Interview. Mariusca Moukengué: « Le slam est un moyen d’expression pacifique de notre siècle »

Mardi 18 Septembre 2018 - 13:37

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Depuis quelques jours, la slameuse représente le Congo en Suisse dans le cadre du prix Gaestatelier Krone qu’elle a remporté en septembre 2017. Dans cet entretien, elle nous parle de son parcours, de son amour pour le slam et de l’apport de cet art dans la société.

Les Dépêches de Brazzaville (L.D.B) : Concrètement, qui est Mariusca Moukengué ?

Mariusca Moukengué (M.M.) : Mariusca Moukengué est une artiste slameuse, comédienne et critique d’art congolaise. J’ai fait mes débuts dans l’art en 2011 au sein de la compagnie Nsala de Harvey Massamba, dans le domaine du théâtre. C’est en 2015 que je me suis lancée dans le slam aux côtés de Prodige Heveil, à l’Institut français du Congo. En septembre 2016, je m’initie à la critique d’art au sein des Ateliers Sahm de Bill Kouelany. Je suis également coordonnatrice du concept "slamunité" qui a été réalisé au Cameroun, au Congo ainsi qu’en République démocratique du Congo (RDC) et je suis l’auteure de la pièce de théâtre "L’envers d’un silence".

L.D.B. : Comment avez-vous débuté avec le slam ?

M.M.: Tout a commencé par un désir de me sentir vivante à travers les écrits, puis partager mon ressenti au public afin d’immortaliser ces pensées en trois minutes de vie et de thérapie.  C’est en 2015, après avoir rencontré le slameur Prodige Heveil, que je fais mes premiers pas dans le slam, en participant à la première édition de la semaine des cultures urbaines dans la catégorie tremplin slam. A présent, le slam est devenu pour moi, en plus d’une thérapie, un état d’esprit, un acte de vie, une respiration.

L.D.B. : Depuis quelques temps, vous êtes en tournée en Europe, quel est son objectif ?

M.M .: C’est à l’occasion de la sixième édition de la Rencontre internationale d’art contemporain, organisée par les ateliers Sahm, que j’ai obtenu le Prix Gaestatelier Krone. Cette résidence consiste à créer une ou plusieurs œuvres de l’esprit pendant trois mois en Suisse. De ce fait, entant que critique d’art, je visite des musées et galeries d’art afin de côtoyer une diversité des œuvres de l’art contemporain, d’autres formes et styles. Entant que slameuse, je rends nomade ma plume en laissant les réalités d’autres villes s’approcher avec elle. C’est ainsi qu’autant que les moyens mis à ma disposition et mon énergie me le permettent, je vais à la rencontre de mes collègues slameurs, échanger, partager avec eux des vers, des proses, des images, des scènes, des micros ou même des ondes.

L.D.B. : Parlez-nous des prix, festivals et concours auxquels vous avez déjà participé .

M.M.: Parmi les prix, festivals et concours auxquels j’ai participé et ou gagné, il y a les prix Gaestatelier Krone septembre 2017, Congo/Suisse ; Contemporary and mentoring, août 2017 RDC/ Allemagne et celui du Jeune ambassadeur de l’Union européenne 2018, Congo. Concernant les festivals, j’ai participé à un bon nombre comme le festival Etonnants voyageurs février 2012, Congo ; le festival Mantsina sur scène, décembre 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016, Congo ; le festival Biennale de Dakart, 2018, Sénégal ; le festival Ici l’AfriK 2015, Congo, sans oublier celui du Fiadol 2016 au Congo.

L.D.B.: Comment définissez-vous le slam et quel est son apport dans la société ?

M.M.: Le slam peut renvoyer à ce souffle libre qui sort de l’âme du slameur vers le public. C’est le mot rythmé qui se dit quand les oreilles sont à l’écoute. Qu’il soit accompagné d’un fond sonore ou a capela, il est évident que le slam est une poésie urbaine qui transmet les émotions et met les mots, la parole en ébullition en trois minutes, sans accessoires scéniques devant le public. Slamer, c’est l’art de poétiquement nommer le réel.

Au sein de la société, le slam est un moyen d’expression pacifique de notre siècle. Son inventeur, Smith, en a fait une arme non violente pour la résolution des conflits sociaux. Au lieu de verser du sang, versons des vers. Au lieu de tirer à balle réelle, tirons à mots touchants. Le slam intervient aussi dans la pédagogie, dans l’amélioration de l’expression orale. Il développe la tolérance, le vivre ensemble et surtout le partage sans lequel la société serait grégaire. On doit au slam l’épanouissement mental de la jeunesse.

L.D.B : Selon vous, quel est l’avenir du slam en République du Congo ?

M.M.: Le Slam au Congo est en train de tracer son chemin. Déjà jeune, né en 2012 pour le Congo, il ne se contente pas de marcher à quatre pattes devant son aîné le rap et autres formes de musique dans le pays. Le slam au Congo marche, court, ralentit, accélère, connaît des hauts et des bas, des luttes. Bref, au Congo, le slam vit et respire malgré tous les obstacles qui freinent son épanouissement. Mais son jeune âge ne l’empêchera pas de conquérir le cœur du public.

                                                                                                          

Rude Ngoma

Légendes et crédits photo : 

Photo: Mariusca Moukengué

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