Conférence générale de la jeunesse : près de 700 participants attendus à Brazzaville

Lundi 24 Février 2014 - 19:30

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La capitale congolaise abrite du 25 au 28 février, la troisième Conférence générale de la jeunesse congolaise. À quelques heures de l’ouverture des travaux, le ministre de la Jeunesse et de l’Éducation civique, Anatole Collinet Makosso, revient dans une interview exclusive, sur les enjeux et les attentes de cette rencontre

Les Dépêches de Brazzaville : La Conférence générale de la jeunesse qui s’ouvre demain a été précédée par une campagne de sensibilisation menée par vous-même en direction de plusieurs couches juvéniles. Dans quel but ?

Anatole Collinet Makosso : Il nous fallait porter l’information à l’attention de l’ensemble de la jeunesse sur le grand événement qui est en train de se préparer sous leurs yeux, de sorte qu’ils ne soient pas surpris de savoir que s’est tenue une conférence générale de la jeunesse et qu’ils ne nous disent pas ne pas avoir été associés. Nous avons donc ouvert les portes et les fenêtres, pour faire savoir aux jeunes qu’un grand moment pour eux était en train de se dérouler et qu’il leur fallait participer activement à cette grande réflexion.

LDB : Quels ont été les critères de participation à cette conférence en termes de profil et de représentativité géographique et les différentes catégories de la jeunesse visées ?

A.C.M. : Cette conférence, nous l’avons voulue inclusive. Elle ne devrait exclure aucune sensibilité de jeunesse y compris les jeunes de la diaspora. Près de 700 participants sont attendus, sans compter ceux qui vont participer de l’extérieur à travers les médias sociaux. Vous savez, la jeunesse est une et indivisible, mais elle est aussi plurielle. Dans cette diversité, il nous fallait nous assurer qu’aucune sensibilité de la jeunesse ne serait mise à l’écart. Nous sommes allés vers les jeunes chrétiens et croyants parce que nous pensons que la religion mobilise une partie importante de notre population.

Nous avons parlé aux jeunes des partis politiques parce que nous pensons qu’ils sont nombreux. Les partis politiques, actuellement, ont presque failli dans leur mission d’élévation des consciences de leurs citoyens, dans leur mission d’encadrement politique des jeunes, dans leur mission de formation à la conscience citoyenne aux valeurs républicaines. Nous disons qu’il faut que ces jeunes qui militent au sein des partis politiques où se font beaucoup de divisions d’ailleurs, du fait de la lutte âpre pour des suffrages, il faut qu’on les amène à la Conférence générale de la jeunesse pour que, eux aussi, apportent leur contribution dans l’élaboration des programmes politiques. Nous avons également appelé les jeunes élèves et étudiants parce que le président de la République a dit : « L’école est le berceau de la République. » Ce sont eux qui sont bénéficiaires en premier de toutes les politiques que nous mettons en place, il nous fallait les associer. Nous n’avons pas exclu les jeunes d’autres catégories, d’autres sensibilités qui travaillent dans les milieux associatifs, qui sont dans les réseaux d’encadrement de la jeunesse, que ce soit dans les domaines de l’environnement, de la protection de la jeune fille, de la protection de l’enfance, de la lutte contre l’insalubrité Ces jeunes qui sont organisés autour des réseaux associatifs méritaient aussi d’être impliqués.

LDB : Quels seront les moments forts ainsi que les attentes de cette conférence ?

A.C.M. : Nous avons inscrit cette conférence dans un cadre de gouvernance intergénérationnelle. Comme nous l’avons dit, il faut que les jeunes se sentent totalement impliqués dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques des pouvoirs publics pour que les jeunes ne continuent plus à penser qu’ils sont tenus à l’écart de la gestion de la chose publique. Alors parmi les temps forts, en dehors de leurs textes fondamentaux qu’ils auront à examiner, notamment les statuts, le règlement intérieur et bien d’autres documents, ils devront examiner la politique nationale de la jeunesse, c’est-à-dire la politique que le gouvernement met en œuvre au profit des jeunes. Ils vont l’examiner et l’approuver, pour qu’ils constatent que leurs préoccupations sont réellement prises en compte par les pouvoirs publics.

