Le père Hervé Andongui : « Les catholiques prient la Vierge Marie parce qu’elle est la mère de l’Église »

Samedi 12 Octobre 2013 - 9:00

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Dans ce roman de 124 pages publié aux Éditions Tino-Stars à Brazzaville, l’auteur dissipe les doutes des chrétiens à propos de la Vierge Marie. Il explique dans un entretien à bâtons rompus ce qu’il a écrit dans ce cinquième livre qu’il publie en cinq ans d’ordination (depuis le 5 juillet 2008)

Ce roman, structuré en trois grandes parties : la Vierge Marie parmi les saintes, la Vierge Marie dans la tradition de l’Église, et les prières à la Vierge Marie, est vendu dans les boutiques paroissiales de la cathédrale, de Saint-François, de Sainte-Marie à Ouenzé, de Saint-Jean-Baptiste à Talangai au prix de 8 euros.

Originaire du Congo-Brazzaville, le père Hervé Andongui est missionnaire spiritain. Il est également membre du foyer marial de Joinville (France). Actuellement, il en mission au Congo-Brazzaville où il assure les charges de responsable du Centre spiritain d’accueil et de retraite Père-Paul-Ondia de Kinsoundi et responsable du postulat spiritain à Brazzaville.

Les Dépêches de Brazzaville : Pourquoi avoir écrit Marie, refuge des affligés ? Pourquoi les catholiques prient-ils la Vierge Marie ?
Père Hervé Andongui : C’est une question que j’ai utilisée pour inciter non seulement les chrétiens, mais tous ceux qui vont me lire, parce que cette question revient souvent dans les débats entre les catholiques et les Églises dites de réveil. On me demande souvent pourquoi les catholiques s’attachent beaucoup à la Vierge Marie. C’est comme si abandonnions Dieu lui-même, le Christ. C’est pour répondre à cette question que j’ai écrit cet ouvrage. Mais d’une manière mécanique, je répondrai que les catholiques prient la Vierge Marie parce qu’elle est la mère de l’Église, donc notre mère. Nous le savons, sur la croix au mont Golgotha, Jésus Christ a confié à Jean : Fils, voici ta mère et mère, voici ton fils. Depuis ce jour, nous savons que la Vierge Marie est non seulement la mère du Christ, mais aussi la mère de l’Église. Et comme nous sommes membres de l’Église, c’est donc notre mère. Ainsi, c’est normal que nous puissions la prier et l’aimer comme tout un chacun peut aimer sa mère.

LDB : C’est un point contraire pour vos frères des Églises dites de réveil !
PHA : Oui, les Églises de réveil n’accordent pas beaucoup d’importance à la Vierge Marie, car chaque Église à sa doctrine. Pour nous, les catholiques, on ne peut pas parler de l’Église catholique sans parler de la Vierge Marie. Tout comme on ne peut pas parler de Christ sans parler de la Vierge Marie, parce qu’on ne peut pas parler d’une personne sans connaître ses origines. Quand on parle de Christ, automatiquement cela renvoie à la Vierge Marie qui a porté la grossesse pendant neuf mois. Je pense que c’est normal que les catholiques prient la Vierge Marie et l’aiment comme on aime une mère.

LDB : Et pourtant les Saintes Écritures sont claires : tu n’auras pas d’autre Dieu que Moi…
PHA : La Bible le dit, certes, mais nous, les catholiques, ne remplaçons pas la Vierge Marie, tout comme elle ne prend pas la place de Dieu. La Vierge Marie est là comme la mère du Christ, et nous ne reconnaissons que le privilège que Dieu lui-même lui avait donné. Parce que dans la Bible, nous voyons avec Luc, comment l’ange Gabriel vient voir une jeune fille pour lui dire qu’elle va concevoir un fils et ce fils sera Dieu. Nous aussi, nous prenons juste le raccourci de Dieu pour reconnaître la place que Marie occupe. Mais, la Vierge Marie ne va jamais remplacer le Christ, ni Dieu, elle reste une femme à part entière comme toute femme. La différence est qu’elle a mis au monde un fils qui n’est pas un homme comme tous les hommes.

LDB : Est-ce une occasion pour vous de louer la Vierge Marie ?
PHA : Nous ne louons pas la Vierge Marie, nous la respectons plutôt. Nous la prions pour qu’elle intercède pour nous. Lisez l’histoire des Noces de Canaan dans l’Évangile de Jean au premier chapitre. Il est écrit que pendant le repas, la Vierge Marie est invitée ainsi que Jésus Christ et ses disciples. La Vierge Marie voit qu’il n’y avait plus de vin et que la fête devait s’arrêter. C’est ainsi qu’elle est allée dire à son fils qu’il n’y avait plus de vin. Jésus Christ dit à ses disciples de faire tout ce qu’elle leur dira. Et dit à la Vierge-Marie : « Femme, que me veux-tu ? Le moment n’est pas arrivé. » Malgré cette réponse, il demanda tout de même à ses disciples de lui apporter de l’eau qu’il a fini par transformer en vin de bonne qualité par sa prière. Nous nous basons sur ça pour dire que si la Vierge Marie a pu intercéder pour les mariés afin qu’ils puissent avoir le vin devant leur permettre de continuer la fête, et si son fils l’a écoutée, nous aussi on peut passer par la Vierge Marie pour poser nos problèmes afin qu’elle les confie à son fils. C’est vous dire que nous n’adorons pas la Vierge Marie, mais la Vierge Marie intercède pour nous auprès de son fils. Car la relation qui existe entre une mère et son fils dépasse le cadre sociologique. La Vierge Marie joue donc le rôle de médiatrice entre le Christ et les hommes, attendu que nous n’avons qu’un seul médiateur qui est Jésus Christ entre les hommes et Dieu.

