Interview. Jean Ishaku : « Nous vivons une époque formidable où la diaspora montre une soif d’entreprendre exceptionnelle »

Jeudi 13 Juillet 2017 - 17:06

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Jean Ishaku est cofondateur et président du Congo Millénium Business Club ainsi que cofondateur et directeur associé de l’agence de communication événementielle « Black Fahrenheit ». Les deux structures ont organisé, le 7 juillet, à Paris au sein de l’hôtel Renaissance, mais dans des espaces différents, deux activités, à savoir la présentation du réseau d’affaires « Makutano » aux membres de la diaspora congolaise ainsi que le rendez-vous mensuel « L’Air Du Temps », spécial RD Congo.

Le Courrier de Kinshasa : Qu’est-ce qui a motivé la création du Congo Millenium Business Club (CMBC) ? En quoi consistent ses activités ? Et quelles sont les actions que vous comptez mener afin d’atteindre vos objectifs ? 

Jean Ishaku : L’idée d’un réseau de dirigeants d’entreprises et des experts de la diaspora congolaise est directement liée à la création de notre agence Black Fahrenheit. Nous avons initié à Paris, dès 2007, un concept afterwork de mise en relation ciblant la diaspora africaine. L’idée était de créer une dynamique autour des cadres et dirigeants. Dès les premières étapes, nous avons constaté une forte fréquentation de profils du type jeunes diplômés ou actifs de la diaspora congolaise.

Ayant un fort attachement à notre identité congolaise et après des années de veille pour identifier des réseaux de jeunes congolais, nous avons pris la décision de créer une plate-forme à l’image de cette nouvelle génération de Congolais nés et grandis à l’extérieur du Congo et partageant les mêmes questionnements. Juridiquement né en 2015 sous sa forme actuelle (Association loi 1901) le CMBC a pour vocation de devenir le réseau de référence au sein de la diaspora. Nous sommes d’abord une communauté de valeurs au service de la diaspora, des Congolais et des amis du Congo. Nous sommes également un cercle d’affaires apolitique et nous avons à cœur la valorisation de l’Afrique en générale et du Bassin du Congo en particulier.

Nos objectifs sont de réunir l'excellence de la diaspora congolaise, de valoriser et de mettre en réseau ces décideurs, ces entrepreneurs, ces experts, ces cadres dirigeants et plus généralement les professionnels du secteur publique et du secteur privé qui ont acquis des années d’expertise afin de créer un mouvement positif qui regarde en direction de leur pays d’origine. Aujourd’hui nos activités se focalisent sur le sourcing, la qualification et la mise en connexion des profils au sein du réseau.  A partir de la rentrée 2017, nous proposerons ce que nous appelons des « rencontres affaires ». La mise en place de modules de formation et un système de mentoring seront déployés pour permettre à des jeunes entrepreneurs éligibles de lancer leur entreprise dans les meilleures conditions et de s’appuyer sur un réseau de parrains expérimentés.

 

LCK : Le vendredi 7 juillet, vous avez organisé l’évènement « L’Air du temps », spécial RDC où plusieurs interventions ont été faites notamment par la fondatrice du réseau Makutano. Comment évaluez-vous le déroulement de cet évènement ?

JI : Le CMBC a invité, dans le cadre de ses rencontres affaires, le réseau Makutano de Kinshasa à venir se présenter à la diaspora congolaise de Paris ce que nous qualifions de « Makutano Paris ». Plus d’une centaine d’invités triés sur le volet ont pris part à ce forum. Ils sont venus de partout, de différentes capitales européennes, des États-Unis et une délégation qui a fait le voyage spécialement de Kinshasa.  Cet évènement a été programmé de longue date en synergie avec l’équipe du Makutano basée à Kinshasa. Je tiens ici à remercier Mme Nicole Sulu pour la confiance accordée au CMBC dans la mise en œuvre de cette rencontre. Nous remercions également la représentation diplomatique de la RD Congo à Paris et tout particulièrement SEM Atoki Ileka pour son adhésion au projet et pour son soutien.

 Je salue également l’implication, le professionnalisme et la détermination du comité d’organisation du CMBC assisté par un chef de projet de l’Agence Black Fahrenheit pour nous offrir un évènement de qualité. Les retours sur l’évènement sont très encourageants et globalement positifs. Les analyses des différents experts ont conforté les participants sur l’utilité d’une plate-forme telle que le CMBC. Au même moment, dans un espace différent, l’agence de communication Black Fahrenheit, dont je suis un des directeurs associés, a organisé son rendez-vous mensuel « L’Air Du Temps ». Cette édition était un spécial RD Congo. L’objectif de BF sur ces sessions spéciales pays est de mettre en avant la dynamique sociale et économique des diasporas africaines en France. Sur cette session, la diaspora congolaise a montré sa capacité de mobilisation sur ce type de rendez-vous avec près de 400 actifs présents. Entrepreneurs, porteurs de projets et professionnels de différents secteurs d’activités étaient ainsi réunis pour un networking)

LCK : De quelle manière analysez-vous le dynamisme de la diaspora congolaise en France en général et à Paris en particulier ? Quels sont les secteurs où cette diaspora se met beaucoup plus en valeur ? 

