Projet de loi électorale : l’opposition et la majorité engagés dans un bras de fer

Samedi 10 Janvier 2015 - 13:15

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La nouvelle loi électorale viserait, d’après les députés de l’opposition, le prolongement du mandat présidentiel en subordonnant l’organisation des élections au recensement de la population.

À l’hémicycle du Palais du peuple où se tient la session extraordinaire consacrée principalement à l’examen du projet de loi modifiant et complétant la Loi n° 06/006 du 9 mars 2006 telle que modifiée par la Loi n°11/003 du 25 juin 2011 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales, la sérénité n’est plus de mise. Les travaux se tiennent désormais sous forte tension depuis que le bureau de l’Assemblée nationale a réceptionné le texte de loi visant à modifier l’actuel Code électoral sous prétexte d’en corriger certaines imperfections. Bien avant son examen en plénière, les dissensions se font déjà entendre entre les tenants de la majorité et de l’opposition qui n’émettent plus sur la même longueur d’ondes. Alors que leurs collègues de la majorité attendent sereinement débattre de ce document sensible sorti de leurs officines et porté à bras le corps par Évariste Boshab, un cadre de la mouvance présidentielle réputé pour son allégeance au chef de l’État, les députés de l’opposition y voient une manœuvre sordide de prolonger le mandat présidentielle censé prendre fin en 2016.

Réunis en conclave le 8 janvier au Palais du peuple, les députés des principaux partis politiques de l’opposition (UDPS, UNC, GPLS et leurs alliés) ont unanimement décidé de boycotter l’ensemble des séances qui seraient consacrées à l’examen dudit projet de loi. Le rejet par l’opposition parlementaire de la nouvelle loi électorale se fonde notamment sur des appréhensions liées à la confiscation du pouvoir par la majorité qui tenterait de prolonger le mandat de Joseph Kabila par le biais du recensement par l’Office national d’identification de la population (Onip) présenté dorénavant comme préalable à l’organisation des élections.

Analysant froidement le contenu du projet de loi électoral soumis à l’examen au Parlement, l’opposition y décèle quelques pièges à l’image de l’article 8 qui dans son alinéa 3 stipule que la liste électorale actualisée devra être confectionnée en tenant compte de l’évolution des données démographiques et de l’identification de la population. En outre, trente jours au plus tard avant la campagne électorale, la Céni publie la liste définitive des électeurs par centre de vote avec indication du bureau de vote, précise le projet de loi électoral. Ce qui, de l’avis des opposants, revient à dire que la Céni ne disposera de sa liste électorale qu’après que l’Onip a achevé son travail de recensement administratif de la population. Pour l’opposition parlementaire donc la nouvelle loi électorale proposée par le gouvernement s’avère inopportun étant donné que  le cadre légal en vigueur permet à la Céni d’organiser toutes les élections. D’où la recommandation faite à l’institution électorale de publier rapidement le calendrier électoral global en conformité avec la loi actuelle.

À défaut de la modification de la Constitution, les stratèges de la majorité auraient opté, selon l’opposition, pour un glissement du calendrier électoral au-delà de 2016. Ils tiennent, pour preuve, la suppression de la référence à l’enrôlement et à l’identification des électeurs, tâche à laquelle s’attelait jusque-là avec bonheur la Céni. Entre-temps, les opérations préliminaires de cartographie lancées par le ministère du Plan pour obtenir les chiffres et les caractéristiques de la population congolaise ont été reléguées aux calendes grecques du fait de la création de l’Onip. En outre, font observer les députés de l’opposition, le recensement administratif duquel seront extraites les listes électorales retarderait d’au moins trois ans les échéances électorales en RDC du fait de sa complexité et de sa réalisation dans un pays aux dimensions continentales souffrant, par ailleurs, d’un déficit des voies de communication.

Alors qu’à la majorité, l’idée d’un passage en force du nouveau Code électoral est envisagée faisant ainsi fi des incartades de l’opposition, cette dernière qui n’entend pas se laisser faire exhorte les partenaires au développement d’aider le peuple congolais à sauver la démocratie qui tend véritablement à être menacée dans le pays. Comme quoi, les prochains jours s’annoncent remuants sur la scène politique congolaise sur la question électorale.

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Le Palais du peuple