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Les leçons de la crise libyenne

Samedi 28 Janvier 2017 - 11:30

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Il y avait, d'un côté, les  Nicolas Sarkozy et les Bernard-Henry Levy qui, pour se venger ou se mettre en avant sur la scène médiatique, voulaient à tout prix faire disparaître Mouammar Kadhafi sans se préoccuper le moins du monde du chaos dans lequel sombrerait aussitôt la Libye et les pays qui l'entourent. Il y avait, de l'autre côté, les hommes d'Etat africains comme Denis Sassou N'Guesso qui mesuraient pleinement la tragédie que l'élimination du "Guide" provoquerait à coup sûr et qui s'employaient, au risque de leur vie, à trouver une issue pacifique à la crise dans laquelle plongeait la Libye.

C'était il y a tout juste six ans et, malheureusement, les premiers l'emportèrent sur les seconds avec les conséquences tragiques que l'assassinat de Mouammar Kadhafi, voulu et organisé par quelques puissances occidentales, engendra : implosion ethnique du pays, décomposition de l'Etat et de ses administrations, multiplication des zones de non droit, meurtres et violences de toute nature, extension du chaos à la région du Sahel et, depuis quelques mois, afflux tragique de milliers de migrants vers les côtes sud de l'Europe.

Quiconque observe le terrain constate que les premiers, leur forfait commis, agissent comme s'ils n'étaient pour rien dans le drame que vit aujourd'hui la Libye tandis que les seconds, loin de baisser les bras, s'emploient plus que jamais à restaurer la paix, à réconcilier ceux qui s'affrontent les armes à la main, à trouver une issue pacifique au conflit né qu'on le veuille ou pas du "printemps arabe". Nous en avons eu une nouvelle preuve vendredi lorsque le Comité de haut niveau constitué par l'Union Africaine pour organiser la sortie de crise en Libye s'est réuni à Brazzaville sous la présidence du chef de l'Etat congolais.

"Apporter une réponse africaine à une crise africaine", tel est résumé en quelques mots le message que Denis Sassou N'Guesso a fait passer aux représentants des cinq pays membres du Comité de haut niveau, des institutions internationales et du corps diplomatique présents dans la grande salle du Palais des Congrès. Un message d'autant mieux perçu aujourd’hui que les évènements présents avaient été prédits avant même le meurtre de Mouammar Kadhafi et que les conséquences du désordre institutionnel créé par sa disparition apparaissent de plus en plus graves, de plus en plus meurtrières, de plus en plus destructrices.

Nul ne peut dire si la démarche entreprise par l'Union africaine et confiée au Comité de haut niveau que conduit le président du Congo permettra de ramener rapidement la paix en Libye. Mais il est évident qu'elle est la seule voie conduisant, ou pouvant conduire, à la paix dans cette partie du monde. D'où cette idée de simple bon sens selon laquelle les puissances exposées de façon très directes aux retombées du chaos libyen, en Europe du sud notamment, feraient bien d'accorder la plus grande attention aux démarches décidées vendredi à Brazzaville.

Directement responsables du drame qui se joue depuis des mois sur la rive sud de la Mer Méditerranée la France, l'Angleterre et dans une moindre mesure l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne doivent soutenir le processus de réconciliation initié par l'Union africaine. Si elles ne le font pas elles paieront demain au prix fort les conséquences humaines du chaos libyen et achèveront de se déconsidérer aux yeux des Africains qui les jugent à juste titre responsables du désordre présent.

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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