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Il suffirait d’une étincelle …

Dimanche 13 Octobre 2019 - 12:53

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Oui tous les jours, les semaines, les mois qui passent confirment le fait terrifiant qu’il suffirait d’une étincelle pour que l’immense région du Levant – entendons par là le Proche et le Moyen-Orient, de la Mer Méditerranée jusqu’à la Péninsule indienne – s’embrase, plongeant dans le chaos l’une des zones les plus stratégiques de la Terre sur laquelle nous vivons. Stratégique parce qu’elle recèle les plus vastes gisements de pétrole et de gaz de la planète, stratégique parce qu’elle est plus que jamais un point de passage obligé entre l’Europe et l’Asie, stratégique parce qu’elle a joué pendant plusieurs millénaires et joue toujours un rôle essentiel dans l’évolution de l’humanité, stratégique parce qu’elle oppose des forces incontrôlables et surtout parce qu’elle se déroule dans le contexte d’une course aux armes de destruction massive qui ne dit pas son nom mais qui constitue le véritable enjeu de la guerre à venir.

Au conflit larvé qui oppose l’Iran aux Etats-Unis, à Israël, à l’Arabie saoudite et aux Emirats arabes unis vient, en effet, de se surajouter la guerre désormais ouverte qui dresse la Turquie contre la communauté kurde et qui pourrait avoir comme conséquence de rendre à l’« Etat islamique », créé par Daech, la place qu’il avait perdue ces derniers mois en Syrie et en Irak. Il n’y a là rien de bien nouveau, dira-t-on, puisque depuis la chute de Saddam Hussein, il y a seize ans, les tensions n’ont cessé de croître dans cette partie du monde. Peut-être, mais les conflits qui s’y multiplient et l’incapacité des grandes puissances à agir pour y mettre un terme laissent craindre aujourd’hui un embrasement général dont personne ne peut prédire l’issue.

Bien au-delà de la guerre ouverte sur laquelle peut déboucher à tout instant la dérive générale qui se dessine, l’événement auquel nous assistons n’est pas autre chose que le basculement d’une région entière de la planète. Un basculement marqué par la guerre sournoise que se livrent les deux grands courants de l’Islam, à savoir les Sunnites que dominent les Saoudiens et les Chiites que gouvernent les Iraniens ; marqué aussi, dans la partie orientale de cette zone géographique, par la compétition à laquelle se livrent les Pakistanais et les Hindous à propos du Cachemire : marqué encore par le retrait plus ou moins programmé des Etats-Unis de l’Afghanistan qui provoquera à plus ou moins court terme la victoire des Talibans ; marqué toujours par le conflit de plus en plus clair qui oppose l’Iran en quête non encore avouée de puissance nucléaire et Israël bien décidé à l’en empêcher pour assurer sa survie ; marqué plus que jamais, bien que cela ne se voit pas encore clairement, par le retour en scène de la Russie dans la partie occidentale du levant et de la Chine dans sa partie orientale ; marqué enfin par l’effacement des puissances occidentales, parmi lesquelles figurent en bonne place les Etats-Unis, la France et l’Angleterre.

Si le pire n’est jamais certain dans la sphère humaine, l’Histoire des derniers siècles montre qu’il vaut mieux tenter de s’en protéger que de fermer les yeux. L’Europe, la grande Europe, l’a démontré par deux fois au cours du siècle dernier alors même qu’elle s’affirmait comme le cercle le plus évolué, le plus conscient de la planète. Et l’accumulation des risques de crise au Levant pourrait avoir des conséquences bien pires pour l’ensemble de l’humanité.

Attention donc ! L’Afrique, qui sera directement impactée par un semblable conflit s’il vient à se produire comme cela paraît de plus en plus probable, ne devrait-elle pas faire entendre collectivement la voix de la raison tant qu’il en est temps ?

 

 

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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