Littérature : les romans africains de la rentrée littéraire 2020

Vendredi 7 Août 2020 - 14:08

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La rentrée littéraire dans l’hexagone approche. Cette particularité française qui voit les librairies se remplir, entre la fin du mois d’août et d’octobre, des centaines de nouvelles publications. Parmi ces livres en tous genres qui paraîtront dans quelques semaines (plus de cinq cents cette année), on trouvera aussi quelques auteurs originaires d’Afrique. Dans ce numéro, nous vous emmenons à la découverte de trois livres d’auteurs africains.

« Ejo », de Beata Umubyeyi Mairesse/Editions Autrement

Dans ce recueil de nouvelles, Beata Umubyeyi Mairesse, rescapée des tueries de 1994 vivant désormais en France,  donne sa voix aux femmes qui ont traversé cette terrible parenthèse. Onze prénoms de femmes pour onze nouvelles qui disent comment hier hante l’existence des survivants, la reconquête pas à pas de la vie et de soi-même. Ce recueil écrit en français mais ponctué de mots en kinyarwanda, la langue maternelle n’est pas un recueil de nouvelles du génocide comme cette dernière l’explique. « Il y est question de l’avant, l’ejo d’hier, ces années d’espoir et d’inquiétude mêlées, mais il s’agit surtout des jours d’après, l’ejo de demain, de la survivance ».

Point commun reliant tous les personnages, le génocide n’est jamais décrit en tant que tel mais se rappelle à la mémoire au détour de souvenirs, d'objets et reliques de gens aimés mais aussi à travers les séquelles physiques et psychiques de celles qui ont survécu. Et ce fantôme qui plane sur les vies modèle la parole pour exprimer l’innommable. La violence, la colère et la tristesse. La peur logée dans les ventres des années après.

« Black Manoo », de Gauz/ Editions le Nouvel Attila

Quand Black Manoo, junkie africain sans papiers, déboule dans la Belleville des années 90, il n’a pour guides que Lass Kader, son meilleur ami dealer, et Karol, sa belle avec qui il ouvre un bar clandestin. Avec lui, on explore les coulisses d’un quartier ahurissant, et les stratégies d’un immigré tout juste débarqué à Paris pour s’y enraciner, entre rituels mystiques hérités des anciens et petits boulots improbables. Roman-monde qui fait de chaque lieu, de chaque personnalité, le creuset d’un univers, Black Manoo nous amène des troquets de Belleville aux bas fonds d’Abidjan, des commissariats de police du Xle aux caves de Kadhafi. Le destin de Black Manoo pourrait ressembler à cent mille autres mais ne ressemble à aucun.

Black Manoo de Gauz, réunit les deux veines qui ont fait le succès du premier roman de l’auteur « Debout-Payé », à savoir l’autobiographie et l’observation sociale. Gauz d’abord photographe, puis documentariste, réalise des émissions culturelles et des articles pour un journal économique satirique en Côte-d’Ivoire. Depuis le succès de son premier roman, Debout Payé, il vit la moitié de l’année à Grand-Bassam, première capitale coloniale de la Côte d’Ivoire, où démarrait « Camarade papa », son deuxième roman. Dans Black Manoo, il invente à travers des phrases d’une concision électrique, un style littéraire aussi dense et intense que la plus rageuse des musiques.

« Rumeurs d’Amérique », d’Alain Mabanckou/ Plon

Pour la première fois, l’auteur de « Verre cassé » écrit sur les Etats-Unis, son nouveau pays d’adoption, où il vit et travaille. Alain Mabanckou nous ouvre donc les portes de son Amérique, celles de la Californie où il vit depuis une quinzaine d’années, où il enseigne la littérature française, mais aussi où il écrit tous ses romans. Alain Mabanckou nous dépeint dans son style unique les travers de la société américaine. L’opulence de Santa Monica, l’âpre condition des minorités de Los Angeles, le désespoir des agglomérations environnantes, mais également l’enthousiasme d’une population qui porte encore en elle le rêve américain. Faits divers, musique, sport, guerre des gangs, enjeux de la race, habitudes politiques et campagne de l’élection présidentielle, découverte d’endroits insolites, tout est passé au crible par l’auteur pour nous faire le portrait d’une autre Amérique.

Boris Kharl Ebaka

Légendes et crédits photo : 

Photo1et 2: Couvertures des ouvrages

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