Élections de décembre : le vote de la diaspora hypothéqué

Jeudi 7 Juin 2018 - 18:51

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L’enrôlement à l’extérieur des Congolais pour participer aux scrutins de décembre relève, au stade actuel, du domaine de l’impossible et les députés nationaux s’attellent à voir comment extirper de la loi électorale la disposition qui consacre leur participation à ces consulatations.      

Plus le temps s’égrène, plus le vote des Congolais de l’étranger devient quasi impossible. L’espoir de voir des compatriotes de la diaspora émettre leurs suffrages, le 23 décembre, en participant aux urnes ne fait que s’éloigner. Plusieurs contraintes se sont, en effet, érigées sur cette voie au point de rendre cette perspective insurmontable à l'heure qu’il est. Déjà, le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) avait, en son temps, tiré la sonnette d’alarme en prévenant une telle éventualité au regard des éléments en sa disposition. Corneille Naanga, l'on s’en souvient, avait relevé la difficulté technique et logistique qu’éprouvait son institution d’enrôler les Congolais de l'étranger qui se comptent par milliers, éparpillés à travers le monde.

Dans certains pays comme les États-Unis d’Amérique, il avait épinglé la difficulté logistique liée au fait que la grande communauté congolaise est établie à Dallas et à Atlanta. Ce qui requiert, pour plus d’efficacité dans l’action, la création d’un seul site - il avait proposé Washington - pour mieux canaliser le processus d’enrôlement. L’autre paramètre qui pose problème, avait-il ajouté, tient au fait que la plupart des Congolais résidant à  l'étranger ont diverses nationalités alors que la Céni est habilitée à n’enrôler que les Congolais ne possédant qu’une seule nationalité comme l’exige la loi.

À cela s’ajoute l’hostilité contre le pouvoir de Kinshasa développée par ces compatriotes qui, pour un rien, sont capables de malmener les agents de la Céni commis à cette tâche. La brutalité devenue récurrente des Congolais de la diaspora vis-à-vis des représentants des institutions actuelles fait redouter des dérapages que la Céni voudrait escamoter en annulant purement et simplement le vote des Congolais de l’étranger.

"Ceux qui veulent voter appelés à revenir au pays"

De la nécessité d’éviter le traitement discriminatoire entre les différentes communautés congolaises établies à l’étranger à la problématique du respect des délais de contentieux des listes en passant par la pression du temps, le caractère contraignant du calendrier publié en novembre dernier par la Céni, etc., tout concourt à dire que le vote de la diaspora congolaise relève d’une vue de l’esprit. Sur ce, l’Assemblée nationale est déjà mise au pas pour soutenir l’option de son annulation pure et simple. Le ministre délégué aux Affaires étrangères chargé des Congolais de l'étranger en fait même sa préoccupation. Il a confirmé, le 5 juin au cours d’une plénière à la chambre basse du parlement, qu'un projet de loi prévoyant un moratoire pour le vote des Congolais de la diaspora va être prochainement déposé devant la représentation nationale pour adoption.

D’après lui, les Congolais de l'étranger ne pourront pas voter malgré deux reports de l'élection eu égard aux contraintes d’ordre financier et logistique. « (…) Ils sont dehors et il n’y aura pas de bureau de vote à l’extérieur. Tous ceux qui veulent voter peuvent venir au pays, prendre des cartes et revenir pour voter à l’intérieur du pays (…). Il est impossible, d'ici le mois de décembre, date du scrutin, d'organiser le scrutin dans les cent quatre-vingts pays qui accueillent la diaspora congolaise », s’est-il expliqué.

En fait, il n’a pas tort. Puisqu’il faille, pour le besoin du crédit des scrutins, enrôler sur l’ensemble des pays dans le monde où se trouvent les Congolais, il sera quasiment impossible de terminer leur enrôlement avant décembre. Cela implique notamment pour la Céni, au terme de la loi sur l’identification des électeurs, de sillonner près de cent quatre-vingts pays. « Donc il faut du temps, il faut une préparation, il faut une logistique et donc derrière tout ça, les moyens financiers », a noté un expert. Et dire qu’à ce jour, la Céni n’a jamais effectué un moindre pas dans le sens de se préparer à relever ce défi majeur.   

Une question qui fait jaser

Ce qui fait dire à certains que la volonté n’y est pas dans le chef de la Céni et du gouvernement d’impliquer la diaspora congolaise dans le processus électoral. Cherchant à trouver des voies d’issue pour résoudre cette problématique du vote de la diaspora, le député Henri Thomas Lokondo a fait état d’une proposition de loi portant modification de la loi électorale qui serait en cours d’enrichissement au niveau du gouvernement en vue d’extirper la disposition autorisant l’enrôlement des Congolais vivant à l’extérieur du pays. Une approche que certains députés ont rejetée l’estimant anticonstitutionnelle. Toute la problématique telle que synthétisée par le speaker le la chambre basse consiste à se demander si les élections pourront quand même être organisées dans l’hypothèse où la Céni renonçait officiellement au vote des Congolais de l’étranger et quelle pourrait être la voie technique idoine à suivre pour que cela ne porte pas ombrage au processus électoral. D’où, la convocation décidée séance tenante du président de la Céni pour venir éclairer la lanterne des députés sur cette question qui fait naturellement jaser dans l’opinion.       

 

Alain Diasso

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