Ils auront aussi à examiner le rapport annuel 2013 sur l’état de la jeunesse. Le ministère de la Jeunesse s’était engagé à produire chaque année, un rapport annuel pour faire le point des actions publiques emmenées en faveur de la jeunesse et ce rapport leur sera soumis pour constater si ce qui sera dit est conforme à la réalité. Et s’il y a des failles dans l’action du gouvernement, qu’ils les relèvent et qu'effectivement, le gouvernement améliore son offre de service en faveur de la jeunesse. Nous aurons à conclure avec les jeunes un pacte que nous appelons code de bonne conduite : il s’agit d'un document important qui retrace ce que devrait être le jeune citoyen congolais, la façon dont il doit se comporter dans tous les milieux de la société, que ce soit à la maison, à l’école, à l’université, dans son lieu de travail, à l’église, à la mosquée, à l’étranger. Qu'attend-on d’un jeune ? Ce code de bonne conduite, qui reprend les cent engagements du jeune citoyen congolais, sera validé par la Conférence générale de la jeunesse et ce sera comme un contrat moral entre les jeunes eux-mêmes et entre les jeunes et la société. Ces documents seront examinés par eux. Puis, il y aura un autre moment, celui de la mise en place des nouvelles instances dirigeantes du Conseil national de la jeunesse.

Mais en dehors de cela, il y aura un dialogue intergénérationnel. Les jeunes vont débattre avec les membres du gouvernement qui viendront leur présenter la politique qu’ils mettent en œuvre, chacun dans son ministère en faveur de la jeunesse. Au travers de ce dialogue, les jeunes poseront des questions essentielles, celles qui sont importantes à leurs yeux, aux membres du gouvernement. Ce seront des questions sur les grands problèmes de société, ces problèmes qui les préoccupent. Ils auront des réponses des ministres et des acteurs clés de la société, plutôt que d’entretenir la subversion, le flou dans les médias sociaux, dans les rues, les bars, les bus. Les jeunes ont désormais un cadre au travers duquel ils pourront venir déverser toutes leurs rancœurs, tout ce qu’ils ont à reprocher aux pouvoirs publics. C’est à ce niveau qu’ils trouveront les réponses qu’ils attendent pour ne plus continuer à entretenir la confusion.

LDB : Comment envisagez-vous les relations entre les instances issues de cette conférence et les autres institutions existantes, mais également les structures de jeunesse des partis politiques ?  

A.C.M. : L'instance qui sera issue de la conférence est principalement le Conseil national de la jeunesse (CNJ). C’est un organe para institutionnel, une plateforme qui regroupe en son sein les différentes sensibilités de la jeunesse. Les différentes organisations de jeunesse vont se retrouver au sein du CNJ, c’est donc un corps unique. Il s’agit là de faire la distinction entre les jeunesses des partis politiques, des associations, des religions qui relèvent du privé du CNJ qui aura en son sein une jeunesse républicaine. Il y a donc une différence à faire entre la jeunesse que nous voulons républicaine, qui milite au sein d’un organe para institutionnel, paraétatique, parapublic et les jeunesses des partis, des associations qui militent au sein de ces organes sous l’angle du droit privé. Chacun des jeunes gardera son identité : politique, religieuse, universitaire, scolaire. Il est chercheur, il peut être tout ce qu’il veut, il est cadre associatif, mais quand il arrive au CNJ, il doit se sentir interpellé par les valeurs républicaines, par le devoir de constituer pour le gouvernement une véritable force de proposition, d’action, un relai dans la mise en œuvre par le gouvernement des pouvoirs publics.

LDB : Et avec les institutions internationales africaines et européennes ?

