Le pape vivement préoccupé par le sort des chrétiens du Niger

Lundi 26 Janvier 2015 - 11:45

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La petite communauté chrétienne du Niger a vu 45 de ses églises et lieux de culte saccagés par des musulmans en colère contre les caricatures de Mahomet.

Le Souverain pontife est inquiet. Les actes de violence au nom de Dieu prennent de plus en plus pour cibles les chrétiens. De l’Irak à la Syrie, de l’Inde au Pakistan, les communautés chrétiennes vivent dans la peur. Et en Afrique, les pays qui vivent sous la menace constante d’extrémistes musulmans qui passent sur les chrétiens toutes sortes de griefs contre l’Occident, ne font que se multiplier. Il n’est plus question du seul Nigéria où la secte islamiste Boko Haram lutte contre les valeurs de l’Occident, y compris « son » christianisme.

En dehors du pays le plus peuplé d’Afrique, Boko Haram a d’ores et déjà tendu ses tentacules vers le Cameroun voisin. En Somalie, en Libye et même, dans une moindre mesure, en Egypte, l’Afrique des chrétiens ne se reconnaît plus dans la nouvelle réalité que tentent de tisser les islamistes. Là où chrétiens et musulmans vivaient en bonne entente depuis des siècles, la haine et la méfiance sont désormais la règle. « Nous voyons des ombres et des dangers à l'horizon qui inquiètent l'humanité », a constaté le pape François jeudi, en recevant les agents de la sécurité publique du Vatican venus lui présenter leurs vœux.

L’inquiétude du pape est nourrie par une grande incompréhension des chrétiens devant l’actualité du moment. Jusqu’à il y a une semaine, un pays comme le Niger ne se reconnaissait aucune affinité djihadiste. Mais il a fallu la reproduction des caricatures de Charlie Hebdo, en France, pour que Niamey la capitale et Zinder la deuxième ville du Niger s’embrasent. Des édifices religieux chrétiens d’importance, il n’est resté debout ou intacte que la seule cathédrale de Niamey. Tout le reste a été jeté aux flammes dans une colère musulmane qui a du mal à dire pourquoi les chrétiens sont devenus leurs cibles dans une affaire purement laïque.

Plus grave : le saccage des églises et lieux de représentations françaises s’est accompagné de morts, dix selon le bilan officiel. Des chrétiens ont été recherchés et abattus dans une furie que le pays n’avait pas connue jusqu’ici. « Je vous invite à prier pour les victimes de ces derniers jours au Niger. Les chrétiens, les enfants et les Eglises ont subi dans cette région, plusieurs actes de brutalité », avait dit le pape mercredi au cours de l’audience générale, Place Saint-Pierre à Rome. Il a fait prier pour « le don de réconciliation et de paix afin que le sentiment religieux ne devienne jamais occasion de violence, de vexation et de destruction » et souhaité le rétablissement le plus rapidement possible « d’un climat de respect réciproque et de cohabitation pacifique pour le bien de tous » au Niger.

Il a réitéré un message devenu constant chez lui: « on ne peut tuer au nom de Dieu ». Et aux policiers italiens, le chef de l’Eglise catholique a rappelé jeudi : « En tant que chrétiens, nous sommes appelés à ne pas nous laisser décourager ». N’empêche : au Niger la communauté chrétienne « est sous le choc », pour reprendre les paroles atterrées de Mgr Michel Cartatéguy, l’archevêque sortant de Niamey. Au Sénégal aussi on se montre inquiets devant le risque de contagion d’une incompréhension née de réalités qui sont pourtant étrangères aux chrétiens, en France et ailleurs.

Le Vatican, sous la surveillance des services de sécurité italiens, maintient un niveau élevé d’alerte. Les fondamentalistes de l’Etat islamique en Irak ont menacé de « marcher sur Rome » et de planter leur drapeau sur la coupole de la Basilique Saint-Pierre. Cette situation semble ne plus connaître les limites de la modération ; les fondamentalistes tentant de répandre le message que le vrai Dieu ne se dessine pas, ne se caricature pas. Et que la caricature fait partie d’un complot contre l’islam. Mais ils sont devenus autistes aussi, même lorsque le pape François réaffirme que « tuer au nom de Dieu est une aberration » et qu’ «offenser la religion des autres n’est pas admissible ».

Lucien Mpama