Quel avenir pour l’opposition congolaise ?

Vendredi 14 Mars 2014 - 13:16

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La question vaut la peine d’être posée au regard de la déconfiture que connaissent les partis politiques de l’opposition. Regroupées au sein de plates-formes en vue de mener de front le combat politique, ces organisations se fragilisent peu à peu pour devenir des « coquilles vides ». Décryptage…

À l’approche des élections locales et sénatoriales prévues cette année, le Front des partis de l’opposition congolaise (FPOC), l’Alliance pour la République et la démocratie (ARD) et d’autres plates-formes politiques proches de cette obédience ne semblent pas mobiliser les potentiels électeurs. En revanche, des personnalités, par ailleurs leaders d’opinion, se distinguent par des sorties médiatiques fracassantes.

Dans cette période préélectorale, les sorties médiatiques de l’opposition devraient être la résultante d’échanges avec les potentiels électeurs pour les convaincre de rallier sa cause en tant que contrepoids positif du pouvoir. Or, les partis politiques se réclamant de l’opposition n’affichent aucune ambition de se lancer à l’assaut des militants à travers le territoire national.

En démocratie, un parti ou groupement politique peut mesurer ses chances de se voir élire à la magistrature suprême à partir des autres consultations politiques électorales, à savoir les élections locales, sénatoriales et législatives. Ces scrutins permettent de s’assurer de l’adhésion des populations à la vision politique que porte un parti ou groupement politique. Les observateurs constatent que les organisations politiques congolaises ne parviennent pas encore à intégrer cette dimension dans leur fonctionnement.

Le FPOC a touché le fond quand, au cours de sa dernière conférence de presse organisée à Brazzaville, son président Rigobert Ngouolali s’est plaint du fait que le principe de la présidence tournante retenu par le collège des présidents n’était plus respecté. « Je suis presque à ma deuxième année à la tête du FPOC, ce qui est contraire aux textes régissant notre plate-forme politique. Lorsque je convoque le collège des présidents pour la préparation d’une assemblée générale élective, personne ne vient », a-t-il déclaré à la presse, avant d’ajouter qu’il leur manquait le courage d’annoncer officiellement la mort du FPOC.

Même chose du côté de l’ARD. Son président, l’ancien ministre des Finances Mathias Dzon, s’appuie, depuis près de deux ans, sur le Collectif des partis signataires de la déclaration du 17 août 2012 contestant les résultats des élections législatives de cette même année. Les tenants de cette coalition exigent du gouvernement l’organisation d’états généraux de la nation en lieu et place des concertations politiques. L’ARD n’a plus tenu de réunions depuis près deux ans. Certaines formations politiques de l’alliance ont déjà, sans l’annoncer, quitté le navire.

Actuellement, l’opposition congolaise apparaît disparate, regroupée au sein de plates-formes peu significatives : la Convention de soutien aux conclusions de la concertation politique d’Ewo ; l’Opposition républicaine ; l’Union pour la Nation, l’Alliance des sociaux-démocrates du Congo… L’expérience a montré que lorsque le combat politique est mené dans l’unité, les victoires sont obtenues avec plus de sûreté.

Conscient du problème, Dominique Basseyila, le président de l’Union pour la restauration du Congo — dernier né des partis politiques de l’opposition —, invitait, à l’occasion de la sortie officielle de son mouvement, tous les leaders politiques de l’opposition à s’unir pour espérer gagner les futurs combats politiques.

Le même discours est souvent revenu dans les interventions de Bonaventure Boudzika, secrétaire général du Congrès pour la démocratie et la République, autre formation de l’opposition, qui déclarait : « Plus unis, les partis politiques de l’opposition joueront leur rôle de contrepoids au pouvoir. Désunis, ils ne seront que des faire-valoir. » Cette idée est souvent émise par le premier secrétaire de l’Union panafricaine pour la démocratie sociale, Pascal Tsaty Mabiala, dans ces interventions publiques.

En dépit de toutes ces déclarations ayant parfois valeur d’invite, les partis politiques de l’opposition ne prennent pas la mesure du danger qui les guette : leur effritement total. D’ailleurs, l’opposant en exil en France, Marcel Guitoukoulou, récemment de passage à Kinshasa, a indiqué à la presse : « Il n’y a plus une opposition au Congo-Brazzaville. Il ne reste plus que des leaders d’opinion. » Alors, à quoi ressemblera une démocratie sans opposition efficace ?

Roger Ngombé

Légendes et crédits photo : 

Les membres du Front des partis de l'opposition congolaise (Photo d'archives).