Médias : RSF note un recul de la liberté de la presse

Mercredi 25 Avril 2018 - 16:30

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Dans son rapport annuel publié le 24 avril, portant sur l'édition 2018 de son classement, l'ONG estime que la liberté de la presse s'est encore dégradée dans le monde.

L’édition 2018 du classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF) témoigne de l’accroissement des sentiments de  haine à l’encontre des journalistes. « La haine du journalisme menace les démocraties, y compris en Europe et aux Etats-Unis », révèle le document.

L’ONG note que « de plus en plus de chefs d’Etat, démocratiquement élus, voient la presse non plus comme un fondement de la démocratie mais comme un adversaire ». RSF dénonce également « un climat délétère qui touche même les pays en haut du classement ». La Norvège et la Corée du Nord conservent, respectivement, la première et la dernière places du classement.
« Vingt-et-un pays sont désormais placés en situation très grave, un niveau record. L’Irak rejoint cette catégorie, où figurent des régimes autoritaires comme l’Egypte (161e), la Chine (176e) ou la Corée du Nord, toujours en 180e  et dernière position », indique cette ONG.

Ce phénomène touche, selon RSF, « des démocraties aussi différentes que les Philippines (133e ), avec le président Duterte, qui prévient qu'être journaliste ne préserve pas des assassinats, qu'en Inde (138e ) où des armées de trolls à la solde des partis politiques appellent à la haine des journalistes, ou les Etats-Unis, où Donald Trump les qualifie d’ennemis du peuple, une formule prisée par Staline ».
La France ne fait pas exception. Bien qu'elle progresse de six places, au 33e rang, un mouvement lié principalement au recul de plusieurs pays voisins, RSF y relève que « le mediabashing ou le dénigrement systématique de la profession par certains leaders politiques a connu son paroxysme pendant la campagne électorale de 2017 ».

Pour RSF, ce climat délétère envers la presse sape l’un des fondements essentiels des démocraties. « Ceux qui récusent la légitimité des journalistes jouent avec un feu politique extrêmement dangereux. Les démocraties ne meurent pas que par des coups d'Etat mais elles peuvent mourir aussi à petit feu, et l'une des premières bûches, c'est généralement la haine envers les journalistes », prévient RSF.
L’organisation cible les dirigeants de pays de l’Europe centrale à l’image de la Serbie, qui perd dix places (76e position), ou de la Hongrie (73e position) où le Premier ministre, Victor Orban, accuse les médias indépendants de discréditer son pays « auprès de l’opinion internationale ».

L’ONG s’inquiète également des récents assassinats de deux journalistes d’investigation survenus en Slovaquie et à Malte, où Daphne Caruana Galizia a été tuée pour avoir enquêté sur la corruption politique dans l’Ile. Un meurtre qui aurait également « levé le voile sur le harcèlement judiciaire » que peuvent subir les reporters car, avant son assassinat, elle avait été visée par quarante-deux procès en diffamation au civil et cinq au pénal.
 

L’Afrique  recule-t-elle en matière de liberté de la presse ?

Cette année pour laquelle l’ONG note une montée dangereuse de la haine des journalistes, la situation du continent africain offre un panorama des plus paradoxaux.
L’Erythrée (179e) est l’avant-dernière nation du classement, juste devant la Corée du Nord, comme en 2017. Le Soudan est 174e comme l’année dernière, juste derrière Djibouti, qui a perdu une place par rapport au précédent classement pour se classer 173e en 2018. La Guinée équatoriale (171e), la Somalie (168e), la Libye (162e) et l’Egypte (161e), présentes parmi les vingt-et-une nations dont la situation est étiquetée par RSF, font de l’Afrique un des continents les plus « liberticides » pour les professionnels de la presse.
Pourtant, le Ghana (22e), meilleur élève du continent, ainsi que la Namibie (26e), l’Afrique du Sud (28e) et le Cap-Vert (29e) sont mieux classés que l’Espagne (31e), la France (33e), le Royaume-Uni (40e) et les Etats-Unis (45e).

Tout compte fait, en dehors de quelques pays, RSF remarque que très peu de nations africaines ont reculé au classement. Néanmoins, des chutes comme celle de la Mauritanie, passée de 55e en 2017 à 72e cette année, ainsi que celle de la Tanzanie (93e) ayant reculé de dix places par rapport au précédent classement, interpellent.
Pour RSF, la dégradation de la situation de la presse est un problème planétaire, causé par une montée de la « haine du journalisme » à l’échelle mondiale.
 

Yvette Reine Nzaba

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