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Du coq-à-l’âne

Jeudi 24 Mai 2018 - 21:28

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Coq-à-l’âne. Cette expression signifie : passage sans liaison d’un sujet à l’autre. C’est ce que je vais faire dans ce « Brin d’Histoire ».
Les 2 et 3 avril 1930, à la suite de la condamnation de Matsoua et de ses coaccusés, Brazzaville est en proie à une forte agitation. Dans un numéro de Vision pour Demain,  Bouetoum Kiyindou écrit : « André Matsoua est appréhendé à Paris et amené à Brazzaville où il est jugé le 2 avril 1930, avec ses coaccusés, dans les locaux de la mairie. Les peines prononcées s’échelonnent entre trois mois de prison avec trois ans d’interdiction de séjour, pour les membres plus ou moins influents de l’association, et cinq ans d’enfermement  avec dix ans d’interdiction de séjour pour les responsables tels qu’André Matsoua, Constant Balou, Pierre Nganga, Ténard Kiélé et  Jacques Mayassi. Ce sont les terribles prisons du Tchad et l’Oubangui-Chari qui hébergent ces « martyrs de la liberté »,  de vrais  durs à cuire et des hommes, convaincus, malgré ces lourdes condamnations, de la justesse de leur contestation. Face à l’accusation, ils ont opposé une défense intelligente et pugnace.

Les jours derniers, Brazzaville et le Congo ont vibré au rythme de deux procès impliquant deux officiers généraux de notre armée, accusés pour détention d’armes de guerre et atteinte à la sûreté de l’Etat. Ce procès nous rappelle un autre qui a eu lieu ici en 1965, quasiment avec les mêmes chefs d’accusation. Nous avions eu droit à des passes d’armes dantesques lors de ce procès.

Le 17 juin 1965, quatorze accusés comparaissent dans le cadre du procès des trafiquants d’armes, au tribunal populaire présidé par Stanislas Batchy, un tribun.  Auguste Roch Nganzadi, procureur de la République, impressionnant juriste, qui en imposait par son charisme, assiste aux séances, en qualité de commissaire du gouvernement. Ganga Gaston, Malonga Patrice, Liemey Loubassa joseph, Massengo Joseph, Milongo Désiré, Mingui Philippe, sont accusés d’avoir introduit frauduleusement des armes de guerre et de munitions et d’avoir, par ce fait, porté atteinte à la sûreté de l’Etat. Mampouya Athanase, Matouvouidi, Nsana Christophe, Makoundou Mbongo Mpabi, Tchoulou François, Malonga Jean, Malonga Pascal sont, eux, accusés pour complicité d’introduction frauduleuse, trafic, détention d’armes de guerre et de munitions et atteinte à la sûreté de l’Etat. Ces prévenus n’étaient pas tous des intellectuels mais ils ont fait preuve, tout au long du procès, d’une attitude digne, face à une Cour usant d’une artillerie lourde logomachique.

Le 22 avril 1973, dans le même registre, se tient le procès dénommé : affaire Diawara. La Semaine africaine écrivait à ce sujet : « A Brazzaville, s’est ouvert, lundi 16 avril, un important procès. Ceux qui ont assisté ou aidé l’ancien lieutenant Ange Diawara et ses amis ayant pris le maquis après ce putsch manqué du 22 février 1972 comparaissent devant la Cour révolutionnaire de Justice. En raison de la qualité des accusés, la composition de la Cour a été modifiée par ordonnance présidentielle, rendue publique samedi 14 avril 1973. Les postes de président de la Cour et de commissaire du gouvernement sont occupés par des personnalités de premier plan : Henri Lopes, ancien ministre de l’Education nationale et des Affaires étrangères, actuellement membre du bureau politique du PCT, chargé de l’Education, et Pierre Nzé, membre du bureau politique du PCT, chargé de la Propagande. Les autres membres détiennent presque tous des responsabilités dans les organisations du parti au pouvoir.
Les inculpés sont un peu plus d’une quarantaine. Et parmi eux, un ancien chef de gouvernement et membre du comité central du PCT, Pascal Lissouba, un ancien ministre de l’Information, Sylvain Bemba, quatre Français, deux femmes  Paule Rioux et Paule Devilles, et deux hommes, le Dr Boissay et Bernard Quereux ; ainsi que des lycéens, soldats et paysans ».

Les débats ont eu lieu du 16 au 22 avril 1973. La fin du procès coïncide avec la mort d’Ange Diawara dans son maquis. Son corps et celui de ses complices sont exposés au Stade de la Révolution (actuel Massamba-Débat), après une macabre procession à travers la ville. C’est le sort que connut Kiganga, trois ans plus tôt. Son corps fut exhibé au public après sa mort au cours des accrochages entre les forces régulières de l’armée et le commando qu’il conduisait dans sa prise de la Voix de la Révolution congolaise (actuel ministère de l’Enseignement). C’est dans la cour de la radio qu’il fut  abattu. « Kiganga » devint, par la suite, le nom du modèle du slip qu’il portait au moment de sa mort. Les Congolais sont cyniques jusque dans la mort. Les vrais héros ne sont pas toujours ceux que l’on croit.

                                                    

Mfumu

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Édition Quotidienne (DB)

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