Immobilier : un véritable problème social au Congo

Samedi 28 Septembre 2013 - 8:15

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Malgré un marché du bâtiment et de la construction en plein essor, les loyers au Congo ne cessent d’augmenter. À quoi il faut ajouter la rareté des maisons en location. Véritable casse-tête pour une population en majorité pauvre, la spéculation immobilière ne cesse d’inquiéter au sein de la société congolaise.

L’offre déficitaire de logements et le marché de l’immobilier à l’état embryonnaire inquiètent les Congolais modestes, qui ne peuvent espérer vivre dans des conditions décentes en raison de leur niveau de vie très bas et de la hausse des prix dans le secteur. Les logements destinés à une famille de quatre à cinq membres coûtent généralement de 25 000 à 150 000 FCFA par mois. Les Congolais, soucieux, s’interrogent sur leur sort d’ici à dix ans. La spéculation est un phénomène économique et social qui prend de plus en plus de l’ampleur, sans nul doute en raison de l’augmentation de la population. Commençant dès 1998, la spéculation des logements en location vient aussi de la rareté des biens, surtout dans les zones à forte concentration humaine.

Une offre inférieure à la demande

La hausse du prix des matériaux de construction, la forte concentration des services administratifs, sanitaires, scolaires et autres sont pour la plupart à l’origine de la hausse spéculative. En effet, et on les comprend, bon nombre d’habitants préfèrent vivre là où les conditions de vie sont réunies. Mais dans ces quartiers, qui sont anciens, il est rare de voir l’offre augmenter. Dans ce cas faut-il réglementer le secteur afin de pallier ce phénomène ? Difficile à dire, car dans l’affirmative, le logement subirait un ajustement à la hausse, comme dans les transports en commun (voir les demi-terrain) et les denrées alimentaires de base (manioc, pain) qui conservent le même prix, mais diminuent en quantité. De ce fait, la réglementation n’est pas la solution attendue par les habitants. Souhaitons que l’État congolais s’engage à augmenter l’offre par la création d’une société nationale des habitations à loyer modéré (SNHLM).

À quand les HLM ?

Ces logements ont pour objectif de lutter contre la spéculation afin de permettre aux populations économiquement vulnérables d’accéder à un logement décent. « La majorité de nos concitoyens ne dispose pas de revenus suffisants pouvant leur permettre d’accéder à la propriété. La construction d’un logement varie entre 20 et 30 millions FCFA. Le fonctionnaire, par exemple, ne percevant que 90 000 FCFA, attend des réponses aux problèmes quotidiens auxquels il est confronté, notamment l’accès à l’eau, l’électricité et le logement », a indiqué le ministre chargé de la Construction et de l’Habitat, Claude-Alphonse Nsilou, au cours de son interpellation à l’Assemblée nationale.

Plusieurs projets sont en cours d’exécution à travers, notamment, des partenariats public-privé. S’agissant de ces partenariats, plus de 3 000 logements ont été mis en chantier, dont 600 sont en voie de finalisation. Au plan stratégique, les logements en chantier sont au nombre de 1 500, dont plus de 900 sont achevés. Selon le rapport de la commission Plan, Aménagement du territoire, Urbanisme et Habitat, seulement 250 logements ont été attribués à titre expérimental dans le site d’Oyo, dans le département de la Cuvette, Bacongo et Kintélé, en attendant la mise en application de la SNHLM. Ces loyers, selon le ministre de l’Habitat, ne correspondront pas à la réalité du marché spéculatif, car dit-il, c’est la réponse de l’État pour pallier le phénomène de spéculation.

Une taxe immobilière prévue pour 2014

La direction générale des Impôts et des Domaines entend instituer, en 2014, une taxe immobilière applicable à tous les niveaux dans le but de doter les collectivités locales de moyens financiers. La première ressource de l’administration publique étant les prélèvements obligatoires, cette taxe bénéficiera entièrement à la mairie, qui jusqu’à ce jour fonctionne grâce aux subventions. Cette taxe sera prélevée pour les locaux d’habitation et leur occupation. « Cette taxe deviendra une taxe à part entière, car d’ordinaire, nous prélevons la taxe sur la valeur locative dans la patente. Cette taxe varie entre 12 et 15% sur la base du chiffre d’affaires à des taux régressifs. Tout citoyen disposant d’un loyer devra s’acquitter de cette taxe qui ne sera plus prélevée dans la patente », a fait savoir un agent de la direction générale des Impôts, qui requiert l’anonymat.

Concernant les locaux professionnels de type commercial ou industriel, ce type de location est réglementé et doit faire face à cette taxe, le douzième du montant annuel de la location. Ce cas n’est pas similaire aux locaux d’habitation.

Décentraliser les services administratifs et sociaux

La décentralisation est perçue comme une approche de solution pour certains Congolais qui se plaignent de l’architecture des villes. Pour eux, la forte concentration des services sociaux participe à la spéculation des loyers, car nombreux sont ceux qui désirent habiter à proximité de leur lieu de travail, mieux encore, là où les conditions de vie sont réunies. Il faut donc déconcentrer l’administration publique en rapprochant les administrations des administrés et faire en sorte que tous les arrondissements soient dotés des services sociaux de base. Pour y remédier, il faut construire les infrastructures susceptibles d’encourager les populations à habiter même les quartiers les plus reculés du centre de la ville, entre autres les voies d’accès, l’eau, l’électricité, l’hôpital de base, les écoles, les universités, les supermarchés.

À quoi ressemblent nos agences immobilières ?

N’ayant généralement pas bonne réputation, ces agences sont pour la plupart organisées de façon traditionnelle. Mal structurées, ces agences n’ont pas de siège social et ne signent aucun contrat de garantie avec leurs clients. Tout se passe verbalement. Ces agences œuvrent dans l’informel alors qu’elles devraient être structurées comme toute entreprise commerciale. Elles appartiennent en général à de jeunes Congolais désœuvrés constitués en groupe. Elles tirent leur revenu en réclamant aux personnes recherchant un logement une somme de 10 000 FCFA pour chaque déplacement. Elles exigent également une commission de la valeur d’un mois de loyer, à payer en plus du mois de caution pour la location. Ces pratiques exaspèrent les populations obligées de s’y soumettre au risque de voir leur échapper un logement qui devient denrée rare à Brazzaville.

Josiane Mambou Loukoula

Légendes et crédits photo : 

Photos : Des logements sociaux construits par l'État. (© DR)