Manifestation contre la loi électorale : les Kinois font monter la pression

Lundi 19 Janvier 2015 - 18:15

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Des forces de l’ordre se sont déployées dans plusieurs places publiques de la ville le 19 janvier depuis la matinée afin de déjouer l’appel de l’opposition invitant à une mobilisation générale contre le projet de loi électorale en cours de discussion au Parlement. 

Journée particulièrement agitée que celle vécue par les Kinois le lundi. Une journée essentiellement marquée par le mot d’ordre de l’opposition appelant à une marche de protestation contre le projet de modification de la loi électorale en cours d‘examen dans les deux chambres législatives. L’invitation à la contenance des autorités qui tenaient à déjouer le plan de l’opposition à grand renfort médiatique n’a pas produit l’effet escompté sur une population kinoise visiblement acquise à la cause des anti-révisionnistes. Redoutant le déferlement de la population vers le siège du Parlement nonobstant le fait que ladite loi querellée avait été votée le 17 janvier, l’autorité provinciale de la police avait pris des dispositions sécuritaires importantes.

Les grands carrefours de la ville étaient quadrillés par les forces de l’ordre. Des policiers et militaires de la garde républicaine armés jusqu’aux dents déployés par dizaines tenaient en respect les passants aux alentours du Palais du peuple. Toutes les avenues menant vers l’hémicycle étaient interdites d’accès obligeant ainsi les conducteurs à faire de longs contours. Expliquant cette forte présence militaire dans la ville, le porte-parole du gouvernement a laissé entendre qu’elle était motivée par le besoin de sécuriser l’arrivée du président angolais Édouard dos Santos attendu le même jour à Kinshasa et protéger le siège du Parlement.

Les premières escarmouches entre les manifestants et les policiers ont eu lieu à l’Université de Kinshasa sur fond de coups de feu et de gaz lacrymogènes. Des étudiants chauffés à blanc ont réquisitionné deux bus Transco avant de les brûler. Puis ils s’en sont pris aux bureaux de deux de leurs professeurs réputés proches de la majorité présidentielle et défenseurs acharnés de la révision constitutionnelle, en l’occurrence Évariste Boshab et Jean Louis Esambo. Ces deux faucons du régime, constitutionnalistes de leur état, ont vu leurs dossiers gardés soigneusement dans leurs cabinets situés dans l’enceinte de l’université partir en fumée. Transformé en une place forte, le rond-point Ngaba, une des voies d’accès menant au campus, était littéralement investi par des policiers.   

Un scenario qui a eu un effet d’entraînement dans d’autres sites universitaires et académiques tels que l’UPN, l’Ista/Ndolo, l’ISC, etc où des étudiants devraient en découdre à l’arme blanche avec des policiers armés. Ces derniers les ont tenus à l’œil tout au long de la journée. À l’est de la ville, précisément dans les communes de Ndjili, Masina et Kimbaseke, l’agitation était également perceptible à l’image des pneus brûlés et des barricades de fortune érigés pour gêner la circulation des patrouilles de la police. À la place Victoire, sur l’avenue ex-24 novembre dans la commune de Ngiri-Ngiri, à Bandalungwa vers l’avenue Assolongo, aux alentours du rond-point Ngaba, à Yolo-Ezo dans la commune de Kalamu, l’effervescence était perceptible pendant que dans  certains quartiers c’était le calme plat.  

Dans la foulée, des hélicoptères survolaient la ville sur fond des vrombissements dissuadant ainsi de nombreux kinois à ne pas sortir. Moralité : Kinshasa a ressemblé, le temps d’un éclair, à une ville morte. Des avenues entières vidées de leur monde, des magasins et boutiques fermés, des écoles, des hôpitaux et l’administration publique fonctionnant au ralenti. Tel était le tableau quasi apocalyptique offert par la capitale ce lundi 19 janvier. Ce n’est qu’en début d’après-midi que la situation a commencé à se stabiliser.

Comme qui dirait, le fossé entre les institutions enfermées dans leur tour d’ivoire et le peuple qui aspire à l’alternance, ne fait que se creuser davantage. De quoi craindre pour la suite du processus électoral en RDC. Quelques témoins affirment qu’il y a eu mort d’homme notamment dans la commune de Lemba sans en fournir toutefois des explications plausibles.  

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Une patrouille de la garde republicaine sillonnant la ville