Portrait. Mpay Kemboly, l’égyptologue congolais

Samedi 21 Octobre 2017 - 14:15

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Le doyen de la faculté de philosophie de l'université Loyola du Congo est, depuis 2010, membre du secrétariat du Supérieur général des Jésuites pour le dialogue œcuménique et les relations interreligieuses au sein de la Curie jésuite à Rome (communauté des jésuites). Dans ce secrétariat, composé de 9 jésuites, il s’occupe des relations entre le christianisme et les religions africaines ou religions locales.

Docteur en égyptologie de l’université d’Oxford, le père Mpay Kemboly est professeur de philosophie à l’université Loyola du Congo et au département des sciences historiques de l’université de Kinshasa, où il enseigne une partie d’égyptologie. L’auteur de l’ouvrage « La question du mal dans l'Egypte ancienne » est également professeur à temps partiel à l’université catholique du Congo. Après ses études secondaires au collège Bonsomi à N’djili, il a effectué son noviciat au Rwanda pendant deux ans. Par la suite, il est rentré en République Démocratique du Congo où il a effectué trois ans de graduat et ensuite deux ans de philosophie à la faculté de philosophie Saint-Pierre-Canisius, entre 1992 et 1994. Après les périodes probatoires jésuites, le père Mpay rejoint Rome pour effectuer le premier cycle de théologie à l’université pontificale grégorienne entre 1995 et 1998. En deuxième année, il s’inscrit, de manière exceptionnelle, à la faculté des langues orientales de l’institut biblique de Rome, où il a étudié l’ancien égyptien et le copte. Après trois ans de graduat en théologie, il intègre l’université d’Oxford, en Angleterre, pendant deux ans (1998-2000) et travaille sur le thème « La violence et la protection dans les plus vieux textes de l’Egypte ancienne, surtout le texte des pyramides », lors de son master en égyptologie, qui était rattaché au département « Ancien proche orient et Egypte ancienne ». Après le master, le père Mpay s’inscrit au doctorat, qu’il effectue pendant 5 ans. « J’ai travaillé sur la question du mal dans l’Egypte ancienne depuis les textes datant du 24e siècle avant Jésus-Christ aux textes du 2e siècle après Jésus-Christ », explique-t-il. En 2006, celui-ci est nommé professeur à la faculté de philosophie Saint-Pierre-Canisius à Kimwenza et occupe en même temps le poste de directeur-adjoint de la bibliothèque, avant d’en devenir directeur, poste qu’il occupera pendant 7 ans, jusqu’en 2015. « Pendant ce temps, j’étais professeur visiteur ailleurs. En 2008, notamment, j’ai été professeur de la faculté de philosophie d’Arrupe au Zimbabwe et j’ai également enseigné à notre Institut de philosophie saint-Paul de Madagascar, à Antananarivo. Je suis doyen depuis 2014, j’en suis à mon deuxième mandat », fait savoir le père jésuite.

L’égyptologie comme passion.

Pour le père Mpay Kemboly, l’égyptologie est une passion. « J’ai fait la philosophie africaine, comme tout autre étudiant au graduat, je n’ai pas été très content du traitement que l’on a fait de la pensée africaine. Je l’ai fait par passion car je voulais être libre. Je ne voulais pas ignorer tout ce que les Africains ont fait. La philosophie, telle que je l’ai apprise, était beaucoup plus une louange de ce que les occidentaux avaient réalisé. Or, nous avions appris que l’Egypte était la plus vielle civilisation de l’Afrique et l’une des vielles civilisations au monde. Je trouvais important, pour nous Africains, de nous approprier ce passé légitime africain pour nous aider à être libres. Au-delà de cette démarche intellectuelle, c’était surtout un parcours de vie, une longue marche de liberté et de fierté », explique le jésuite. Ce parcours académique en égyptologie lui permet d’être, depuis 7 ans, l’un des plus proches conseillers du Supérieur général des jésuites sur la question des relations entre le christianisme et les religions africaines ou religions locales. « Je réalise un travail de monitoring sur ce qui se passe dans la Compagnie de Jésus et en Afrique. J’organise une banque de données et apporte des informations. Mais nous devons également répondre à certaines questions soumises par le père général, notamment sur un sujet tel que le fondamentalisme religieux ou culturel », fait savoir l’égyptologue congolais. Pour ce dernier, les religions traditionnelles africaines ne doivent pas être abordées de la même manière que les autres religions car l’élément culturel y est assez présent. « Nous n’avons pas de religions très missionnaires. Chez nous la religion est une manière de vivre, de nous rapporter aux êtres, aux choses, aux mots et aux personnes. Il faut un appareillage conceptuel et épistémologique assez fin et subtil pour comprendre ce qui se passe même dans les religions chrétiennes indépendantes », conclut le père Mpay, tout en rappelant que parler de religions traditionnelles africaines n’équivaut pas à parler de quelque chose qui est dépassée.

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

Photo1 Père Mpay Kemboly; Photo2: La couverture du livre du père Mpay

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