Interview. Cécile Belenge : « La situation est préoccupante »

Dimanche 16 Juillet 2017 - 12:34

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Ministre du Genre, Femme, Famille et Enfant, chargée de la Santé, l’Action humanitaire, les Affaires sociales, le Travail et la Prévoyance sociale de la Tshuapa, Cécile Belenge fait le point sur la condition de la femme dans sa province. Dans l’entretien accordé au Courrier de Kinshasa, elle soutient qu’à partir de 12 à 13 ans, la fille de la Tshuapa est considérée comme apte au mariage. D’où le constat général que dans plusieurs villages, elle peut avoir déjà deux enfants avant ses 18 ans, ce qui n’est pas sans la préoccuper.

 

 

 

Cécile Belenge, ministre du genre, femme, famille et enfant de la Tshuapa

Le Courrier de Kinshasa : Comment pourrait-on vous présenter à nos lecteurs ?

Cécile Belenge  : Je suis Cécile Belenge, Ministre du Genre, Femme, Famille et Enfant, également chargée de la Santé, l’action humanitaire, les Affaires sociales, le Travail et la Prévoyance sociale de la province démembrée de la Tshuapa.  

L.C.K. : Peut-on connaître la raison de votre présence à Kinshasa  ?

C.B.  : Nous participons au troisième forum des femmes qui a réuni tous les ministres provinciaux du Genre et leurs chefs de division.

L.C.K. : Pourriez-vous nous parler de la situation qui prévaut actuellement à la Tshuapa ainsi que de la condition de la femme de cette province  ?

C.B.  : La situation de la Tshuapa c’est qu’elle est une province en végétation. Elle faisait partie de la grande province de l’Équateur mais depuis le démembrement, la Tshuapa traverse une période difficile quant à son émergence qui demande une grande implication de partenaires tant financiers que logistiques. Car cette contrée est maintenant délaissée. Elle n’a aucun partenaire pour appuyer son système d’encadrement des femmes et des enfants. L’Unicef qui y est présent accompagne des structures dans les domaines de la santé et de l’éducation.

Par ailleurs, depuis que je suis en fonction, cet organisme a appuyé le secteur du genre une seule fois. C’était dans le cadre d’une formation assurée à trente enfants censés défendre la cause des enfants de la Tshuapa. Cet échantillon est implanté dans le chef-lieu de la province qui est cependant plus vaste que plusieurs pays du continent africain. Et nous ne disposons pas de moyens pour atteindre les confins de cette région. Quant à la condition de la femme, il faut relever le problème des mariages précoces. C’était la grande préoccupation du forum mais à la Tshuapa, c’est une réalité qui fait partie de nos us et coutumes. Plusieurs enquêtes d’envergure menées prouvent à suffisance qu’à partir de 12 à 13 ans, la fille de la Tshuapa est considérée comme apte au mariage. Et, dans beaucoup de villages nous avons constaté des mariages réalisés déjà à 14 ans, si bien qu’avant d’atteindre ses 18 ans, la fille peut avoir déjà deux enfants. La situation est préoccupante.

Dès lors, moi, en tant que responsable du genre au niveau provincial, je la déplore mais je ne jouis d’aucun soutien pour descendre sur le terrain et informer, sensibiliser la communauté au fait que la loi interdit de faire marier sa fille avant ses 18 ans. Nous espérons disposer des moyens pour parler à la population des dangers du mariage précoce des filles et de ses conséquences sur sa santé. J’ai été fort touchée par les informations livrées au forum concernant les mariages précoces. Ainsi, si nous trouvons des partenaires prêts à nous accompagner dans notre tâche, la priorité serait de privilégier la sensibilisation et la vulgarisation des textes et lois qui régissent le pays contre le mariage précoce. Nous pourrons alors faire appliquer les sanctions prévues par la loi à cet effet. Mais avant nous allons les communiquer. Il est vrai qu’à la Tshuapa, en ce qui concerne les mariages précoces, il y a une entente préalable des familles, celle du bourreau d’une part et celle de la victime de l’autre. C’est déjà un problème d’autant plus que notre loi condamne cette pratique. Mais ce n’est qu’un problème parce qu’il y en a bien d’autres encore dans presque tous les secteurs de la communauté, de notre société parce qu’à la Tshuapa nous n’avons pas de partenaire qui nous appuie dans l’accompagnement de la population.

 

Nioni Masela

Légendes et crédits photo : 

Photo : Cécile Belenge, ministre du genre, femme, famille et enfant de la Tshuapa

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