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Le football malade

Vendredi 19 Octobre 2018 - 11:54

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L’équipe nationale du Congo a été battue le mardi 16 octobre 2018 à Monrovia, au Liberia. Elle a pêché par amateurisme, l’absence d’engagement et de conviction. Elle a subi une domination spatiale écœurante. En quatre-vingt-dix minutes, pas de centres délivrés à un avant-centre besogneux. Un activisme débridé, vers la fin du match, a permis aux Diables rouges d’avoir quelques rares occasions de buts. Un milieu défaillant a laissé à l’équipe libérienne une scandaleuse possibilité de récupération des ballons. Avec une meilleure justesse technique, elle aurait pu battre le Congo par un score plus important. Des Congolais plus appliqués, plus entreprenants pouvaient, avec une réelle rage de vaincre, remporter ce match qui était à leur portée. Au total, de leur part, nous avons eu droit à un spectacle insipide. Peu inspirés dans l’ensemble, avec des latéraux balourds, techniquement limités, des ailiers impotents, incapables d’une quelconque fulgurance, en dépit d’un but cafouilleux, ils n’ont, à aucun moment, mis véritablement l’équipe adverse en danger. Le public a pu constater le manque d’efficacité de l’équipe congolaise. La veille de cette rencontre capitale pour la qualification du Congo, deux « pièces maîtresses », à défaut d’une expression plus adaptée, batifolaient dans une boîte à Ouenzé. En d’autres temps, ils n’auraient pas fait le déplacement de Monrovia. Ce laxisme est coupable. Dans le même cas de figure, des joueurs importants de la sélection de 1965 furent exclus du groupe : Makouana Gilbert, Moubani, Bakekolo Lumumba, Ongagna Excellent et Boukaka Samuel. Matsima Maxime, suspendu pour indiscipline, lors du championnat de l’Onssu à Pointe-Noire, a été, lui aussi, mis à l’écart de la sélection nationale, pour ce motif. Sans préjudice, puisque le Congo, sans ces titulaires « idéels », remporta la médaille d’or aux Premiers Jeux africains de 1965. Qu’elle est loin l’époque où le Congo dominait le football africain ! « Les Brésiliens de l’Uam (Union africaine et malgache) », c’était le nom affublé à nos champions, véritables héros, bataillant pour la gloire du pays qui dominèrent le football continental.

Le Congo est absent de la Coupe du monde, haut lieu du football, depuis son ouverture massive à l’Afrique. Au dernier mondial, en Russie, pas de joueurs d’origine congolaise dans les différentes sélections en compétition. Pendant ce temps, des pays qui étaient maltraités par Congo Sport, du temps de la splendeur de notre football, y étaient représentés, notamment dans les équipes de France et de Belgique à travers leurs représentants binationaux. C’est aussi le cas du Cameroun et du Mali, naguère adversaires coriaces de notre équipe nationale mais toujours défaits. De même que la République démocratique du Congo, première sélection nationale d’Afrique noire à une phase finale de la Coupe du monde. Le Sénégal, qui n’a jamais remporté un titre continental, est, aujourd’hui, le porte flambeau du football africain. C’est le pays du continent le plus représenté sur l’échiquier du football mondial, grâce à une formation efficiente. Il a véritablement pris du galon sur la planète du sport roi.

Au rythme où évolue la situation, le Congo doit tout reprendre à zéro, d’autant que les joueurs actuels sont, pour la plupart, en fin de potentiel. Une remise à flot de l’équipe nationale nécessite au moins cinq ans de besogne acharnée. Il faut d’ores et déjà donner une priorité à la formation, au risque de compromettre le travail de mise en ordre juridique accompli depuis quelques temps par l’actuel ministre des Sports et de l’éducation physique. Pour porter des fruits, à terme, ce travail de rationalisation de l’action dans le domaine du sport et du football, en particulier, doit être mené concomitamment avec la détection et la formation des jeunes talents. C’est un préalable à la reconstruction d’une équipe de football compétitive. Le talent à l’état brut qui a permis au Congo de dominer le football continental doit être éclairé par la formation, la diététique, d’une façon générale, par une hygiène de vie. Sans une certaine discipline sur le terrain et en dehors, nos anciens footballeurs n’auraient pas eu tous les lauriers qui firent l’honneur et le prestige du Congo dans le concert des nations. A l’origine de leurs succès, la passion chevillée au corps qui les incitait à l’exploit. Autres temps, autres mœurs, le haut niveau, tant pour les amateurs que pour les professionnels, exige une ascèse. Chez nous, ce sont les primes qui constituent la seule préoccupation de nos footballeurs. Les résultats sur le terrain passent au second plan. Economes de leurs efforts et incapables de mouiller le maillot, il n’est pas surprenant que leurs prestations et leurs résultants soient en dents de scie. Décidemment, travailler peu et gagner plus est une disposition enkystée dans l’esprit des Congolais. Pas de progrès dans ces conditions.

Dès lors, on mesure l’ampleur de la tâche de l’actuel ministre des Sports et de l’éducation physique, Hugues Ngouélondélé, qui a du pain sur la planche, comme on dit. Dans le domaine du sport, le ministère a fonctionné sans textes de référence, les décrets d’application de la loi n°11-2000 du 31 juillet 2000, viennent tout juste d’être adoptés par le conseil des ministres du jeudi 20 septembre 2018, dix-huit ans après son vote par le parlement. L’arsenal juridique doit être renforcé par d’autres textes, un code du sport par exemple, pour permettre enfin au ministère des Sports et de l’éducation physique d’être en mesure de mener une action volontariste et cohérente pour le développement d’un secteur moribond, en dépit de quelques spasmes qui entretiennent l’espoir d’une rédemption.  Muni d’un arsenal juridique adapté, Hugues Ngouélondélé doit faire évoluer les mentalités et le monde sportif vers un cercle vertueux. Courage et bon vent, monsieur le ministre. Les vrais héros ne sont pas toujours ceux que l’on croit.                                             

 

Mfumu

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