Feuilleton : Samba De Dieu (2)

Vendredi 26 Janvier 2018 - 18:21

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 Laissez que je vous éclaire. Samba DD n’a été ni un tribun, ni une personne hantée par quelque quête, mais un simple cordonnier. Sur ça, au moins, tous les témoins concordent. Sur ça aussi les échotiers et leurs journaux sont à peu près unanimes, il faut bien le reconnaître. Mais pas un seul moment, il n’a été relevé que le pauvre Samba DD s’est vu entraîner dans une affaire où il n’avait pas été, alors-là pas même une seconde ! l’auteur d’un début de commencement de quoi que ce soit. Pas du tout ! Je peux le jurer : croix de bois, croix de fer, si je mens… Bon, ne tentons pas le diable. Il vous suffit de savoir que je ne mens jamais ; que j’ai connu Samba DD ; que ce que je vous raconte, pas un seul être normal ne pourrait l’infirmer et même que j’étais bien situé ou bien informé dans la plupart des péripéties que je vais vous conter et qui constituent la trame de cette affaire malheureuse. Tout cela fait de moi un témoin incontournable et de première main. Témoin dans l’objectivité de laquelle, qu’il pleuve, qu’il vente, je prie de reposer vos consciences, chers amis.

 Combien de cordonniers seulement dans le monde d’aujourd’hui naissent, ressemèlent et meurent sans que leur trace ne soit jamais gardée dans les annales et dans l’histoire ? Sans que leur action de juste soit écrite ailleurs que dans deux ou trois faire-part confiés à la sauvette à quelque journal douteux « paraissant régulièrement à l’improviste », comme le proclamait le bien vénéré Mam Less Dia à Dakar ? Samba DD était bien saint, puisque je vous le dis, c’est-à-dire qu’il était normal. Une enclume, un marteau, du cuir et la caresse finale sur une paire de souliers antédiluviens : c’est tout ce qu’il cherchait et faisait à longueur de journée. Pas à prendre part aux joutes hautement philosophiques de l’émission "Pacifica" où il n’aurait rien su à dire. Ni pour, ni contre mais bien au contraire !

C’est pourquoi je vais parler et vous expliquer les choses. Et d’abord le nom.

 Comprenez donc, lecteurs : ma mission est pressante. Il s’agit de réhabiliter une mémoire et de corriger l’histoire. La vie est tellement brève, et celle de Samba DD a été d’une telle impeccabilité que l’alourdir de soupçons et de ragots est tout simplement criminel.

Oui, je l’affirme : sur cette terre du Bon-Dieu, il n’y a pas eu homme plus neutre en tout que notre Samba DD national. C’est pourquoi nous voudrions, en ce 1er novembre, corriger l’épitaphe sur sa tombe et la formuler ainsi : Ci-gît un homme. C’est tout.

 C’est la guerre dans la ville qui a rapproché quatre êtres aussi disparates que Samba DD, Antoine Mambala, Lucien Mpama et le père André-Marie. En des temps moins troubles, leurs chemins se seraient certainement croisés, mais pas superposés et confondus.

 

                                                                                                                                                                                                                               (à suivre)

 

 

Par Lucien Mpama

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