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Rochereau à l’Olympia

Vendredi 6 Décembre 2013 - 1:28

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Dans la nuit du 12 au 13 décembre 1970, le seigneur Rochereau se produit à l’Olympia de Paris. Un événement et un succès quand on sait que Rochereau a mis tout son cœur à l’œuvre pour affronter le public parisien. Il est le premier artiste africain à se produire dans la prestigieuse salle de la rue des Capucines. Rochereau et ses musiciens : Pépé Ndombé, Karé, Malao Hennessy, Michelino, Mantuika Kongolia, Philo Nkola, Sacky, Biolo, Empopo Loway, Mwena, Mavatiku, Attel, Willy Mbembé, Seskain Molenga, Bakoyéné, les danseurs Pascal Kabemba, Dilins « Kinsekwa », ainsi que les danseuses Marie-Claire Saïdi, Mariette Mpwapwa « Marietou », Angelique Yeni, Marie-Thérèse Yoka et Annie Mbuly électrisent la foule.

La présence de celles qu’on désigne sous le nom de « Rocherettes » prouve à suffisance qu’au-delà de son génie propre, Rochereau, dans la mise en scène de son spectacle, s’est inspiré de Claude François et de ses « Claudettes ». Le répertoire qu’il présente le soir de sa prestation comprend, outre ses propres créations, des compositions de Franco, Éboa Lottin, Pamélo, Labah Sosseh, pour l’essentiel. Rochereau a gagné son pari. À la fin de son somptueux spectacle, Bruno Coquatrix jubile. Il est heureux. « Avec le succès incontesté et incontestable du seigneur Rochereau, j’ouvre la porte de l’Olympia à tous les artistes africains de talent », déclare-t-il.

L’artiste est félicité par Kabasélé, son mentor ; Gérard Akuesson, célèbre manager togolais ; le musicien Manu Dibango ; les chanteuses Utah Bella et Bella Bellow, présents parmi d’autres dans la salle. L’Olympia est donc un véritable tournant dans la carrière de Rochereau. Après son extraordinaire succès, Rochereau entreprend une grande tournée dans son pays puis il accompagne le président Mobutu à Dakar. C’est au retour de ce voyage qu’il crée le soum djoum, un nouveau rythme et une nouvelle danse consacrés par quelques chansons : Mundi, Silikani, Samba, etc. C’est dans le sillage de ce rythme que s’engouffrent, quelque temps après, l’orchestre Continental de Josky Kiambukuta, Bopol Mansiamina, Blaise Pasco Wuta Mayi et les autres.

Le spectacle de l’Olympia, pour qui connaît le fin mot de l’histoire « rochélienne », sonne comme une révolte et une rupture dans son cheminement professionnel. Depuis toujours, Rochereau a vécu sous la lumière de son talent d’auteur, mais à l’ombre de très fortes personnalités tutélaires. À ses débuts, il est sous la férule de Kabasélé, dans l’African Jazz avant de se retrouver sous la coupe de Nico dans l’aile de l’African Jazz que crée ce dernier. Lorsqu’il retrouve Kabasélé, c’est sous le joug de celui-ci qu’il évolue à nouveau. Au moment de la création de l’African Fiesta, après l’éclatement de l’African Jazz, il est, en dépit de son statut d’administrateur, sous l’influence de Nico. Lorsque ce dernier et son frère Déchaud quittent l’African Fiesta, l’abandonnent en vérité pour monter l’African Fiesta Sukisa, c’est Roger Izeïdi, son producteur et éditeur, qui le prend sous son aile jusqu’à leur séparation quelques années après à l’initiative de Rochereau. Roger Izeïdi est surpris de l’apprendre par la radio.

Au plan professionnel, tout commence fin 1969, début 1970. Il met un terme à ses relations avec Roger Izeïdi, jusque-là son producteur et éditeur. Il crée Isa, structure administrative et maison d’édition. Désormais, c’est lui le patron, le seul maître à bord de l’African Fiesta National puis de l’Afrisa qu’il crée après son passage à l’Olympia. Avec cet orchestre, il atteint la maturité dans son art, mais cafouille pas mal dans la gestion de son groupe. Ce qui explique, dans une large mesure, les difficultés qu’il a connues avec ses musiciens. Dès son retour de l’Olympia, Mwena et Faugus le quittent. Un an après, c’est au tour de Ndombé Opétun, Deyesse, Willy de claquer la porte de l’Afrisa. Ils s’en vont monter l’Afrizam. La saignée se poursuivra au cours des décennies 1970 et 1980. Mais Tabu Ley a suffisamment de ressort et réussit toujours à rebondir.

Mfumu

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Édition Quotidienne (DB)

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