JI : La diaspora congolaise est très présente en France et possède une énergie créative extraordinaire. Rares sont les diasporas qui marquent autant leur présence dans la communauté africaine. Ceux qu’on qualifie maladroitement de Congolais de la diaspora sont divers et variés. Ils n’ont pas tous la même aisance dans l’adaptation à leur environnement. Cela est certainement dû aux différentes périodes de migration qui composent notre diaspora, Il serait maladroit de la qualifier d’homogène et uniforme. Il est essentiel de comprendre que la face cachée de l’iceberg se fond dans le paysage et cultive une certaine forme de discrétion. Le Congolais est prisonnier d’une image véhiculant des préjugés très loin du sérieux. Faisant passer sous silence une majorité éduquée et active. Nous les retrouvons de façon visible dans les industries culturelle et créative (Musique, danse, arts plastiques, Mode, comédie, cinéma) ainsi que dans le sport. Ils sont beaucoup plus nombreux aujourd’hui dans la création d’entreprises, en générale et les nouvelles technologies en particulier. Nous vivons une époque formidable où la diaspora montre une soif d’entreprendre exceptionnelle.  Nous dénombrons un grand nombre de cadres dans les secteurs publics, dans l’administration et dans le secteur privé des grandes entreprises françaises et internationales. 

LCK : Comment la diaspora congolaise pourrait-elle jouer un rôle plus actif dans le développement économique de la RDC ?

JI : Tout d’abord, il est essentiel que la diaspora se structure d’une façon claire, que nous ayons une cartographie des associations fiables et impliquées dans le bien être et la valorisation de cette diaspora à l’image d’autres communautés africaines et particulièrement dans les pays anglo-saxons.

Il est important de participer par la consommation à la viabilité des entreprises tenues par la diaspora. Nous devons contribuer à la formation des gestionnaires d’entreprise pour rendre leur entreprise viable sur le long terme. La contribution au développement économique ne sera que plus importante par le mécanisme des transferts de flux financiers. Dans ce sens, plusieurs initiatives que nous encourageons pour mieux canaliser les investissements sont en cours pour créer des fonds d’investissement de la diaspora. Aucun pays émergent ne s’est développé sans le concours soutenu de sa diaspora. Cette dernière est liée par affiliation naturelle à son pays d’origine et chacun de nous aspire à faire découvrir à ses enfants et à ses petits-enfants, dans les meilleures conditions, la terre qui l’a vu naître.

LCK : Quels sont, selon vous, les secteurs prioritaires où la diaspora pourrait investir en RDC et pourquoi ?  

JI : Le premier investissement de la diaspora doit être humain. Proposer son expertise et ses compétences professionnelles. Ensuite, il est essentiel de se focaliser sur la création et le développement des PME, PMI, des petites industries de transformation qui permettront de proposer des produits made in Congo, source de croissance et de création d’emplois directs. Les secteurs d’activités sont divers et variés. Le soutien et la structuration des coopératives agricoles pour les petits producteurs afin de contribuer à l’autosuffisance alimentaire.  Le chantier est colossal.  

LCK : Pour revenir à « Black Fahrenheit ». Quelles sont les activités de cette agence et quels sont les plus grands événements que vous avez déjà organisés ? 

Avec une diaspora africaine grandissante, le marché s’élargit. Par conséquent, l’offre et la demande émanant de cette diaspora sont croissantes. BF a donc fait de cette cible son cheval de bataille. Qui est elle ? Comment s’adresser à elle ? Identifier les savoir-faire et développer le faire savoir qui est notre cœur de métier. De là est né un terme que nous avons inventé : l’Afro communication. On n’aborde pas une cible afro comme on aborderait n’importe quelle autre cible. BF est donc une agence d’Afro communication à 360 degré avec deux expertises claires : le conseil en communication institutionnelle et en évènements de grande envergure tels que les forums économiques : Believe In Africa (Washington) Africa Development Day (Paris) Rebranding Africa Forum (Bruxelles) Remise de Prix Scientifiques (Malabo), etc.

LCK : Quels sont les projets de CMBC ainsi que ceux de Black Fahrenheit ?

JI : Le CMBC travaille sur la création d’un forum international où toute l’énergie créative de la diaspora pourrait s’exprimer de différentes manières.  Concernant BF, le Rebranding Africa Forum arrive à grand pas en octobre. En plus des networking parisiens, nous préparons également une série de séminaires qui se tiendront sur le continent des 2018.

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

Photo1 Jean Ishaku Photo2 Une vue de l'assistance lors de la présentation du réseau Makutano ¨Photo3: Le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères She Okitundu, l'ambassadeur de la RDC en France, Christian Atoki Ileka et l'ambassadeur Kikaya Bin Karubi lors de l'événement Photo4: La fondatrice et présidente du réseau Makutano, Nicole Sulu, présentant le réseau Photo: L'équipe de l'agence Black Fahrenheit Photo6 Une vue de l'événement "L'air du temps", spécial RDC, organisé par Black Fahrenheit

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