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La nouvelle course aux armements

Samedi 5 Janvier 2019 - 18:14

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Même si les grandes puissances s'en défendent et jurent, la main sur le cœur, qu'elles œuvreront pour le maintien de la paix dans le monde, l'année 2019, dont nous vivons les premiers jours, sera très probablement marquée par une course aux armements qui accélèrera la modification des rapports de force sur la scène internationale engagée depuis le début de ce troisième millénaire. Et, bien sûr, personne ne peut dire avec certitude ce qu'il sortira de cette compétition à fleurets démouchetés.

Au centre de la course dont les contours se précisent figurent deux champs éminemment stratégiques : le numérique et l'espace.

- Dans le champ numérique, la mise en œuvre des nouvelles technologies sur le plan militaire n'a, dira-t-on, rien de bien nouveau comme en a témoigné le développement, ces dernières années, des moyens de communication, de surveillance, de contrôle mis en œuvre par les grandes nations industrielles. Mais tout indique aujourd'hui qu'il s'accélèrera fortement dans les mois à venir en raison des tensions croissantes qui opposent ces mêmes nations et pas seulement dans les zones de conflit potentiels que sont le Proche et le Moyen-Orient, l'Asie du sud ou les pays de l'est européen. C'est ainsi que l'on verra probablement se multiplier les cyber-attaques destinées à déstabiliser les circuits économiques et financiers, le vol des données sensibles sur lesquelles repose la sécurité des Etats, l'espionnage des dirigeants et de leurs proches, bref la mise en place des moyens électroniques très sophistiqués que procure dès à présent l'intelligence artificielle. Une course qui s'avèrera très coûteuse en raison de l'ampleur des moyens engagés et qui creusera encore un peu plus le fossé stratégique entre les nations riches et les pays en voie d'émergence.

- L'espace, lui, sera exclusivement réservé aux trois grandes puissances qui ont les moyens techniques et financiers de l'explorer pour en prendre sinon le contrôle, du moins en utiliser les atouts sur le plan stratégique : la Chine, les Etats-Unis, la Russie ; avec un point d'interrogation pour ce qui concerne l'Inde et surtout l'Europe qui détient, notamment grâce à la France, le savoir nécessaire pour agir au-delà de la sphère terrestre mais qui n'a pas la gouvernance indispensable pour coordonner les recherches et les actions dans ce domaine. Comme nous l'avons vu ces derniers jours avec l'action spectaculaire menée par la Chine sur la face invisible de la Lune, le temps est manifestement venu pour les grandes puissances d'affirmer clairement leur volonté de faire de l'espace proche ou lointain de la Terre une zone d'observation - et sans doute demain d'action - qui contribuera à leur sécurité. Et l'on peut donc être certain que 2019 verra Washington et Moscou lancer ou relancer, si ce n'est pas déjà fait dans le silence, les programmes spatiaux destinés à contrer l'action de Beijing.

Que faut-il conclure de ce qui précède ? Ceci résumé de façon très schématique : l'humanité, outre le combat qu'elle mène contre le dérèglement climatique généré par la surindustrialisation et par la dégradation de l'environnement qui en découle inexorablement, va devoir se préoccuper sérieusement de la double course aux armements qui s'engage ou plutôt qui s'accélère. De la même façon qu'elle a dû mettre en place, hier, des dispositifs destinés à stopper la course aux armes nucléaires, de la même façon elle sera obligée demain d'agir pour éviter les dérives que la nouvelle course aux armements provoquera inévitablement.

Tout comme cela se passe dans le domaine de la protection de la nature, les pays émergents vont devoir se mobiliser pour faire comprendre aux "Grands" que leur compétition menace de plus en plus directement le sort de l'espèce humaine.

 

   

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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