Santé : les pays européens refusent de financer à meilleure hauteur la lutte contre la tuberculose dans les pays du Sud

Vendredi 1 Novembre 2013 - 15:29

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Pour la première fois depuis environ dix ans, les financements dédiés à la lutte contre la tuberculose, une maladie présente presque exclusivement dans les pays du Sud, ont baissé. À l’inverse du sida,  la tuberculose souffre d’un manque de mobilisation des pays développés. C’est le constat fait lors d’une rencontre autour de la tuberculose organisée au Sénat à la veille de la Conférence internationale de l’Union européenne (UE) contre les maladies respiratoires

L’ONU aurait diagnostiqué en 2011 environ neuf millions de personnes nouvellement atteintes de la tuberculose et 1,4 million de décès liés à la maladie. Par rapport à 2011, les financements dédiés à la recherche et au développement (R&D) pour la tuberculose  ont baissé de 4,6% en 2012 pour atteindre 627,4 millions de dollars. Ce qui serait une première, selon le rapport du think-tank Halte à la tuberculose.

Sa directrice exécutive, Lucica Ditiu parle de « véritable déconnexion entre la gravité et l’ampleur de cette maladie et les moyens pour la combattre ». Presque disparue des pays développés, la tuberculose, maladie des pauvres, est toujours présente dans les pays pauvres, mais à l’inverse du sida, elle ne touche plus l’ensemble des économies. Aujourd’hui, vingt-deux pays seulement supportent 80% de la charge mondiale de la tuberculose. Lucica Ditiu s’insurge : « Nous disposons des mêmes outils pour lutter contre la tuberculose qu’il y a 40 ans. »

Le budget mondial de R&D pour le sida est d’environ 6 milliards de dollars par an. Pour chaque dollar dépensé dans la recherche sur cette maladie, seuls 10 cents sont consacrés à la recherche sur la tuberculose, a expliqué le directeur exécutif du groupe d’action pour le traitement, Mark Harrington, une iniquité qui pourrait mettre en péril les progrès accomplis dans la lutte contre cette maladie infectieuse. La tuberculose enregistre 2% de baisse annuelle dans le monde. À ce rythme, il faudrait environ 180 ans pour que les plus touchés, notamment africains, par cette maladie atteignent les niveaux enregistrés dans les pays développés, expliquent les experts.

À en croire le rapport 2013 de l’ONU sur les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD),  bien que lente, cette baisse devrait permettre d’atteindre la cible OMD qui consiste à  arrêter la progression et inverser l’incidence de la tuberculose L’objectif de réduire de moitié les taux de décès de 1990 d’ici à fin 2015 « pourrait être atteinte à l’échelle mondiale et dans plusieurs régions » relève l’organisation.

La répartition entre les trois maladies reste délicate au sein du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme. Pour l’ambassadeur français pour les maladies transmissibles au Quai-d’Orsay, Philippe Meunier, il est indéniable que la lutte contre le sida a tiré les financements du fonds vers le haut.  Il propose de  fonctionner davantage grâce au cofinancement. La répartition entre les différentes maladies infectieuses demeure difficile. En effet, le sida accapare à lui seul 50% des ressources du Fonds mondial, et la tuberculose 18%. La reconstitution du Fonds mondial est prévue avant la fin de l’année 2013. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) indique que 13% des personnes tuberculeuses étaient séropositives en 2011.  

L’OMS et le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme soulignent qu’il faudrait 1,6 milliard de dollars supplémentaires pour combler le déficit de financement pour la période 2014-2016 de la lutte contre la tuberculose. La question qu’il faut se poser, c’est de savoir si l’austérité budgétaire aura raison de l’investissement des donateurs.

La France, quant à elle, va doter le Fonds mondial de 360 millions d’euros annuels pour la période 2014-2016, soit un maintien de sa contribution par rapport à la période 2011-2013. Le Royaume-Uni compte, par contre, augmenter sa contribution à 1,18 milliard d’euros sur trois ans, ce qui en fait le premier  pays européen donateur.

Noël Ndong