Report des élections : tirs croisés sur la Céni

Lundi 10 Juillet 2017 - 17:29

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Selon l’opposition, l’option prise par le président de l’Institution Corneille Nangaa plonge le pays, qui va déjà très mal, dans un nouveau cycle d’incertitudes aux conséquences incalculables. 

Il n’y aura pas d’élections en décembre 2017. C’est le président de la Céni, Corneille Naanga, qui l’a dit vendredi dernier depuis Paris dans le cadre d’une rencontre entre l’OIF et les envoyés spéciaux des États et organisations internationales partenaires de la RDC impliqués dans l’accompagnement du processus électoral. La nouvelle a fait l’effet d’une bombe, prenant à contre pied tous ceux qui militaient déjà pour la tenue des scrutins en décembre de l'année en cours. Les partis et regroupements politiques de l’opposition qui avaient fait une fixation sur la tenue coûte que coûte des élections d’ici décembre ont dû déchanter. Ils sont dès lors tenus de recadrer leurs stratégies politiques par rapport à cette nouvelle donne.

La levée de boucliers s’est faite un peu partout avec, à la clé, la menace de remobiliser la rue pour dénoncer ce qui paraît comme une provocation de trop de la part d’un régime « qui tient à s’éterniser au pouvoir », selon les propos de Félix Tshisekedi, leader du Rassop/Limete. À l’opposition radicale, on laisse entendre qu’on n’est pas prêt de cautionner un deuxième glissement. Plusieurs plates-formes de ce bord politique jugent d’arbitraire et d’illégale le report des élections qui, selon elles, a le mérite de rendre le ciel nuageux dès lors que la Céni n’a proposé aucune indication claire sur un quelconque calendrier technique assorti d’un échéancier clair. Sans cette boussole que constitue le calendrier électoral, il va sans dire que le processus électoral patauge dans les méandres de l’incertitude.

Quand bien même le calendrier électoral serait publié après l’évaluation du processus électoral par la Céni, le gouvernement et le Conseil national de suivi de l’Accord (CNSA), rien ne rassure cependant sur la suite. L’absence du CNSA non encore installé est un autre détail qui risque de retarder les échéances. On en a encore pour longtemps, connaissant les habitudes de la classe politique congolaise dont la nonchalance est devenue une seconde nature. Entre-temps, des sources proches de la Céni font savoir qu’il est impossible d’avoir le fichier électoral d’ici le 31 juillet comme prévu. Tout est donc tributaire à une concertation Céni-gouvernement-CNSA censée relancer le processus électoral conformément à l’accord de la Saint-Sylvestre.  

Vivement le consensus !

En attendant, l’échéance de décembre 2017 apparaît, au regard des difficultés techniques brandies par la Céni,  comme populiste et non réaliste. Reviendra-t-on à l’échéance d’avril 2018 fixée par l’accord du 18 octobre qui avait tout l’air de prendre en compte toutes les données techniques pouvant assurer la faisabilité des scrutins ? La question reste posée. Là-dessus, certains observateurs font remarquer que l’indépendance de la Céni, seule habilitée à décider sur l’organisation des élections risque d’être écornée au profit des politiques qui, une fois de plus, vont tenter de la mettre à la traîne. Ce qui ne serait pas de nature à faire avancer les choses. « Cette réunion permettra d’avoir une date raisonnable et non populiste qui devra être respectée », tente de rassurer un cadre de la majorité sans pour autant convaincre les sceptiques de l’opposition. Pour ces derniers, Corneille Naanga a failli pour n’avoir pas tenu l’échéance de décembre 2017 fixée dans l’accord du 31 décembre et, par conséquent, est appelé à rendre le tablier. Ils balayent d’un revers de main tout l’argumentaire développé par la Céni pour justifier ce report en mettant en exergue l’insécurité au Kasaï. Pour eux, le report de l’élection « porte atteinte au droit de vote » des Congolais.

Plus incisifs, certains membres de l'opposition à l‘instar de Claudel Lubaya, leader de l’UDA - parti membre de la Dynamique de l'opposition -, estiment que ce report des scrutins va péricliter le pays dans un cycle infernal d’incertitudes aux conséquences incalculables. Et d’inviter toutes les forces réelles du changement, celles qui ne se sont pas compromises, « à fédérer leurs énergies pour dégager un consensus urgent sur les voies et moyens de préparer et de réaliser l’alternance tant attendue par notre peuple et pour laquelle il a payé le prix le plus fort ».                                  

Alain Diasso

Légendes et crédits photo : 

Corneille Naanga

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