Prisons de Kinshasa : l’Asadho plaide pour la protection des droits fondamentaux

Mardi 11 Mars 2014 - 15:00

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Pour l’ONG, cette action devra passer par le respect des instruments nationaux et internationaux relatifs aux droits de l’homme

L’Association africaine pour la défense des droits de l’homme (Asadho) a présenté, le 11 mars au cours d'une conférence de presse tenue au Centre Carter, son rapport sur la situation des prisons à Kinshasa. Ce travail réalisé d’octobre à novembre 2013 est intitulé : « Sortez- les de la prison ». Pour le président de cette ONG, Mè Jean-Claude Katende, cet exercice rentre dans le cadre de sa mission, de contribuer à l’avènement d’un état de droit en RDC.

Le rapport présenté a considéré la situation de quelques catégories de prisonniers dont les militants des partis politiques de l’opposition et les femmes. Alors que ce travail a été suscité, de l’avis de Mè Katende, le besoin de contribuer à l’amélioration des conditions de détention dans les cachots et prisons de Kinshasa, l’ONG a noté la recrudescence d’arrestations et détentions illégales depuis les élections de 2011, les violences faites contre les femmes prisonnières, qui ne font pas l’objet des poursuites judiciaires, ainsi que le régime carcéral trop rigoureux auquel certains prisonniers sont soumis.

Un constat sombre

L’Asadho relève, en fait, que depuis la mort du président Laurent-Désiré Kabila (LDK), en passant par les élections de 2006, les prisons sont remplies de personnes condamnées mais qui n’ont pas bénéficié des procès équitables, d’une part, et des personnes poursuivies mais qui n’ont jamais été présentées devant les juges.

L’ONG a également noté que plusieurs personnes sont en prison parce qu’accusées d’avoir participé aux mouvements insurrectionnels « qui n’ont pas réellement existé ». Pour l’Asadho, en effet, le fait que les personnes arrêtées pour ce motif soient majoritairement des ressortissants de la province de l’Équateur, augmente son doute sur l’existence réelle de ces mouvements. Cette association conclurait à une chasse aux ressortissants de cette province soupçonnés d’avoir des idées de renverser le président Joseph Kabila.

L’Asadho a souligné que les prisonniers, objet de son rapport, ont subi plusieurs injustices qui doivent être réparées. Selon l’ONG, cette réparation peut consister à les traduire directement devant leur juge, à les libérer ou à leur accorder la liberté conditionnelle ou l’amnistie.

Ce rapport qui ressort des études menées pendant près de deux mois sur terrain par des enquêteurs de l’Asadho dénonce le dysfonctionnement de la justice.  L'association signale la présence, dans les prisons, de personnes dont la procédure traîne alors qu'elles devaient déjà être présentées devant le juge naturel.  D’autres personnes en détention n'ont pas leurs dossiers régulièrement constitués. L’ONG a également noté le retard de l’instruction de certaines causes, la divulgation des informations relatives aux enquêtes et la violation du principe de présomption d’innocence due aux interférences des autorités politiques dans les dossiers.

un agir nécessaire

Face aux réalités relevées, l’Asadho recommande au chef de l’État de veiller au traitement égal et juste des tous les Congolais par les services de sécurité et les juridictions civiles et militaires, qui doivent également agir de manière républicaine. L’ONG exhorte également le président de la République, de refuser de promulguer toute loi d’amnistie qui ne prendrait pas en compte la situation de tous les prisonniers identifiés dans son rapport, de faire cesser la chasse aux proches de Jean-Pierre Bemba et d’accorder la grâce aux personnes citées dans l’assassinat du président LDK.

Le Parlement est appelé à veiller au traitement égal de tous les Congolais lors de l’adoption de la loi d’amnistie et d’éviter d’être sélectif et partial dans l’élaboration des lois accordant l’amnistie aux Congolais. Tandis qu’au ministre de la Justice et des droits humains, il est conseillé de veiller au respect des droits fondamentaux de tous les détenus et de procéder au contrôle de la situation de tous les détenus afin que ceux qui n’ont pas de dossiers soient libérés.

La justice militaire a été exhortée, quant à elle, au respect de la constitution et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, dans l’instruction des dossiers judiciaires, particulièrement ceux relatifs aux mouvements insurrectionnels. Elle a également été appelée à libérer ou à traduire en  justice toutes les personnes dont la garde à vue a dépassé le délai constitutionnel.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Photo 1: Mès Patrick Nsasa et Jean-Claude Katende, lors de la conférence de presse. Photos 2, 3, 4 et 5: des journalistes et défenseurs des droits de l'homme.