Portrait : donner le goût du travail aux femmes, tel est le leitmotiv d’Elizabeth Moukoula

Jeudi 11 Avril 2019 - 23:15

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Forte poignée de main, maman Eli, comme la surnomme son entourage, dévale les pistes de son domaine en sifflotant. Une fois sur ses terres, elle enfile ses bottes, fait un petit tour dans l’étable et entre dans l’un de ses sept étangs où toute sorte de plantes envahit la surface. C’est dans cet environnement qu’Elizabeth, la quarantaine, se sent vivre. Rencontre avec une femme inspirante et passionnée de la nature.

Propriétaire du site depuis 2001, cet endroit est devenu sa planche de salut. « Je peux passer des heures et des heures ici, j’oublie tout », évoque Elisabeth qui a été conquise dès le premier jour où elle a foulé ses pieds sur ce site en 2000, où elle venait d’être nouvellement affectée en tant qu’enseignante à Madingou Gare. « Mon père fut pisciculteur, éleveur, agriculteur et exploitant forestier. J’ai toujours été entourée d’animaux et de la terre. Notre maison était toujours remplie de nourriture et cela profitait à tout le village », a fait savoir Elizabeth.

Eprise de ce site, elle l’acquiert en épargnant chaque mois sur son salaire, puis invite les femmes en détresse à travailler avec elle. Si, au départ, ces femmes hésitent et sont peu enthousiastes, aujourd’hui, elles ne cessent de lui faire des éloges. « Grâce à la présidente, j’ai appris à ne pas abandonner quand bien même je ne voyais pas le bout du tunnel », a déclaré VivianeTamba, une des membres du site.

« De nombreuses femmes se disputent avec leur mari pour l’argent de popote, l’habillement, la scolarisation des enfants alors que ces dernières peuvent prendre soin d’elles en apprenant un travail, ou en travaillant tout simplement la terre », a indiqué la jeune femme, visiblement attristée par le comportement de certaines d’entre elles dans la société. Aussi a-t-elle pensé à unir les femmes autour d’une association nommée Groupement agro- pastorale des jeunes solidaires, qui a pour objectifs, entre autres, d’inculquer des valeurs de responsabilité, de confiance en soi, d’esprit d’initiatives aux femmes afin qu'elles les transmettent aux générations futures.

Une longue et pénible marche, se souvient Elizabeth, puisque chemin faisant, son mari l’abandonne avec ses cinq enfants parce qu’il ne partageait pas sa vision. « Quand une personne t’empêche de réaliser tes rêves, le mieux est de se séparer d'avec elle sinon, je ne serai jamais devenue la femme épanouie que je suis aujourd’hui », a-t-elle souligné dans un éclat de rire.

En outre, lors des grandes vacances, cette éducatrice dévouée et plein d’amour ouvre ses portes aux orphelins et à tous les enfants qui désirent travailler sur son site, en leur attribuant une petite rémunération pour les aider à financer leur rentrée scolaire. Lors de ces séances de travail, elle conscientise tout particulièrement l’adolescente sur l’autonomie financière qui, dit-elle, « est un grand pouvoir et qu’il faille pour cela travailler au lieu d’aller çà et là se faire les poches, avec le risque d’être infectées par le VIH-sida ».

Une initiative que le voisinage salue et encourage car, comme l’a fait savoir Hermann Soki, un voisin du site, « cela donne l’opportunité à l’enfant de goûter au bonheur du travail ainsi qu’à ses avantages ». Réduire donc la pauvreté via les métiers de la terre (maraîchage, agriculture et autres) est une grande joie pour Elizabeth Moukoula. Un combat de longue haleine « puisque les mentalités, les barrières culturelles empêchent encore les femmes de s’émanciper et d’être financièrement autonomes », a-t-elle conclu.

Berna Marty

Légendes et crédits photo : 

Elizabeth Moukoula

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