LDB : Marie refuge des affligés… Qui sont ces affligés ? Et pourquoi pas Jésus, refuge des affligés ?
PHA : Les affligés sont tous les chrétiens qui ont des problèmes, des pénitences, qui sont dépassés par la vie, qui pensent qu’il faut se réfugier entre les mains de la Vierge Marie pour trouver solution. Pourquoi pas Jésus, tout simplement parce que j’ai voulu dans mon travail montrer la place de Marie dans l’Église catholique. Elle est la mère des pauvres, des pêcheurs, des affligés, la consolatrice… C’est notre mère. D’ailleurs lorsque vous tapez un enfant, il va se cacher entre les mains de sa mère. C’est autant pour nous.

LDB : Est-ce pour cela que vous vous rendez chaque matin vous prosterner dans la grotte ?
PHA : Même vous, si vous viviez dans la même ville que votre maman, je crois que chaque matin avant d’aller au travail vous passeriez lui dire bonjour. C’est pour vous dire que si nous allons à la grotte chaque matin, c’est pour saluer la Vierge Marie avant de commencer notre journée et surtout pour lui confier nos problèmes. Ce n’est que normal.

LDB : Justement, voilà pourquoi nous craignons que la Vierge Marie ne supplante Jésus Christ, tout au moins au niveau de l’Église catholique…
PHA : Ce sont les Églises de réveil qui peuvent le dire. Pour les catholiques qui sont formés, on ne pourra jamais remplacer Jésus Christ par la Vierge Marie. Elle restera une mère, une femme comme toutes les femmes. La seule différence est qu’elle a mis au monde un fils qui est Dieu. Pour cela, on respecte cette dignité. C’est donc normal que de temps en temps nous allions à la grotte pour la saluer.

LDB : Pensez-vous que la Vierge Marie est la solution ?
PHA : Tout à fait. D’ailleurs, c’est la question que j’ai posée à beaucoup de chrétiens. Pour écrire ce livre, j’ai passé douze mois à poser cette question sur laquelle j’ai discuté avec des chrétiennes et des chrétiens au Gabon, au Cameroun, en Centrafrique. Je leur ai posé la question de savoir s’ils trouvent des solutions lorsqu’ils prient la Vierge Marie ? La réponse a été tout à fait positive, d’ailleurs pour tous les catholiques. Lorsqu’on se confie à elle, on a la solution.

LDB : Et vous, quelle est votre relation avec Marie ?
PHA : La relation que j’ai avec Marie comme chrétien d’abord, puis ensuite comme prêtre, c’est comme un fils avec sa mère. Je pense que c’est une relation qui est normale. Je ne peux pas passer la journée sans prier la Vierge Marie, sans dire quelque chose sur elle, sans penser à elle. C’est d’ailleurs sous la Vierge Marie que j’ai placé mon sacerdoce. Dès mon ordination le 5 juillet 2008, le premier jour j’ai confié mon ministère à la Vierge Marie. Cela fait cinq ans qu’elle ne cesse de m’accompagner. Je la sens spirituellement, et d’ailleurs quand j’ai commencé ce projet, je suis allé à la grotte lui dire que je voulais écrire quelque chose sur elle, mais que je ne savais par où commencer.

LDB : Les catholiques demandent souvent à la Vierge-Marie : Prie pour nous, pauvres pêcheurs. A-t-elle réellement ce pouvoir ? Les autres Églises pensent qu’elles n’ont pas besoin d’elle pour atteindre Jésus-Christ ?
PHA :
Oui, prier dans le sens d’intercéder pour nous, parce qu’elle a ce pouvoir d’intercéder pour tous les hommes. Elle est la personne la mieux indiquée pour intercéder pour les fidèles auprès de Jésus Christ. Parce qu’elle est l’échelle qui nous conduit vers son fils. Elle aide les chrétiens à connaître son fils, et nous rapproche de lui. Quant aux autres Églises, je ne les critique pas, car je sais que chaque Église à sa doctrine. Je ne peux pas aujourd’hui comme catholique réfléchir comme celui qui est dans une Église de réveil. Mais pour le catholique romain, la Vierge-Marie est la mère de l’Église, notre mère, nous la respectons comme telle.

LDB : Le monde chrétien connaît aujourd’hui une véritable crise de la foi. Quel est votre point de vue en tant que prêtre ?
PHA : Je pense que la crise de la foi est liée à l’évolution des mentalités, parce qu’on ne peut comparer les chrétiens anciens et actuels. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication qui évoluent du jour en jour ont un impact sur notre manière de connaître Dieu. Ce que les chrétiens doivent faire, c’est renouer avec eux-mêmes, retrouver la paix intérieure et surtout modérer leur relation avec la technologie, parce qu’internet a apporté beaucoup de choses. Ce sont des plateformes de péché.

Propos recueillis par Bruno Okokana

Légendes et crédits photo : 

Photos 1 et 2 : Le révérend père Hervé Andongui. (© DR)