Nouvelle page

Ce n’est pas encore certain, mais il semble qu’une nouvelle page soit sur le point de se tourner entre l’Afrique et les États-Unis. Pas certain dans la mesure où l’Oncle Sam n’a pas, jusqu’à présent, manifesté un intérêt soutenu pour le continent ; possible si l’on décrypte bien les signaux qui fusent depuis la Maison Blanche, le Département d’État ou le Pentagone à l’approche du sommet qui doit réunir une cinquantaine de chefs d’État autour de Barack Obama.

Imprégnés jusqu’à présent de l’idée – fausse bien évidemment – selon laquelle les intérêts de l’Amérique se situent pour l’essentiel en Europe, en Amérique latine et, dans une moindre mesure, en Asie, les locataires successifs de la Maison Blanche ne se sont guère souciés de nouer des relations privilégiées avec l’Afrique. Ils ont commis de lourdes erreurs en ne se ralliant que très tard à la lutte contre l’apartheid, en laissant leurs entreprises prospérer sur les tensions ethniques, en soutenant les sinistres « fonds vautours » qui pillaient les finances des jeunes États africains, en s’abstenant d’aider la communauté internationale à résoudre les conflits qui déchirent des pays comme la République Démocratique du Congo, bref en faisant l’inverse de ce que la morale ou la raison aurait dû leur dicter.

La percée de la Chine sur le continent et l’affaiblissement simultané des puissances européennes leur ont récemment ouvert les yeux. Et cela, d’autant plus que la dégradation continue de la situation au Proche et au Moyen Orient leur fait craindre aujourd’hui de se trouver piégés dans des conflits sans fin et sans issue. D’où l’intérêt soudain que leurs dirigeants accordent à l’Afrique et le soin avec lequel ils préparent la grand’messe qui sera célébrée à Washington dans les prochains jours.

Disons, sans attendre de connaître la suite des évènements, que notre continent a tout à gagner en aidant les États-Unis à écrire cette nouvelle page de leur Histoire. Mais ajoutons tout aussitôt qu’il devra faire preuve d’un grand pragmatisme car les Américains sont eux-mêmes des gens pratiques, qui poursuivent des objectifs précis et qui ne s’encombrent pas de nobles discours lorsque leurs intérêts sont en  jeu. Ils jugeront sur pièces ce qui leur sera proposé avec, en ligne de mire, les profits politiques, diplomatiques, financiers qui pourraient naître de cette coopération. Mieux vaut s’en convaincre aujourd’hui que le découvrir demain.