Interview : Claudy Siar: « Franklin Boukaka a influencé ma jeunesse »

Mercredi 21 Février 2018 - 11:45

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Du 26 février au 2 mars, « Couleurs tropicales » animée par Claudy Siar à l’Institut français va secouer la planète brazzavilloise. Un rendez-vous avec la jeunesse très attendu par l’animateur vedette de RFI. Entretien.

Les Dépêches de Brazzaville(L.D.B). Vous revenez à Brazzaville que vous connaissez bien. Que représente le Congo pour vous ?

Claudy Siar(C.S).  Le Congo est un pays que je connais et que j’aime pour son histoire, sa culture. Franklin Boukaka est encore un pilier pour moi ! Aux Antilles on parle de « potomitan » c’est-à-dire de celui qui est au centre de l’action et cet homme-là, par sa jeunesse, son esprit libre, son esprit d’émancipation, ses chansons, est venu dans ma jeunesse irriguer mon besoin d’un autre monde. Lorsque je vais à Brazzaville, j’ai toutes ces images en tête. J’ai à la fois l’histoire de mes ancêtres (Africain de la Caraïbe, je peux croire que mes ancêtres sont partis de là), une histoire plus récente avec Franklin Boukaka, une histoire actuelle avec ses Bantous de la capitale. Et puis une histoire présente avec une scène musicale et des artistes de grand talent dans tous les domaines : tradition, modernité, hip hop... Il se passe quelque chose au Congo et ses talents méritent d’être entendus et connus à l’international.

L.D.B. Vous venez pour la musique. Et pour la jeunesse. Comment soutenir ces jeunes talents ?

C.S. Le rôle de la diaspora est essentiel. Je ne me considère pas comme un membre de la diaspora afro-caribéenne, je suis de la diaspora afro ! Aussi, lorsque je parle du Congo, je deviens un enfant du pays. Pas un citoyen mais un fils. Et à ce titre, je dois, avec les outils qui sont les miens, mettre en exergue tous ses talents musicaux. Et quand je parle de musique, je parle aussi de culture et à travers elle, d’identité. Aujourd’hui dans nos pays, au regard de la place qu’ils ont dans le concert des nations, une des voix qui peut nous amener à l’émancipation et à l’estime de soi c’est bien la culture. Lorsque l’on est conscient de ce que l’on est, de qui on est, on peut avancer et c’est ce qui manque à une grande partie de la jeunesse. Moi je me focalise sur la jeunesse parce qu’elle est le présent et l’avenir d’un pays.

L.D.B. Que direz-vous vendredi lors de l’atelier « Génération Consciente » que vous allez animer ?

C.S. Dans ces ateliers « Génération Consciente », les jeunes vont parler de leur quotidien, comment ils vivent aujourd’hui le Congo, ce qu’ils en attendent et surtout ce qu’ils font pour leur pays. Pour ma part, j’aime à dire aux jeunes : « Vous êtes tous des leaders ! ». Chacun avec ses capacités, dans son domaine ou dans son espace, est un leader. Lorsque l’on dit ça aux uns et aux autres, on redonne confiance. J’ai envie de stimuler en eux l’envie de se dire « Malgré les difficultés, je peux faire quelque chose chez moi ».

L.D.B. Certains préfèrent partir au risque d’y laisser la liberté et la vie.

C.S. Tout le monde a vu l’engagement qui a été le mien dans l’affaire des esclaves en Libye. La colère que j’ai exprimée sans filtre. Une campagne « nos jeunes ont du talent » est en préparation dans dix pays d’Afrique avec des personnalités qui vont prêter leur image et leur notoriété. L’idée est de dire aux jeunes de ne pas partir dans ces conditions-là. On ne peut pas dire à un jeune de ne pas partir s’il pense qu’ailleurs les conditions de vie sont meilleures parce que chez lui tout est bloqué et que même l’espoir a été tué. Mais on ne peut pas partir dans n’importe quelle condition. L’argent est moins important que la vie ! Vous parents, ne poussez pas les enfants à partir. Et vous responsables politiques, affrontez la réalité. Cette affaire d’esclavagisme en Libye est un crime contre l’humanité et pourtant beaucoup, parmi nos responsables, n’ont pas bougé. Il reste qu' au-delà de tous ces drames, je suis pour l’ouverture des frontières. Contre un monde qui empêche qu’une frange de la population mondiale voyage comme les autres.

L.D.B. La jeunesse avenir du continent… Comment  l’aider ?

C.S. Quand on est jeune on pense que l’on est immortel et que le monde nous appartient. Les responsables politiques peuvent le comprendre et l’entendre. Au fond, il est de leur responsabilité de donner des pistes à la jeunesse. Cette jeunesse qui a besoin de cadre. Pour moi ces ateliers « Génération Consciente »puisqu’il s’agit de programmes de radio et télévision (nous les préparons avec TV5) visent à faire entendre ces demandes. Il faut aller plus loin avec des consultations nationales de la jeunesse, construire des lieux où les jeunes se rencontrent et se parlent. Des lieux où ils sont écoutés où ils peuvent recevoir un enseignement africain décidé par les Africains. Les jeunes devraient avoir cette dignité de se dire « Je vais faire des études chez moi et me soigner chez moi ». A nous, à notre génération de leur donner ce droit !

Programme Institut français :

  • Vendredi 23 février à 10 h. Atelier » Génération Consciente » : « L’Afrique est-il un continent d’avenir pour la jeunesse ? » Ouvert à tous les étudiants dans  la limite des places disponibles.
  • Samedi 24 février à 17 h : concert « Couleurs tropicales est au Congo ! »
Propos recueillis par Bénédicte de Capèle

Légendes et crédits photo : 

L'animateur de "Couleurs tropicales", Claudy Siar / DR

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