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L’ethnie n’est pas soluble dans la république

Mercredi 29 Janvier 2014 - 0:01

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La république n’est pas une simple juxtaposition d’institutions, une fédération d’ethnies. Elle est aussi un ensemble de valeurs et d’obligations pour les dirigeants et les citoyens qui la composent. Mais la république est souvent mise à mal par nos comportements sectaires, nos dérives identitaires alors que la république est une vision, un contrat.

Une vision partagée par des individus aussi divers que nombreux, différents, mais unis autour des valeurs qu’ils partagent. Parmi ces valeurs, il ya le respect de l’autre, de la différence. Mais il ya aussi la tolérance et l’humilité. Ce sont ces valeurs fondamentales qui nous permettent de nous accepter et de vivre ensemble. Le respect de la différence permet à chacun de vivre sa singularité et celle de l’autre en qui l’on ne voit pas toujours l’enfer. L’humilité nous permet de reconnaître nos insuffisances et le mérite de l’autre.

Ce qui nous permet aussi de constater que nous ne sommes rien sans les autres. En effet, la république est un contrat pour vivre ensemble. C’est ainsi que nous ne verrons pas autrui comme un enfer pour nous, parce que l’enfer ce n’est pas toujours autrui. Il nous faut cesser d’incriminer les autres, de nous enfermer dans l’encroûtement qui est une vision déformée de la relation interpersonnelle décrite par l’écrivain français Jean-Paul Sartre dans sa pièce Huis clos. En effet, s’encroûter c’est se laisser dominer par une habitude qui appauvrit l’esprit, notre esprit républicain qui s’appauvrit par des breuvages ethniques.

Erreur grave que de vouloir croire que notre ethnie peut constituer une rampe de lancement pour nous permettre de gravir les échelons de l’ascension sociale. Cependant, entendons-nous bien, l’ethnie est une réalité sociologique caractérisant une communauté humaine partageant une même réalité linguistique. Elle n’est ni un atout ni un frein pour le développement au sens strict du terme. Mais la différence ethnique s’accentue dans un contexte de misère et de paupérisation généralisée. Les citoyens se réfugient dans l’ethnie quand la république est incapable de leur assurer ce qu’ils espèrent d’elle : l’emploi, la sécurité, la considération, par exemple.

D’autre part, l’ethnie n’est pas une fin en soi. C’est pourquoi ayant choisi la république comme forme d’organisation politique et sociale, nous devons œuvrer pour défendre les valeurs de la république, ses symboles. Parmi ces valeurs, il y aussi l’égalité et la fraternité, la démocratie et l’unité. Si la république reconnaît nos différences, elle proclame par ailleurs que nous sommes tous égaux devant la loi. Cette loi qui fait de nous tous des citoyens congolais jouissant des mêmes droits et devoirs, ce qui nous différencie des sujets de Sa Majesté dans un royaume.

Cette fraternité nous oblige à être unis et solidaires malgré nos différences et nos appartenances ethniques. Cette unité et cette solidarité impliquent une cohérence de nos actions communes. Cela est fondamental dans la conception et la mise en œuvre des politiques de développement du pays. Car il faut toujours savoir par où commencer et pourquoi. Ce n’est pas une attitude discriminatoire que de commencer la mise en œuvre d’un projet par une région quelconque si cela est nécessaire pour mieux impacter le projet et assurer ainsi son efficacité.

De la sorte, nos projets de développement ne seront jamais une ristourne ethnique. Parce que l’ethnie n’est pas soluble dans la république. Quand on est commis de l’État, dirigeant politique, on est au service de l’intérêt général. Le galon, la fonction ou le titre ne sont pas des dons pour une ethnie ou un clan. Mais des missions, des devoirs individuels dont seul le détenteur est responsable devant sa hiérarchie et le peuple. La recherche frénétique de l’équilibre à travers une géopolitique des fonctions est une méthode dépassée, car la république n’est pas une fédération d’ethnies.

Emmanuel Mbengué

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Édition Quotidienne (DB)

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