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Que font les Sud-Soudanais?

Dimanche 15 Juillet 2018 - 16:45

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Sept années d’indépendance dont cinq d’une guerre civile meurtrière toujours en cours, le Soudan du Sud ne s’avoue pas vaincu par les atrocités du conflit. Il n’est pas pressé de conclure la paix. Ses dirigeants ne regardent pas autour d’eux pour voir que leurs voisins mettent tout en œuvre pour engager leurs peuples sur la voie du développement. Ils ne voient pas se nouer ce rapprochement inattendu mais spectaculaire entre l’Ethiopie, leur grand voisin de l’est, et l’Erythrée à l’extrême est de la Corne de l’Afrique. Ennemis de vingt ans, Addis-Abeba et Asmara célèbrent ces jours-ci leur lune de miel à la grande satisfaction de leurs peuples et de la communauté internationale. Ce dénouement ne peut-il pas inspirer le président Salva Kiir et son rival, l’ex-vice-président, Riek Machar ?

Depuis l’éclatement de la guerre civile au Soudan du Sud, en 2013, après seulement deux ans l’indépendance, toutes les médiations ont échoué. Qu’elles aient été conduites par l’Union africaine, directement, ou par les instances sous-régionales (le cas de l’Autorité intergouvernementale pour le développement –Igad), la finalité reste la même : les protagonistes du conflit répondent présents aux invitations des médiateurs, concluent une série de cessez-le-feu, dont un accord de paix, le 26 août 2015, mais se relancent aussitôt dans la guerre. L’image montrant le chef de l’Etat, coiffé de son sombrero à large bord, et son ancien adjoint, large sourire, se serrer la main, a fait le tour du monde. Mais elle semble la preuve de l’échec en politique.

Derrière cette avalanche de cessez-le-feu sans suite au Soudan du Sud se cache pourtant une réalité effroyable : un peuple qui aspirait enfin à vivre en paix à l’issue d’un processus de libération forgé dans la douleur pendant des décennies, est pris au piège par ses propres gouvernants. Ceux-là même qui s’étaient présentés, le 9 juillet 2011, jour de l’indépendance, comme les héritiers d’un combat commun, duquel chacun était en droit d’attendre protection et prospérité. Le cauchemar d’enfants tués par les armes à feu et la famine, d’habitations incendiées ; d’hommes et de femmes massacrés pour leur appartenance ethnique, de bien d’autres contraints à l’errance ne fait-il donc que commencer ? N’a-t-il pas duré trop longtemps ?

A l’occasion d’une énième promesse de paix faite, le 7 juillet à Kampala, en Ouganda, les belligérants sud-soudanais se sont mis d’accord sur un nouveau partage du pouvoir. Dans ce cadre, Riek Machar redeviendrait vice-président, fonction qu’il avait perdue il y a cinq ans, et qui explique en grande partie le malheur que vit le plus jeune Etat du monde. A l’époque, le président de la République, Salva Kiir, l’accusait de vouloir le renverser. En attendant que cet arrangement avec l’opposition armée s’applique, le parlement a voté le prolongement du mandat du président Kiir jusqu’en 2021. Une façon pour le chef de l’Etat de se manager un rapport de force en sa faveur et continuer à peser sur le pénible processus de sortie de crise. Cela veut peut-être aussi dire que la population sud-soudanaise doit encore suivre un long chemin de croix avant d’espérer de ses dirigeants un tout petit répit.

Gankama N'Siah

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Édition Quotidienne (DB)

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