Disparition : Tabu Ley n'est plus !

Samedi 30 Novembre 2013 - 15:15

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Malade depuis un peu plus de deux ans, le fondateur de l'orchestre Afrisa International (73 ans) a rendu l’âme le samedi 30 novembre à Bruxelles alors qu’il était entré en coma depuis plusieurs jours.

La nouvelle est tombée tel un couperet dans les cœurs de nombreux mélomanes ce samedi 30 novembre. Le seigneur Ley n’est plus. Si certains avaient mis du temps pour s’en convaincre, d’autres par contre, l’avaient vite entériné eu égard à l’état de santé déjà précaire de l’artiste. Soudainement, l’image de cet icône national physiquement affaibli, n’usant presque plus de ses facultés et tenant à peine sur une chaise roulante lors de sa décoration par la Chancellerie des ordres nationaux en novembre 2012, a traversé bien des esprits. On savait ses jours comptés. D’après des sources, l’artiste-musicien qui, dans l’entre-temps, avait rejoint Bruxelles afin de poursuivre ses soins médicaux, se trouvait depuis plusieurs jours dans un profond coma. Il n’a hélas pu se remettre de son diabète et de l’accident cardiovasculaire (AVC) qui, il y a plus de deux ans, l’avaient littéralement terrassé au point de le maintenir alité pendant de longs mois.  

Tout a commencé au lendemain de son plébiscite comme meilleur artiste Caraïbe-Afrique par le festival mondial de la musique organisé à Varadero à Cuba en 2008. En plus du trophée qu’il avait ramené de Cuba, Tabu Ley avait également reçu une invitation personnelle du prince de Qatar à se produire au festival international des Émirats arabes unis. De retour à Kinshasa où il reçut un accueil digne de ce nom, l’artiste n’eut pas le temps de savourer ce plébiscite, car frappé de plein fouet par un AVC qui a failli lui être mortel n’eut été sa prise en charge rapide dans une formation médicale de la place. Son état de santé a commencé dès lors à se dégrader jusqu’à son évacuation à la clinique St Michel de Bruxelles où il fut admis aux urgences.

Il en sortira quelques mois après sur une chaise roulante gardant encore toute sa lucidité, augurant ainsi un espoir de guérison complète. À Créteil dans la région parisienne, il était astreint aux séances de Kinésithérapie. Son évolution augurait des perspectives de rétablissement. Plus d’une fois donné pour mort, il avait réussi à déjouer de nombreuses prédictions et bravé l’adversité  avant de succomber. La persistance de la maladie, qui l’avait sérieusement rongé de l’intérieur, ne lui avait pas donné une chance jusqu’à ce jour fatidique du 30 novembre 2013. Cette fois-ci, la mort a été imparable.  

Une étoile s’est éteinte

Pascal Emmanuel Sinamoyi Tabu dit « Rochereau » est un artiste qu’on ne présente plus.  Fonctionnaire de l'Éducation nationale du Congo, il bascula dans la chanson en 1959 en intégrant l’African jazz. Il annonce les couleurs avec « Keliya », « Adios Tété », « Bonbon sucré » et d’autres tubes en se révélant comme un grand auteur compositeur. En 1963, il se sépare avec son mentor Kabasele Tshiamala dit Grand Kallé pour rejoindre les dissidents de l’African jazz au premier rang desquels se trouvait Kassanda wa Mikalayi dit « Docteur Nico ». Ensemble, ils créent Africa Fiesta. Il quitta ce groupe en 1966 pour monter Africa Fiesta national où son duo de choc avec Sam Mangwana reste parmi les plus énigmatiques de la musique congolaise moderne.

Sous le label Afrisa international qu’il créa par la suite pour contourner la controverse qu’avait suscitée la paternité du nom « African fiesta » qu’on lui contestait, Tabu Ley boosta sa carrière avec des hauts faits artistiques. Le passage à l’Olympia de Paris en 1970 reste incontestablement un des traits dominants de sa riche carrière musicale. Avec plus de 2000 chansons à succès, Tabu Ley a tout aussi permis de formater de grandes vedettes comme Paul Ndombé Opétum, Sam Mangwana et, dans la gent féminine, des stars telles que Miss Bora, Yondo sisters, Mbilia Bel, Faya Tess, Béyou Ciel, etc. Quatre de ses fils, Pegguy Tabu, Abel Tabu, Philémon et Youssoupha, ont percé dans le milieu de la musique en tant que chanteur, compositeur. Le chanteur prévoyait un autre album avec son fils Aymeric Niamenay-Madembo.

Reconverti politicien, Tabu Ley a exercé les fonctions de vice-gouverneur de la ville de Kinshasa sous l’étiquette du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) et de ministre provincial de la Culture, sports, jeunesse et tourisme. Adieu seigneur Ley.

 

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Le seigneur Tabu Ley dit Rochereau