NBA : Serge Ibaka est champion

Jeudi 20 Juin 2019 - 21:03

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C’est l’histoire folle d’un gamin qui un jourau cœur de l’Afrique, a levé les bras au ciel et a dit : « Mon Dieu, si tu es vraiment là haut et que tu m’écoutes, laisse-moi toucher une étoile dans mes mains ». Et le Seigneur qui l’écoutait l’a fait attendre patiemment pendant plus de vingt ans avant de lui laisser toucher son étoile.

Cette étoile, c’est celle de Serge Ibaka qui, dix ans après son arrivée en NBA, le plus grand championnat de basket au monde, est sacré champion. C’est l’histoire d’un Congolais parti de rien, qui a désormais son nom inscrit sur le mur des « champions NBA » aux côtés des Michael Jordan, Lebron James, Kobe Bryant, Hakeem Olajuwon, Wilt Chamberlain, Stephen Curry et autres légendes.

A l’issue d’une finale à rebondissement, les Raptors de Toronto ont fini par vaincre les champions en titre, les Warriors de Golden State lors du match 6 (114 – 110) pour remporter le premier titre de leur histoire. Un titre ou une étoile remportée par une franchise canadienne aux connotations très africaines, avec pas moins de cinq originaires du continent dans ses rangs, tant à la fois comme joueur et comme dirigeant. Le pivot congolais n’a pas été en reste lors de ce match 6 avec une belle ligne de stat : quinze points ; trois rebonds et deux passes. Ce premier sacre de Serge Ibaka dans l’élite du basket, l’année de ses 30 ans, est l’aboutissement d’une vie dédiée au sport qu’il aime et qu’il pratique chaque jour depuis l’âge de 7 ans, avec une joie et une passion infinie.

L’enfant du Congo sur le toit de la NBA

Ne lui demandez surtout pas de choisir de quel « Congo » il est originaire. C’est l’enfant des deux rives ; Brazzaville par son père et Kinshasa par sa mère. Eux-mêmes, anciennes gloires du basket dans leur pays respectif. Le fils a donc eu les bons gènes. Un jour, lors d’une interview, il a d’ailleurs déclaré : « Je pense que Dieu m’a envoyé sur terre pour jouer au basket. Comment je le sais ? Lorsque j’étais ado, ma vie a changé grâce à une compétition que j’ai disputée avec l’équipe nationale du Congo en Afrique du Sud. La suite, j’ai eu le sentiment que c’était un miracle ».

Le parcours de Serge Ibaka a, en effet, tous les contours du conte magique que le grand-père raconte la nuit au village autour du feu. A l’âge de 12 ans, le jeune Serge est quasiment un enfant de la rue à Brazzaville. Il a perdu sa mère très tôt et son père est lui-même empêtré dans ses problèmes. Le gamin doit apprendre à survivre par ses propres forces. La pratique du basket sur le terrain de l’équipe « Avenir du rail », à Ouenzé, est son refuge. La suite du conte magique est racontée par Ibaka lui-même : « Nous nous étions qualifiés avec l’équipe nationale du Congo pour le tournoi final en remportant un tour préliminaire, mais j’avais le sentiment que nous n’irions jamais le disputer. Voyager jusqu’en Afrique du Sud ? Qui allait payer pour ça ? L’idée semblait irréaliste. Quand mon père jouait au basket à mon âge, il n’a jamais eu l’opportunité de jouer une telle compétition. Il était dans l’équipe nationale mais la fédération ne payait jamais les déplacements de l’équipe juniors. Mais avec la grâce de Dieu, la fédération de basket a accepté de nous laisser partir. J’étais dans la première équipe U15 du Congo qui a voyagé pour une compétition continentale.

C’était vraiment la chance d’une vie. C’est la première fois que je prenais l’avion. Je n’avais aucune idée de ce à quoi m’attendre. Au tournoi, nous avons joué contre des pays qui avaient misé bien plus sur leur programme de basket. Nous affrontions des équipes qui étaient meilleures comme l’Angola et le Nigeria, qui allaient régulièrement en Europe pour disputer des compétitions. Lors du tournoi, j’ai joué à un niveau que je ne me pensais pas capable d’atteindre. C’était comme une expérience extracorporelle. Je réussissais des points de dingue et je revenais en défense en courant en me disant : « Mais comment est ce que j’ai fait ça ? » Lors de notre premier match face à l’Afrique du Sud, j’ai compilé dix-neuf rebonds, douze contres et vingt-sept points. Malgré le fait que j’affrontais les meilleurs joueurs du continent, je jouais le meilleur basket de ma vie.

J’ai fini meilleur joueur du tournoi, avec le plus de points, de rebonds et de contres. Avant ça, personne ne savait vraiment qui j’étais. Mais comment le pouvait-ils ? Et ces matchs ont changé ma vie. En regardant en arrière, c’était comme si ce tournoi avait été fait pour moi. C’était Dieu qui ouvrait une porte et lançait : « Avance pour venir chercher ton étoile ». Je jouais si dur et j’étais tellement concentré que je n’avais même pas pensé qu’il y aurait des scouts en Afrique du Sud. Ma performance, c’était de la joie pure. Mais il y avait des scouts. Rapidement, je me suis trouvé à faire mes valises pour quitter le Congo en direction de l’Espagne pour poursuivre une carrière de basketteur professionnel ».

Plus de dix ans au top niveau

Serge Ibaka est arrivé en NBA en 2009, sélectionné par l’équipe d’Oklahoma City, où il a évolué aux cotés de Kevin Durant. Ses qualités de contreur ont rapidement fait de lui un des meilleurs défenseurs de la NBA. Il quitte Oklahoma City en juin 2016, pour rejoindre les « Magic » d’Orlando. Quelques mois plus tard, en février 2017, il atterrit dans le nord canadien chez les Raptors de Toronto. Deux ans plus tard, le voici champion NBA avec cette équipe au sein de laquelle évoluent deux autres africains comme joueurs : le Camerounais Pascal Siakam et le Nigérian Anunoby. Lors de son prochain séjour dans son pays natal, celui qu’on surnomme en Amérique « Air Congo » et qui faisait déjà la fierté nationale en étant le premier Congolais à avoir pu réussir en NBA, débarquera à présent avec une bague de champion au doigt, et certainement aussi avec un message simple à la jeunesse : ne jamais cesser de croire en ses rêves.

 

Boris Kharl Ebaka

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