Enjeux politiques : retour en pompe de Jean-Pierre Bemba à Kinshasa

Mercredi 1 Août 2018 - 19:00

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Le leader du Mouvement de libération du Congo (MLC) est arrivé dans la capitale congolaise, ce 1er août, en provenance de la Belgique et entend faire acte de candidature à la présidentielle de décembre prochain.   

Arborant une cravate rouge et un costume bleu de nuit assorti d’une chemise blanche, le sénateur Jean-Pierre Bemba a bel et bien foulé le sol de ses ancêtres par l’aéroport international de N'Djili. C’est aux alentours de 9h30 que l’avion qui le transportait s’est finalement immobilisé sur le tarmac. Le "chairman" qu’accompagnait son épouse ainsi qu’une forte délégation a eu droit au rite protocolaire avant de prendre place au salon d’honneur où une meute de journalistes l’attendait, sans parler de quelques cadres du parti triés sur le volet au premier rang desquels se trouvait la dynamique secrétaire générale du MLC, Eve Bazaïba. Dans les périmètres de l'aéroport, l’effervescence était presque à son comble. Nonobstant l’important dispositif sécuritaire mis en place, les éléments de la police ont eu du mal à contenir la marrée humaine qui s’est déplacée à l'aéroport international de N'Djili. «Je suis content d'être de retour dans mon pays », s’est juste contenté de dire Jean Pierre Bemba, sans ajouter plus aux journalistes qui cherchaient à lui tirer les vers du nez.            

Avant que les autorités de la police ne lui donnent le sauf-conduit l’autorisant à quitter le site aéroportuaire et prendre place à bord de sa jeep décapotable, il fallait régler certains détails liés à la conduite du cortège. Après discussions, il a été décidé que la voiture qui allait le transporter ne puisse pas rouler à moins de 40 km/heure. Ce n’est qu’autour de 11 h que le cortège de Jean-Pierre Bemba, encadré par la police, est sorti du site aéroportuaire sous les vivats de nombreux partisans quasi hystériques. Banderoles aux couleurs du MLC, rameaux, vuvuzelas, slogans et chants à la gloire du sénateur, tout y était pour rendre l’atmosphère électrique sous les yeux inquisiteurs des policiers antiémeute déployés sur les lieux. Ces derniers ont laissé faire, se contentant d’encadrer les manifestants afin d'éviter tout débordement. Sur ces entrefaites, des slogans hostiles au pouvoir étaient balancés sous le regard passif des agents de l’ordre. Les drapeaux d’autres partis partenaires de l’opposition étaient visibles.

Des gaz lacrymogènes pour dégager la voie

Difficile pour le cortège de s’ébranler paisiblement sur le boulevard Lumumba tant la route était quasi obstruée par une foule compacte. Chacun cherchait à avoir la meilleure vue, ou encore à toucher la jeep du sénateur à peine visible derrière les vitres. Et lorsqu’il s'est mis débout, la tête émargeant du décapotable et la main droite soulevée pour saluer la foule agglutinée autour de sa jeep, le délire était total. La communion entre l’acteur politique et sa base venait de trouver là son point d’intersection. La foule a dicté au cortège son tempo, loin en deçà des 40 km/h imposés. « La police veut qu’on accélère la vitesse du cortège mais la population est en train de refuser », a indiqué un membre du cortège joint en direct par CCTV, une chaîne pro MLC, la seule à avoir fait un reportage complet sur l’événement. Excédés et presque débordés, certains éléments de la police ont dû user des gaz lacrymogènes pour tenter de dégager la voie complètement bloquée par les partisans de Jean-Pierre Bemba à hauteur du quartier Debonhomme. Plus de peur que de mal. Aucune victime n’a été signalée, à part quelques blessés légers, apprend-on. Il est cependant fait état d’un blessé grave à Kimbaseke et de deux autres à Kingasani.

A partir du pont Matete, racontent des témoins, le cortège a été contraint d’accélérer jusqu’à 70 km/h, sans doute sur injonction de la police, au grand dam de certains militants obligés de rebrousser chemin sans avoir vu leur leader. « Nous devions protéger le sénateur. C’est une célébrité, c’est un ancien vice-président de la République, la police a fait donc son travail», a déclaré le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, intervenant sur un média périphérique. Le cortège du sénateur devrait échoir à la résidence familiale située dans la commune de la Gombe. Ce que n’ont pas du tout approuvé les autorités policières au motif qu'elle se trouvait à quelques encablures du périmètre présidentiel. Au-delà de la symbolique, c’est presque un plébiscite pour Jean-Pierre Bemba qui vient de confirmer son enracinement dans le tissu sociétal kinois, quitte à traduire cet élan de cœur dans l’urne.         

Alain Diasso

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