A.C.M. : Il s'agira de rapports de partenariat. Le CNJ n’existe pas qu’au Congo, il existe dans plusieurs pays parce que c’est une recommandation aussi des organisations internationales. C’est ce cadre de réflexion qui sert désormais de courroie de transmission entre les pouvoirs publics et les jeunesses. C'est pourquoi plusieurs États ont mis en place cette institution. Notre CNJ aura des relations privilégiées avec les autres CNJ, avec l’Union panafricaine de la jeunesse qui elle s’appuie justement sur les conseils nationaux de jeunesse. Il travaillera également avec les autres organisations de jeunesse à l’international.

LDB : Quelle est la vision du ministère vis-à-vis des nouvelles instances qui seront mises en place à l’issue de cette conférence ?

A.C.M. : Notre vision est de parvenir à former une jeunesse républicaine, une jeunesse totalement débarrassée des antivaleurs, une jeunesse qui sortira des passions partisanes et qui saura mettre l’intérêt général au-dessus de nos intérêts privés, une jeunesse qui ne prendra pas ses pulsions pour des vérités mais qui sera capable de transcender ses pulsions partisanes, politiques, pour ne chercher que l’essentiel, l’objectivité dans la gestion de la chose publique. Nous poursuivrons notre mission consistant à accompagner le CNJ. L’État met à sa disposition une certaine ressource. Il est clair effectivement que pendant les trois premières années, cette ressource n’était peut-être pas suffisante, mais le gouvernement continuera à aider le CNJ à gagner son autonomie financière pour lui permettre de mettre en œuvre la politique du gouvernement en faveur de la jeunesse. Ce qui est recherché, c’est que le CNJ soit l’organe d’exécution sur le terrain de la politique du ministère en faveur de la jeunesse.

LDB : Qui dit jeunesse dit formation et emploi. Comment entendez-vous aborder cette question ?

A.C.M. : C’est la préoccupation du gouvernement dans son ensemble. Ce n’est pas pour rien que le président de la République, dans son projet de société, a mis un accent particulier sur l’emploi et la formation. D’ailleurs, le Plan national de développement le définit : si nous sommes passés par la diversification de l’économie avec un accent particulier sur l’industrialisation, avec ce que nous sommes en train de développer dans le cadre des infrastructures, des zones économiques spéciales, c’est pour permettre justement une véritable diversification de l’économie, une industrialisation forte, ce qui suppose création d’emplois, et donc lutte contre le chômage. Plusieurs opportunités s’offriront aux jeunes à travers cette politique ambitieuse du chef de l’État. C’est pour cette raison que l’année dernière a été consacrée à l’enseignement de base et à la formation professionnelle, comme cette année également à l’enseignement de base et à la formation professionnelle, incluant même l’enseignement supérieur.

Au niveau du ministère, nous nous appuyons sur un programme d’appui à l’entrepreneuriat juvénile, c’est-à-dire qui tend à former les jeunes à l’entrepreneuriat. Il faut amener les jeunes à sortir du statut de demandeur d’emplois pour être eux-mêmes créateurs d’emplois. Et la création d’emplois se fait à travers la formation que nous leur donnons, dans le cadre de l’entrepreneuriat juvénile. Nous sommes certains que, au travers de ces programmes, nous réussirons à donner quelques solutions aux problèmes du chômage auxquels sont confrontés les jeunes.

LDB : Avez-vous un appel à lancer à l’endroit des jeunes ?

A.C.M. : Je demande à notre jeunesse de rester sereine et de suivre de près les travaux de la Conférence générale, même s’il arrive que certains jeunes ne puissent pas être dans la salle. Qu’ils fassent confiance aux délégués qu’ils ont choisis eux-mêmes, dans leurs milieux respectifs, pour que les participants puissent faire un travail important et pour que la gouvernance intergénérationnelle que nous promouvons soit une réalité. Tout ceci afin que désormais, les jeunes ne se sentent plus exclus des instances de prise de décisions, d’élaboration de programmes et de projets les concernant.

Parfait Wilfried Douniama

Légendes et crédits photo : 

photo 1 : Le ministre Anatole Collinet Makosso. photo 2 : Les jeunes pendant la campagne de sensibilisation. crédit photo Adiac