Congo : le Premier ministre Clément Mouamba appelle l’opposition à un dialogue « sans tabous »

Samedi 10 Septembre 2016 - 12:30

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Pour son premier déplacement en France, dans le cadre d’une visite de convenance, le Premier ministre Clément Mouamba s’est entretenu avec le quotidien Les Dépêches de Brazzaville, à l’ambassade du Congo à Paris. L’entretien a porté sur l’état du Congo, le dialogue avec l’opposition et les réformes en cours.

Les Dépêches de Brazzaville (LDB) : Monsieur le Premier ministre, vous avez mis à profit votre visite de convenance à Paris pour rencontrer les autorités françaises et les acteurs du secteur privé. Pourquoi ?

Clément Mouamba(CM) : Répondant à mes souhaits, le ministre français de l’Economie et des Finances, Michel Sapin m’a reçu le 6 septembre en votre présence. Ce fut un accueil convivial et très intéressant avec notre premier partenaire économique, la France. Il s’agissait de présenter le Congo, son nouveau visage depuis le changement de la Constitution et l'élection présidentielle. Nous avions un sentiment d’attentisme. Aujourd’hui les échanges ont repris. Tant mieux pour nous tous.  Le dialogue est une ouverture cardinale et nous en connaissons les vertus.

LDB : Le dialogue avec qui et pour quel intérêt ?

CM : Le dialogue inter congolais sans tabous, avec l’opposition et avec les pays amis. J’ai rencontré l’ambassadrice des Etats-Unis, ainsi que le nouvel ambassadeur de France. J’ai aussi rencontré certains membres de l’opposition, car  j’estime qu’il faut privilégier le vivre-ensemble. À Paris, il s’agit de saluer les amis, et leur rappeler que nous sommes un pays qui a des institutions établies et une Constitution qui se doivent d’être respectées par tous.

LDB : Monsieur le Premier ministre, où en sont les discussions avec l’opposition congolaise ?

CM : Le ministre de l’Intérieur a reçu tous les partis dans le cadre du dialogue social, avant la mise en place des lois cadres. Certains partis de l’opposition ont regretté n’avoir pas été à Sibiti. D’autres par contre refusent de s’y associer, exigeant la présence de la communauté internationale, allant travailler et chercher des ressorts depuis l’étranger. Moi, je plaide en faveur d’un réalisme politique.

Nous avons besoin de nous organiser avec fiabilité pour aller aux législatives. La biométrie est là pour nous rassurer. Je demande aux opposants radicaux de mettre un peu d’eau dans leur vin.

LDB : Monsieur le Premier ministre, qu’attendez-vous de l’opposition après ce message fraternel ?

CM : Je dis aux Congolais, qu’il y a de la place pour tout le monde et nous sommes prêts à discuter. J’attends de la bonne volonté. Vous savez : s’il n’y a plus de pays, il y aura plus d’opposition. Au Congo, tout le monde veut être président. Alors la loi met tout le monde à l’aise. C’est à l’opposition de convaincre le peuple. Aujourd’hui, nous donnons au peuple des outils plausibles, sans contestation que sont le bulletin unique et la biométrie. On ne peut pas continuer à bloquer le pays. J’invite tout le monde à rester dans la régularité. La ligne rouge est tracée dans le cadre des institutions et de la Constitution.

LDB : Présentement, quelle est la situation économique du Congo ?

CM : Il ne faut pas se mentir, la chute du prix du baril du  pétrole rend la situation économique difficile pour tout le monde mais cela n’est pas insurmontable. Le Congo compte faire beaucoup d’efforts. Pour cela, des engagements ont été pris pour que le minimum national soit assuré, notamment le salaire des fonctionnaires. Concernant nos partenaires économiques, nous accusons quelques retards de paiement de dettes qui vont être méthodiquement rattrapés, grâce à la maîtrise de la recette et de la dépense, et à la mise en place d’un schéma idoine qui permet une visibilité.

LDB : C’est dommage d’en arriver là avec un partenaire privilégié qu’est la France

CM : Nous comptons liquider nos arriérés avec nos partenaires français sous peu, en quelques mois. Nous avons d’ailleurs commencé à payer. Je prévois de rencontrer  les représentants de l’Agence française de développement (AFD) dans les prochains jours. Dans le cadre de sa coopération avec la France, le Congo bénéficie d’un Contrat de désendettement et développement (C2D) en soutien à des projets infrastructurels, forestiers et les prêts sociaux. Nous tenons à notre partenariat et le Congo est un pays fiable. Nous avons d’autres projets avec la France.

LDB : Pourquoi cette assurance ?

CM : Je vous rappelle que nous avons toujours la confiance des institutions de Bretton Woods et des entreprises sérieuses. Nous venons de lancer un signal fort, celui de commencer à payer la dette et  de réduire le budget 2017. Je pense que c’est un signal fort qui était attendu par tous nos partenaires.

LDB : Quel est l’avenir du pétrole dans l’économie congolaise ?

CM : Le pétrole pourrait ne pas honorer longtemps le budget du Congo. Il est donc essentiel de diversifier l’économie du pays. Plusieurs secteurs et niches peuvent combler le déficit et booster notre économie.

LDB : Quels sont les secteurs qui pourraient combler le trou laissé par la manne pétrolière ?

CM : Il y a l’agriculture. C’est un secteur qui peut, en deux ou trois ans nourrir tous les Congolais et aller vers l’exportation. Il y a les secteurs touristique, des services, forestier, énergétique, l’approche interne (la semi- ou la transformation surplace des produits à l’exportation), l’habitat social et de l’assainissement peuvent créer beaucoup d’emplois et relancer le secteur du bâtiment : 10 000 logements/an, le secteur minier.

LDB : Sans doute d’autres secteurs aussi

CM : Certainement, comme celui de la gouvernance, où il existe des poches de recettes, ou celui des douanes. Je constate  aussi que l’Etat a accordé beaucoup d’exonérations. Pour tenir à notre crédibilité, il est impératif de réformer ou de réviser la nature de ces exonérations.

LDB : Monsieur le Premier ministre, il y a un secteur engouffré qui a besoin du concret, celui des  Zones économiques spéciales (ZES).

CM : Grâce aux ZES,  qui sont des zones franches, le Congo pourra  produire beaucoup de choses localement, donc créer beaucoup d’emplois, acquérir beaucoup de connaissances, de transfert de technologie, de technicité, de formation pour les jeunes et exporter.  L’idée à retenir étant que les ZES ne peuvent pas être installées rien que pour le Congo, mais doivent avoir un avantage comparatif vis-à-vis de ce qui se fait dans les autres pays voisins. Je vais regarder de très près ce qu’il y a lieu de faire.

 

 

 

Noël Ndong

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