bissiki.  En face de Bissiki il y avait Mabuati qui était un incroyable dribbleur. Et quand il est passé à gauche, il a posé les mêmes problèmes à Marvin. C’est le talent de chaque joueur qui fait la différence. Nous savons bien que nous avons une équipe qui a encore beaucoup de progrès à faire. On vient de très loin, et il y a encore beaucoup de travail à faire.

Comment entrevoyez-vous l’avenir de l’équipe nationale du Congo et aussi le vôtre ?

CLR : Mon avenir vous le savez. Je ne cours pas derrière les contrats. Jamais ! On va en discuter tranquillement avec Sébastien en priorité. Je pendrai les décisions que j’ai à prendre. Je n’ai pas de souci de ce côté-là. L’équipe nationale a un avenir de qualité mais il faut savoir se situer. On n’est pas une des meilleures équipes d’Afrique ; Il y a encore beaucoup de travail à faire. Il est question d'aider maintenant les moins des 20 ans pour la CAN au Sénégal. Ça va être un moment important aussi pour l’avenir du football congolais d’avoir des moins de 20 ans  qui sont des vrais jeunes. Le respect des âges c’est surtout le plus important. Il ne faut pas faire la compétition en rajeunissant  de 4, 5, 6 ou 7 ans certains joueurs cela ne sert à rien. Vaut mieux perdre dans une compétition avec l’âge réel parce qu'on en tire profit pour l'avenir. Il faut continuer à travailler et surtout s’organiser pour les matches amicaux  de 27  et 31 mars et des 3 et 7 juin. Ce sont des dates FIFA et ce sont des matches qu’il ne faut pas manquer. Ça permet de voir de nouveaux joueurs et de progresser. Mon avenir n’est plus important. Le plus important c’est l’avenir du football au Congo. Je sais que de toutes les façons, quoi qu’il arrive, je serai toujours dans le football sur un terrain avec une équipe nationale ou autre dans les prochains mois. Ce n’est pas très important. Mon cas personnel n’a aucune importante. Vous savez, les cimetières sont pleins des gens indispensables. Je ne suis sûrement pas le plus indispensable.

 

 

James Golden Eloué et Camille Delourme

Légendes et crédits photo : 

Claude Le Roy et le ministre des Sports et de l'éducation physique