Immigration : l’Europe sort canons, drones et sous-marins

Mardi 23 Juin 2015 - 17:21

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L’Union européenne a décidé lundi le déploiement d’une opération navale en Méditerranée. Objectifs : frapper les passeurs. Et freiner les migrations.

Les vingt-huit pays de l’Union européenne tournaient autour de la manière radicale de freiner les vagues de migrants provenant surtout des côtes libyennes. Lundi, ils sont passés à l’action. Réunis à Luxembourg, les ministres des Affaires étrangères ont décidé de déployer les gros moyens pour endiguer les flux, dont surtout l’Italie et la Grèce supportaient seules le plus gros poids dans un problème pourtant européen. Ces derniers jours, les images des migrants rejetés de partout et bloqués à Vintimille pour les empêcher d’entrer en France donnaient le spectacle désolant d’une Europe se barricadant. Une Europe « égoïste » condamnée par le pape au Vatican. « Je vous le dis clairement, les cibles ne sont pas les migrants, mais ceux qui gagnent de l'argent sur leurs vies et, trop souvent, sur leurs morts », a -t-il déclaré. La commissaire européenne des Affaires étrangères, l’Italienne Federica Mogherini, a tenu à y mettre les formes. « Cette première phase de l'opération commencera à être mise en œuvre dans les jours à venir, avec un recueil d'informations et des patrouilles en haute mer pour aider à la détection de réseaux de passeurs », a-t-elle dit.

Il n’empêche que les organisations humanitaires et une partie de la conscience morale européenne ne cachent pas leur malaise devant une opération censée frapper les bateaux, pas les occupants; les commanditaires, pas leurs victimes. Illustration de la complexité du processus en marche, dimanche un navire a été la cible de tirs en haute mer. Un survivant ghanéen accuse la marine libyenne qui aurait tiré sur eux après leur avoir demandé de l’argent. Celle-ci dément. Seules certitudes : un mort par balle (qu’on continue de rechercher) et ce blessé ghanéen sauvé de la mort.

Baptisée EU Navfor Med et forte d'un millier d'hommes, l'opération navale européenne en Méditerranée est dirigée par l'amiral italien Enrico Credendino ; elle est basée à Rome. Son navire de commandement sera le porte-avions italien Le Cavour. Doté d'un hôpital, ce navire s’est illustré il y a deux ans dans un tour des ports d’Afrique, où il a soigné gratuitement, opérant et offrant des examens médicaux poussés dans un concept typiquement italien de déplacer l’hôpital vers les malades, pas l’inverse. L'opération s’annonce impressionnante. Elle est sans doute à la hauteur de l’enjeu.

Navfor Med, ce sont en effet cinq navires de guerre, deux sous-marins, trois avions patrouilleurs maritimes, deux drones et trois hélicoptères, rien que ça ! C’est en tout cas ainsi que l’Europe entend répondre à la succession des morts en Méditerranée. Le 19 avril dernier, un chalutier avait coulé près des côtes italiennes : 700 de ses 900 occupants gisent toujours par le fond, prisonniers dans les cales de leur embarcation sans qu’on sache avec certitude de quels pays ils provenaient !

Mme Federica Mogherini a estimé qu’« il fallait une réponse européenne », à de tels drames dont on ne veut plus la répétition. Mais il fallait aussi, et sans doute surtout, prendre la mesure de la menace de l’organisation terroriste État islamique qui a promis de lancer, précisément, des vagues de migrants à l’assaut de « l’Europe des croisés ». « C'est le commencement, la mise en place d'une série de mesures qui nous permettront d'interrompre, de détruire le business des passeurs, de travailler avec les pays en amont, pour essayer d'arrêter les pressions qui poussent ces vagues de migrants vers l'Europe », a indiqué le Britannique Philip Hammond. La suite est donc à venir.

Lucien Mpama

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