Réaction au discours de Joseph Kabila : Jean-Claude Katende exhorte le peuple congolais à plus de vigilance

Vendredi 7 Avril 2017 - 19:50

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Après une analyse de ce que le chef de l’Etat avait livré au peuple, par les députés et sénateurs, le président de l’Asadho a noté qu’il était clair que la mobilisation reste importante pour contraindre le président de la République, l’opposition et la majorité présidentielle à respecter l’accord du 31 décembre 2016. « Faisons attention », a-t-il conseillé, notant que cette vigilance tous azimuts était cruciale pour que les élections notamment aient effectivement lieu en décembre 2017.

Dans une analyse du discours du chef de l’Etat, Joseph Kabila, sur l’état de la nation fait le 5 avril devant les deux chambres du Parlement réunies en congrès, le président de l’Association africaine des droits de l’homme (Asadho), Mè Jean-Claude Katende, a appelé le peuple congolais et les organisations des droits humains à plus de vigilance.

Pour les élections prévues par l’accord politique du 31 décembre 2016, notamment, ce juriste et activiste des droits de l’homme a noté qu’il faut se féliciter du fait que le président de la République a réaffirmé sa détermination à faciliter l’organisation des élections au courant de cette année, en disant que les élections auront bel et bien lieu, que ceux qui doutent encore soient rassurés. Mais, pour Jean-Claude Katende, « cette déclaration peut devenir une distraction si le peuple congolais ne tient pas le président de la République aux mots pour exiger que les élections aient vraiment lieu ». Les affirmations du genre les élections auront bel et bien lieu, a-t-il fait remarquer, ont été aussi faites par le même président de la République en 2015, mais les élections n’ont jamais été organisées en 2016.

Le président de l’Asadho a, par ailleurs, noté que la RDC n’a pas de moyens pour financer toute seule les élections de décembre 2017. Cette vérité l’amène donc à déduire que le pays aura donc besoin de l’assistance de certains partenaires internationaux. « Comment lesdits partenaires peuvent-ils contribuer  à l’organisation des élections qui sont une question de souveraineté nationale sans poser certaines conditions relatives à la transparence, la crédibilité du processus, sans oublier la publication du calendrier électoral et un budget réaliste ? », s’est-il enfin demandé. Ce juriste s’est également demandé si, en excluant toute ingérence extérieure dans le pilotage et organisation des élections,  le président de la République excluait aussi l’assistance internationale à l’organisation desdites élections. Si tel est le cas, alors que le Congo n’a pas suffisamment des moyens pour organiser seul les élections, a-t-il dit, le report des élections est presque certain. Considérant toutes ces questions, le président de l’Asadho pense que la pression du peuple sur la classe politique est cruciale pour que les élections aient effectivement lieu en décembre 2017.

Un discours pas du tout rassurant

Dans sa réaction, Mè Jean-Claude Katende pense que le discours du président de la République n’est pas du tout rassurant. Evoquant la situation sécuritaire au Kasaï. Le juriste note qu’il y a lieu de regretter que lors de son discours, le président de la République n’ait pas présenté, de manière expresse, ses condoléances aux familles qui ont perdu innocemment des êtres chers dans ces évènements. « Est-ce que toutes les personnes qui ont perdu la vie dans les évènements du Kasaï étaient toutes les adeptes du chef Kamwina Nsapu ? », s’est-il demandé. Pour lui, au vu des massacres survenus dans cette partie du pays, il est important que les organisations des droits humains nationales et internationales suivent la situation des droits de l’Homme avec plus d’attention maintenant que le Kasaï est décrété secteur opérationnel. Sans suivi régulier de nos organisations, a-t-il fait remarquer, il est possible que des violations graves des droits humains s’y commettent encore. « La vigilance de tous reste la règle pour que les opérations militaires qui vont s’y passer respectent les droits humains des populations civiles », a-t-il insisté.

Tablant sur la désignation du Premier ministre, Jean-Claude Katende avait pensé qu’il était une bonne chose que le président de la République ait pris lui-même la direction des consultations qui ont eu lieu au cours de la semaine.  Mais, pour le président de l’Asadho, la nomination du Premier ministre devra se faire dans le cadre de l’Accord politique du 31 décembre 2017.  Ceci, a-t-il dit, pour décourager l’opportunisme de certains Congolais qui ont voulu profiter des circonstances actuelles pour créer une dissidence au sein du Rassemblement. « Ce sont des actes que personne ne doit encourager », a-t-il conseillé.

Mais, pour Jean-Claude Katende, le Premier ministre qui doit être désigné et nommé ne devrait nécessairement pas être Félix Tshisekedi. « Nous disons qu’il doit être désigné par le Rassemblement. Qu’il soit Félix Tshisekedi ou quelqu’un d’autre, cela nous importe peu. L’essentiel est que l’accord politique soit respecté », a-t-il fait savoir.

Le président de l’Asadho a fait, par ailleurs, savoir que nommer un Premier ministre qui ne serait pas désigné par le Rassemblement dirigé par Félix Tshisekedi n’aurait pas résolu les problèmes qui ont conduit au dialogue de la Cénco. Tel, a-t-il mentionné, le cas de la nomination de Samy Badibanga.

Pour Jean-Claude Katende, les causes auxquelles le président de la République a attribué la situation difficile des Congolais sont toutes fondées. Mais, selon lui, le chef de l’Etat n’a pas abordé les vrais problèmes qui sont à la base de la faillite, en ce qui concerne le secteur des matières premières. Le juriste a pointé notamment la corruption, la mauvaise distribution des revenus et le bradage des concessions minières du pays au profit de certains hommes d’affaires internationaux. « Le président n’a pas abordé ces questions essentielles et n’a envisagé aucune mesure pour redresser la situation », a-t-il fait remarquer, se demandant où serait partie la croissance économique de l’ordre de 6, 7 et 8%  dont parlait l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo. « Qui en a tiré profit ? », s’est-il demandé, en répondant d’avance que ce n’était vraiment pas les Congolais.

Une misère persistante

Dans sa conclusion, le président de l’Asadho a noté que sans aborder ces questions qu’il a jugées essentielles, la misère du peuple congolais va encore continuer. Et dans les prochains mois, a-t-il regretté, le président de la République va faire encore un autre discours et nous allons encore applaudir mais notre misère sera toujours là. « C’est à nous de comprendre et d’exiger plus de nos hommes et femmes politiques. Comment la classe politique qui ne respecte pas la Constitution peut-elle respecter les mots prononcés dans un discours ? C’est nous, le peuple qui avons le pouvoir de faire du Congo, ce que nous voulons qu’il soit », a-t-il dit.

Lucien Dianzenza

Légendes et crédits photo : 

Photo: Le président de l'Asadho, Jean-Claude Katende.

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