Rélations internationales: le nouveau monde que tente de façonner la nouvelle Amérique

Mardi 17 Janvier 2017 - 14:00

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Inquiétude, incertitude, incompréhension : l’embarras qui traverse les chancelleries du monde est immense depuis l’élection, le 8 novembre 2016, du 45è président des Etats-Unis d’Amérique. Il est peut-être à la mesure du penchant pour l’immobilisme accommodant dans lequel vivent les nations depuis le siècle dernier. Comme si les deux guerres mondiales étaient restées maitresses du jeu.

Homme d’affaires et multimilliardaire, Donald Trump a gravi, une à une, les marches de l’échelle qui, à la surprise quasi générale, l’a hissé à la tête de la première puissance mondiale presque sans l’aide de personne. Longtemps hésitant, opposé à la limite, mais visiblement privé des moyens de coercition, le parti républicain qu’il représentait à ce scrutin mémorable avait fini par rallier une candidature portée par une sorte de marée incompressible.

Est-ce pour cela que le nouveau président des Etats-Unis, qui prendra possession du bureau ovale de la Maison Blanche, le 20 janvier, ne semble tenir compte de l’avis de personne ; ne se laisse impressionner par aucune des traditions diplomatiques dont son pays et ses alliés, en Europe, avaient, depuis la fin de la seconde guerre mondiale, érigé en modus vivendi ? Donald Trump se sentirait-il investi de la mission divine de démonter les survivances des relations internationales qui se plaisent d’un monde partagé entre des essentiellement bons et des entièrement mauvais, des totalement riches et puissants et des éternellement faibles et pauvres ? Y parviendra-t-il si tel est le cas ?

Adepte de la controverse, présent sur twitter comme nul autre à ce niveau des responsabilités, Donald Trump tente de tout arbitrer à bonne distance. Sa façon de communiquer laisse des experts sans voix, car les présidents des Etats-Unis avaient habitué le monde à les voir trancher dans la solennité du pouvoir exécutif. Pour ne parler que de ses deux derniers prédécesseurs, Georges Bush Junior et Barack Obama, les grandes décisions les mobilisaient toujours devant un parterre de collaborateurs et de journalistes, sinon de préférence derrière un lutrin flanqué du sceau du « Président des Etats-Unis » en des lieux symboliques. Bien plus, ils avaient exercé une fois investis dans leurs fonctions.

Lorsque tourmenté par les attentats du 11 septembre 2001, Georges W. Bush déclenchait la guerre contre l’Irak de Saddam Hussein, il choisit le cadre approprié de la Maison Blanche pour s’adresser au monde. Il ne dérogea pas à la règle le jour où, après des années passées à traquer son ennemi juré, il annonça la capture de l’ex-dirigeant irakien. Barack Obama s’entoura lui aussi des mêmes précautions pour informer officiellement l’opinion américaine et internationale de la mort d’Oussama Ben Laden, après dix ans de cavale. Est-on, peut-être, en train d’assister à l’avènement d’une communication façonnée par la tendance à prendre l’interlocuteur de court via les réseaux sociaux.

Pour les quatre prochaines années, les porte-paroles de la Maison Blanche vont avoir, soit beaucoup de travail, soit pas du tout. Dans les deux cas, ils devront être scotchés au compte twitter du président pour en apprendre davantage des grands dossiers sur lesquels ils seront appelés à se pencher. Avant sa prise de fonction, Donald Trump avait à peu-près donné le ton sur les principales affaires intérieures et extérieures qui l’occuperont durant son mandat. Sur chacune d’elles, en dépit du fait que sa vision ne fait pas toujours l’unanimité, sa conviction est tenace, il s’engagera à fond.

Au-dedans, il en ira par exemple des entreprises ayant délocalisé : elles doivent revenir aux Etats-Unis si elles ne veulent pas crouler sous le poids de taxes asphyxiantes. L’autre affaire à laquelle l’administration Trump procédera très vite au démantèlement est l’Obamacare, l’assurance maladie promue par Obama. Au dehors, les relations avec l’OTAN et l’Europe seront revisitées. On l’a vu célébrer le Brexit et prédire d’autres départs de la Maison UE. Avec Cuba, la lune de miel née du temps d’Obama pourrait s’étioler. Les échanges commerciaux avec la Chine pourraient constituer la pierre d’achoppement entre Beijing et Washington. A-t-il une préférence pour la Russie ? Dans son pays même, ailleurs et à Moscou, chacun attend de voir ce qu’il en sera.

Quant à la région troublée du Moyen-Orient, tombeuse de toutes les espérances, et de toutes les audaces, l’alerte est donnée à la nouvelle administration américaine de savoir raison garder avant toute intrusion dans le dossier israélo-palestinien. Les 70 pays réunis, le 13 janvier dernier, à Paris, autour de ce conflit vieux de plus de près de 70 ans, ont averti Donald Trump de s’abstenir de créer le précédent en installant l’ambassade américaine à Jérusalem. Ils lui ont aussi notifié combien l’accord sur le nucléaire iranien est faiseuse de tranquillité pour tous, et combien celui de Paris sur le changement climatique mérite d’être soutenu.

Trump regardera-t-il l’Afrique avec intérêt ? On attend de voir. Sur les cinq continents, toutes les nations partagent à peu-près les mêmes défis des conflits armés, du terrorisme, de la crise économique, de la famine et de la maladie, avec leur corollaire les migrations. Il est possible que la nouvelle administration américaine renouvelle ses missions diplomatiques sur le continent noir, avec l’intention de mieux intégrer l’Afrique au processus du développement mondial. On peut être tenté de dire que si Donald Trump ne préserve pas un tant soit peu les fondements sur lesquels l’architecture diplomatique universelle est sculptée, les changements qu’il voudrait y apporter, salutaires soient-ils, pourraient lui opposer la loi des ou de la réalité. Irrépressiblement !

Gankama N'Siah

Légendes et crédits photo : 

Le président élu des États Unis d'Amérique/ DR

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