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Le contrôle des emplois dans la Fonction publique : vers des économies réelles ?

Jeudi 4 Mai 2017 - 14:28

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Sous l’effet de la baisse du prix du baril de pétrole sur les marchés mondiaux de 158$ en 2014 à moins de 50$ en 2016, la croissance du PIB du Congo est passée de 6,8% en 2014, à 2,3% en 2015, pour n’atteindre que 1,7% en 2016. Cette situation conduit l’Etat à réduire son train de vie en réalisant des économies substantielles, parmi lesquelles celles provenant de la maîtrise des effectifs des fonctionnaires dans la Fonction Publique, gangrénée par les emplois fictifs.

1) Des économies réelles : Entre 2009 et 2017, le gouvernement a organisé plusieurs recensements des fonctionnaires et a réalisé 47,9 milliards FCFA d’économie, en identifiant et en supprimant les emplois fictifs.  En 2009, le contrôle administratif des 80.350 fonctionnaires civils avait permis d’économiser 29 milliards FCFA pour atteindre 78.200 fonctionnaires, rattrapant le niveau de 1994 jugé pléthorique par la Banque mondiale.

En 2012, l’Etat entreprit avec l’assistance technique de la société franco-suisse Scanwell, l'identification et le contrôle biométrique des fonctionnaires, en établissant un fichier unique du personnel de l’Etat, afin de sécuriser la gestion des effectifs des fonctionnaires et de la masse salariale. La fusion des fichiers divergents (Fonction Publique, Solde, Trésor, Caisse de Retraite, ...) nécessita un recensement en 2014-2015, qui dénombra 3.641 emplois civils fictifs valant 5,1 milliards FCFA par an, 4.012 emplois militaires fictifs pour 2,7milliards FCFA par an et 1.481 policiers fictifs pour 1,1milliard FCFA par an.  

Le recensement de 2016-2017, identifia 13.578 emplois fictifs et 66.422 emplois réels pour un gain de 10 milliards FCFA. La répartition des effectifs réels par Département montre une très forte concentration des fonctionnaires à Brazzaville avec 59,14% de l’effectif total et au Kouilou 15% dont 12,73% à Pointe Noire. Les autres départements sont des déserts administratifs avec seulement 5,30% des fonctionnaires au Niari, 4% à la Bouenza, 3,89% au Pool, 3,50% dans la Cuvette, 2,56% aux Plateaux, 2,27 au Kouilou, 1,70% à la Sangha, 1,64% dans la Cuvette-Ouest, 1,51% dans la Lékoumou, 1,12% dans la Likouala, et 0,64% dans les représentations diplomatiques du Congo à l’étranger. Plus de 1.019 fonctionnaires perçoivent indûment des primes et indemnités allouées à leurs anciennes fonctions, quand 1.500 autres sont en instance d’affectation, et ont abandonné leurs postes depuis plus de dix mois, mais perçoivent toujours leur traitement. Les gains réalisés sont éphémères.

2) En cause, le cercle vicieux de l’emploi fictif lié à la faible traçabilité des effectifs des fonctionnaires qui ne régule pas efficacement le système de gestion du personnel pour conduire à l’équilibre les emplois par rapport aux ressources humaines disponibles. Il est amplifié par l’échec du projet d'identification biométrique du fonctionnaire, lié au départ de la société Scanwell pour non-paiement de ses factures par l’Etat. La démotivation des fonctionnaires affectés à ce projet, engendrée par le non-paiement de l’intégralité de la prime promise aux agents recenseurs et aux informaticiens, continue à alimenter l’emploi fantôme.

Ce phénomène se rencontre également dans les autres pays de la Cémac. Au Gabon, où en 2014, un audit a permis d’organiser le recensement général des fonctionnaires et plus de 2. 042 emplois fictifs ont permis une économie de 3,5 milliards FCFA par an à l’Etat. Par contre au Cameroun, la direction du Budget qui comptait un effectif total de 155.000 fonctionnaires, après avoir radié 10.000 agents fictifs identifiés, s’est retrouvée avec 170.000 fonctionnaires, un an plus tard, après l’augmentation des traitements.

Dans ces pays parmi tant d’autres, l’impunité des fraudeurs et la résistance au changement des agents affectent la traçabilité des effectifs des fonctionnaires, déséquilibrent le rapport entre les emplois et le besoin en ressources humaines, et dégradent l’indice de perception de la corruption. Le Congo qui occupait le 152e rang sur 174 pays en 2014, a perdu 7 points en passant au 159e rang en 2017 sur 176 pays. Le Gabon a également perdu 7 points, en passant du 94e au 101e rang. Le Cameroun quant à lui, a perdu 9 points, en passant du 136e au 145e rang.

Ainsi, le contrôle comptable et administratif des emplois publics est une source d’économie réelle, quand il conduit à l’équilibre des emplois et des ressources humaines, et améliore la traçabilité des effectifs, pilotée par un système cybernétique, dans lequel la responsabilisation et la motivation des agents sont les principaux leviers de la résistance au changement.

 

 

Par Emmanuel OKAMBA Maître de Conférences Habilité à Diriger l

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