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Les causes d’un désastre annoncé

Samedi 21 Novembre 2015 - 13:03

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Les évènements tragiques que nous vivons ces derniers temps en Europe, au Moyen-Orient, en Afrique étaient malheureusement prévisibles. Mais personne n’a été capable d’en anticiper la survenance et de prendre à temps les mesures qui auraient permis, à Beyrouth, à Paris et à Bamako, de les éviter.

Pourquoi ?

À cette question il est au moins trois réponses possibles. Les voici énoncées brutalement et sans prétendre, bien sûr, épuiser le sujet.

Première raison : le sous-développement dans les pays pauvres du Sud et la marginalisation croissante des populations dans les quartiers déshérités des grandes villes du Nord permettent  aux extrémistes de recruter les individus ou les bandes qu’ils manipuleront ensuite à leur guise. L’espace et le temps, qui étaient jusqu’alors des barrières naturelles, s’effaçant en raison de l’importance croissante des moyens de communication électroniques les idées les plus radicales se diffusent désormais  librement et nourrissent les comportements les plus extrêmes. On peut donc prédire sans le moindre risque de se tromper que les explosions de violence qui se sont produites la semaine dernière sous nos yeux effarés au Liban, en France, au Mali ne sont que le début d’une vague qui déstabilisera des régions entières de la planète.

Deuxième réponse : le comportement irréaliste des grandes puissances du Nord face aux crises qui affectent des régions entières du Sud ne peut qu’accélérer le processus de déstabilisation générale auquel nous assistons ces derniers temps. Loin de ramener la paix dans des régions en proie à des violences récurrentes les guerres d’Irak, d’Afghanistan, de Libye, de Palestine n’ont fait, dans les deux dernières décennies, qu’aggraver le mal au lieu de le combattre. Conduites au nom de la démocratie et de l’Etat de droit mais sans véritable réflexion sur leurs conséquences, elles ont semé le chaos dans de nombreux pays, favorisé l’implantation des groupuscules les plus extrémistes, déstabilisé les populations au point de les convaincre d’émigrer vers l’Europe pour échapper au destin tragique qui leur était promis. Et tout indique aujourd’hui que les pays qui ont agi ainsi vont payer au prix fort leur manque de clairvoyance.

 

Troisième réponse : la communauté internationale s’avère incapable de relever les défis qui lui sont lancés dans le domaine de la sécurité, de la prévention et de la gestion des crises, du sous-développement. Elle intervient tardivement et de façon anarchique chaque fois qu’une bombe politique, ethnique ou religieuse explose sur l’un ou l’autre des cinq continents, mais le bilan de ses interventions s’avère partout désastreux. Que ce soit au Proche et au Moyen Orient ou en Afrique elle fait preuve d’une incapacité à agir qui confine à l’incompétence et qui convainc les peuples du tiers-monde qu’ils n’ont rien à attendre d’elle ; le Bassin du Congo – Rwanda,  Burundi,  République démocratique du Congo, Centrafrique  – en apporte une preuve accablante  avec ses quelque dix millions de morts au cours des quinze dernières années. Si l’Organisation des Nations unies ne se réforme pas très vite pour s’adapter aux réalités géopolitiques et stratégiques de notre temps,  le mal ne fera que s’aggraver

Alors que débute une nouvelle ère de violence aveugle, mieux vaudrait regarder la vérité en face et s’attaquer de front aux causes réelles des drames qui se multiplient. Ce n’est pas en parlant, en discourant, en gesticulant que le monde moderne parviendra à neutraliser les démons qui le hantent, mais en prenant enfin la juste mesure des problèmes auxquels il est confronté de par sa propre évolution et, surtout, de la persistance de ses mauvais instincts.

     

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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