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Quelle politique africaine pour la France ?

Lundi 1 Mai 2017 - 12:30

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Tous les sondages, enquêtes et autres modes d'observation de la scène politique française donnent à penser qu'Emmanuel Macron prendra, dimanche prochain, la succession de François Hollande ; il n’est donc pas trop tôt pour réfléchir à ce que sera la politique africaine du nouveau locataire de l'Elysée.

Venu du monde des affaires où il occupa longtemps un poste de haute responsabilité au sein de la puissante banque d’affaires Rothschild, le nouveau président français est, en effet, un homme pragmatique, rompu aux négociations délicates, qui a les pieds sur terre, que n’inspire pas une vision idéologique du monde moderne même si ses discours semblent démontrer le contraire dans la dernière étape de la campagne présidentielle, qui saura donc peser le pour et le contre des décisions stratégiques à prendre dès le début de son mandat de cinq ans.

Que ceux qui doutent de la justesse de ce diagnostic considèrent la façon dont cet homme d'Etat, qui n'a pas encore quarante ans et qui n'avait jusqu'à son élection aucune expérience en matière politique, a su préparer, puis gérer sa marche vers le pouvoir : la création d’abord  du mouvement "en marche", puis la mobilisation sur toute l'étendue du territoire français de centaines de milliers de partisans jeunes et moins jeunes venus de tous les horizons, la conduite d'une campagne de terrain échappant au carcan des partis politiques, la définition d'un programme rassemblant sous une même bannière les positions apparemment inconciliables de la droite, de la gauche et du centre, bref une approche de la politique politicienne radicalement différente de celle adoptée par ses concurrents.

L'appréhension très réaliste du pouvoir qui a permis à Emmanuel Macron de sortir vainqueur d'une bataille apparemment perdue d'avance donne à penser que, s'il est élu dimanche comme tout le laisse penser aujourd'hui, la politique extérieure de la France pourrait bien changer en profondeur contrairement aux apparences. Non sur les grandes questions stratégiques dont dépend la paix du monde - rapports de force entre les grandes puissances, gestion des conflits directs et indirects qui les opposent en différents points du globe, lutte contre le terrorisme et le fanatisme religieux - mais dans deux domaines essentiels pour la France : l'avenir de l'Union européenne d’une part, les relations avec l'Afrique d’autre part.

° Sur le premier point la relation de confiance qui s'est créée entre la Chancelière allemande et le futur président français semble indiquer qu'Emmanuel Macron s'attachera, sitôt élu, à unir ses forces avec Angela Merkel pour mettre enfin de l'ordre au sein de l'Union européenne. La sortie de la Grande Bretagne de cette communauté, à la suite du Brexit, justifiant une remise à plat des rapports entre les nations du Vieux continent il est probable, pour ne pas dire certain, que Berlin et Paris s’entendront pour la mise en route de l’Europe à deux vitesses que les Français semblent appeler de leurs vœux. Le problème que devra résoudre Emmanuel Macron, dans ce nouveau contexte, sera la répartition des tâches entre une Allemagne prospère sur le plan économique mais tenue à l’écart du petit groupe de nations détentrices de l’arme nucléaire et une France surendettée, dépressive, fatiguée mais qui détient cet outil éminemment stratégique.

° Sur le deuxième point Emmanuel Macron va devoir se montrer tout à la fois inventif et déterminé car les partenaires africains de la France se posent à juste titre la question de savoir si celle-ci va enfin prendre la mesure du poids croissant que pèse l’Afrique dans la communauté mondiale. La « Françafrique » étant morte depuis longtemps l’Elysée va-t-il faire en sorte que cessent les agressions menées contre les dirigeants du continent par les grands médias publics français et quelques organisations non-gouvernementales aux desseins pour le moins obscurs ? Organisera-t-il avec ses partenaires africains un dialogue sur les questions essentielles que sont la monnaie commune – le franc CFA –, la coordination dans le domaine de la défense et de la sécurité afin de lutter plus efficacement contre le terrorisme, la lutte pour la préservation de la nature et la protection de l’environnement, la formation des hommes ? S’emploiera-t-il à restaurer les relations de confiance que Nicolas Sarkozy et François Hollande ont fortement dégradées durant leur quinquennat respectif ?

Pour conclure sur le sujet, provisoirement bien sûr, disons que la porte est grande ouverte devant Emmanuel Macron pour une reconstruction rapide de l’image et de l’influence de la France. Mais cela ne sera possible que si le nouveau président prend la juste mesure du double enjeu décrit dans les paragraphes précédents et s’il s’entoure de personnalités compétentes. Attendons et voyons !

Jean-Paul Pigasse

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Édition Quotidienne (DB)

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