Les Eurosceptiques investissent le Parlement européen

Mardi 27 Mai 2014 - 18:10

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Les élections européennes qui se sont déroulées le 25 mai en France, auront marqué la France par l’arrivée de 24 eurodéputés du Front national (FN) alors que le parti d’extrême-droite n'en avait que trois lors de la précédente législature. Avec 20% des voix, l’UMP récolte 20 sièges, contre 13 pour le parti socialiste. Les Verts passent par contre de 16 élus à 6, et les Centristes à 7 élus. Du côté de la Gauche radicale, elle ne récolte que 4 sièges d’eurodéputés

Du coup, c’est le FN qui constituera la première délégation française à Strasbourg avec 24 eurodéputés (1/3) sur les 74 que compte la France. Après la débâcle aux européennes, le président français s’est exprimé hier, le lundi 26 mai, pour expliquer les causes de la poussée du FN, et évoquer les conséquences qu’il tirait du scrutin, alors que Marine Le Pen, la présidente FN l’invitait à dissoudre l’Assemblée nationale. Une option que François Hollande a écartée, maintenant le cap fixé, à la veille de son intervention à Bruxelles, au Conseil européen.

Vers la banalisation de l’euroscepticisme malgré une forte présence des pro-européens

Dans la foulée de la victoire du FN en France, un important nombre de partis eurosceptiques vont faire leur entrée au Parlement européen. Bien que leur formation en groupe parlementaire s’annonce complexe, ils devraient occuper une bonne partie de l’hémicycle.

Selon les résultats des élections européennes, sur les 751 sièges que compte le Parlement européen, les conservateurs du Parti populaire européen (PPE) seraient en tête avec 212 sièges, contre 186 pour les socialistes. Les Libéraux obtiennent 70 eurodéputés, suivis par les Verts, avec 55 eurodéputés. Les partis proeuropéens conservent une large majorité au Parlement européen avec un total de 523 sièges, contre 612 sur la mandature 2009-2014.

Forte progression des eurosceptiques avoisinant 1/5 des sièges

Du côté des  eurosceptiques, ce sont 140 sièges sur les 751 qui pourraient être récoltés. Un nombre d’élus largement suffisant pour former un groupe politique au Parlement européen. Le nombre requis étant un minimum de 25 eurodéputés de 7 pays différents.

Des Eurosceptiques fortement divisés idéologiquement

Mais les forces eurosceptiques restent profondément divisées, et la victoire du FN en France et celle de l’Ukip au Royaume-Uni annoncent des regroupements très complexes, les deux partis étant appelés à chasser sur le même terrain. Crédité de 24 élus et de 25% des voix en France, le FN apparaît comme le grand gagnant de ces élections européennes. Il n’aura aucune difficulté à rassembler un nombre suffisant d’eurodéputés, mais le parti doit aussi trouver des alliés dans 10 autres pays européens.

Le leader de l’Ukip, Nigel Farage, affiche également une large victoire au Royaume-Uni avec un score historique de 29, qui lui octroie 23 sièges d’eurodéputés, contre 9 au cours de la mandature précédente. Au sein du précédent Parlement européen, l’Ukip avait déjà réussi à constituer un groupe parlementaire, sous l’appellation d’Europe Liberté et démocratie.

Ce parti à l’écart du FN qu’il juge trop extrémiste, est proche du parti français de Nicolas Dupont-Aignan, Debout la République, qui n’a pas remporté de siège lors des élections.

Le Danemark a également vu une montée du parti populaire danois, une formation d’extrême-droite anti-immigration. Elle arrive en tête des suffrages avec 26,7% des voix, soit 4 eurodéputés, contre 2 sous la mandature précédente. Or ce parti a déjà pris lui aussi ses distances avec le FN. On peut également citer le parti néo-nazi grec, Aube dorée, qui a gagné du terrain.

C’est sans doute du côté des alliés historiques du parti du FN à Bruxelles, le Parti autrichien de liberté (FPÔ) et le Vlaams Belang en Belgique, rassemblés au sein de l’Alliance européenne des libertés, que peut se constituer le socle d’un futur groupe parlementaire potentiel au sein du Parlement européen. Mais le Vlaams Belang a subi un revers électoral, n’obtenant qu'un siège d’élu. Reste donc le parti néerlandais pour la liberté (PVV), de Geert Wilders. Mais ce dernier vient de perdre 2 sièges au Parlement européen. Les Démocrates suédois (SD), parti eurosceptique allié au FN, obtiennent 7 % des voix et entrent eux aussi au Parlement. Le parti populiste des Vrais Finlandais obtient 2 sièges.

Les nouveaux entrants

Parmi les nouveaux entrants, on peut citer le nouveau parti anti-euro allemand AFD, qui a remporté 6,5% de suffrages, lui permettant d’obtenir 6 sièges d’eurodéputés. C’est le cas aussi du parti ultra-nationaliste hongrois, le Jobbik, arrivé en seconde position avec 14,7% et récoltant 3 sièges au Parlement européen ; et le parti néo-nazi grec Aube dorée, qui vient d’envoyer 2 élus à Strasbourg. Ces deux derniers partis sont déclarés « infréquentables ». Or , c’est peut-être sur ce nouveau terrain que les partenariats pourraient se constituer en fonction des idéologies des partis, que viendront chasser le Front National et l’Ukip, en vue d’obtenir un groupe parlementaire.

Malgré la montée des partis anti-européens, il faut savoir que les équilibres politiques restent inchangés. C’est plutôt au sein des commissaires européens qu’il faudrait axer ses interrogations : sept ont obtenu leur siège au Parlement européen ; quatre d’entre eux restent indécis. Ils doivent annoncer en juin prochain s’ils souhaitent ou non conserver un poste au sein de l’exécutif européen.

Les défis de la nouvelle Commission européenne

Beaucoup de défis attendent la nouvelle Commission européenne. Dès l’automne prochain, une nouvelle équipe de commissaires entrera en fonction au sein du nouvel exécutif européen. Alors que les troubles économiques semblent s’apaiser, la future commission pourra se pencher sur un certain nombre de dossiers épineux à long terme lors de la rédaction de son programme politique. Parmi les défis, on peut retenir le besoin de changements structurels des institutions, « une nouvelle grande idée pour redynamiser l’UE ».

Une étude récente de la CE demande aux dirigeants politiques européens de sortir de leur confort et de réexaminer certains dogmes censés guider leur méthode de prise de décision et chercher de nouvelles solutions en vue de réinsuffler de la croissance, de gagner en influence à l’échelle internationale et d’optimiser l’architecture des institutions européennes - mais aussi de lutter contre le chômage. Ce qui pourrait être une des clés pour lutter contre l’avancée de l’euroscepticisme.

À l’occasion d’un sommet extraordinaire des chefs d’État des pays membres de l’UE, qui se tient à Bruxelles aujourd’hui pour discuter des résultats des élections européennes, quelques annonces pourraient surgir avant la fin de la semaine. Les noms des futurs présidents probables de la Commission européenne (CE) pourraient circuler. Notamment, Martin Schulz et Jean-Claude Juncker, Guy Verhofstadt, sans exclure une candidate surprise, en la personne de Christine Lagarde, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI). 

Noël Ndong